Eglises d'Asie – Philippines
Des mineurs philippins offrent de l’or en action de grâce
Publié le 12/02/2018
Le seul jour de l’année durant lequel Alberto Odi peut se reposer de la mine est le jour de la Chandeleur, chaque 2 février. Le mineur de 42 ans prépare alors une douzaine d’œufs pour représenter chaque mois de l’année, ainsi qu’une pincée de poudre d’or qu’il apporte à l’église en offrande. L’or, qu’il échange contre de l’argent à un bureau d’échange local avant de se rendre à l’église, vient de sa part de salaire acquise durant le mois précédent.
« L’église n’accepte pas d’or », plaisante Alberto après avoir reçu vingt dollars américains en échange de son or. « Il pourrait tomber dans de mauvaises mains », ajoute-t-il. Alberto travaille comme mineur à Paracale, une ville de la province de Camarines Norte, à environ 334 kilomètres au sud de la capitale, Manille. « J’ai commencé à me rendre à la mine quand j’étais garçon », explique-t-il. « C’est le seul travail que je connaisse. »
Presque toute sa vie, il a passé presque douze heures par jour dans des tunnels sombres avec peu d’air et la menace permanente des effondrements. Parfois, il se joint à des expéditions minières sous-marines, dans les régions marécageuses autour de la ville. S’aidant de bouteilles de plongée, Alberto et ses amis creusent la boue sous l’eau vaseuse. Le mineur confie que c’est un travail difficile et dangereux, mais qu’il prie toujours la Vierge Marie pour sa protection.
« Mon père disait toujours que la Vierge nous protège dans les tunnels », ajoute Alberto. Les locaux nomment la Vierge « Inay Candi » ou « Mère Chandelle », en référence à la statue conservée dans l’église de la ville, qui serait une réplique exacte de l’originale, Notre Dame de la Purification et de la Chandeleur (Nuestra Senora de la Purificacion y Candelaria), située dans un sanctuaire marial à Tenerife, en Espagne. La légende dit que la statue originale de la Vierge, portant l’enfant Jésus dans une main et une bougie dans l’autre, serait apparue sur une plage à Chimisay, en Espagne, en 1392.
La piété unique de Paracale
Contrairement à la statue espagnole, celle de Paracale porte également une épée. Les locaux disent que l’épée a sauvé la ville des pirates en 1809. Selon eux, la Vierge serait descendue de l’autel pour faire fuir les pilleurs. Parce qu’il manque un doigt, les locaux disent que la Vierge l’a perdu en se battant contre les pirates sur la plage de Paracale.
La population croit qu’en plus de les protéger contre les calamités, la Vierge leur porte chance. En 1626, des années après que les moines espagnols sont arrivés par la mer, une importante mine d’or fut découverte à Paracale, dont le nom signifie « creuseur de canal ». Aujourd’hui, la plupart des habitants dépendent de l’extraction de l’or pour vivre. Au fil des années, les gens de Paracale ont montré leur gratitude envers la Vierge en l’ornant d’une robe et d’une couronne faits d’or. Les ornements précieux, offerts par la population, apparaissent une fois par an, durant la fête de la ville. Le jour suivant les célébrations, le prêtre de la paroisse dépose les ornements dans une banque locale pour les garder en sureté, tandis que la statue est exposdans une salle voûtée de l’église paroissiale.
Le père Rodello Rempillo décrit la piété des habitants de Paracale comme « vraiment unique », ajoutant qu’elle n’est pas « avide, ou égoïste, ou avare ». « Ils donnent ce dont l’image a besoin, jusqu’au point d’être extravagants et excessifs. Nous l’avons vu quand les gens ont créé une robe et une couronne en or pur », explique le prêtre. « Ils lui attribuent toutes les prières entendues, la chance, les bonnes récoltes et la protection. » L’église de la ville, par ailleurs, vieille de 407 ans, est en cours de rénovation. Le prêtre confie avoir besoin d’au moins 200 000 dollors américains pour venir à bout de la première phase du projet.
Le père Rempillo est confiant en la capacité des habitants à récolter l’argent nécessaire. En seulement un an, les dons ont déjà atteint la moitié de la somme dont la paroisse avait besoin. « La générosité est profondément enracinée, dans la culture de la ville », se réjouit le prêtre. « Sur les sites miniers, les mineurs offrent aux visiteurs des extraits de minerais d’or. Vous ne repartirez pas chez vous les mains vides. »