Eglises d'Asie – Indonésie
Le gouvernement indonésien veut des élections paisibles
Publié le 16/02/2018
Afin d’éviter les conflits sectaires, en prévision des élections régionales prévues cette année, les autorités organisatrices des élections, en association avec les responsables religieux, travaillent sur une série de directives destinées aux prédications religieuses, qui seront distribuées par toutes les organisations religieuses.
Près de 160 millions de votants se rendront aux urnes durant les élections régionales du 27 juin dans 171 régions, afin d’élire 17 gouverneurs, 39 maires et 115 chefs de districts. Les campagnes ont démarré officiellement le 15 février.
Fritz Edward Siregar, directeur de la commission de contrôle des élections, confie avoir invité les responsables religieux à formuler ces directives destinées aux groupes religieux. Ces directives doivent permettre d’éviter que les dérives sectaires et la corruption ne soient utilisés pour soutenir les candidats. « Elle peuvent être utilisées par les protestants, les catholiques, les bouddhistes, les hindous et les confucéens », explique Siregar.
Celui-ci ajoute que la commission a incité des responsables religieux à s’impliquer pour éclairer les gens, particulièrement ceux qui ont une fausse idée de la démocratie. Cela fera partie du programme des candidats durant leur campagne : « Nous avons beaucoup appris depuis l’élection du gouverneur de Jakarta l’année dernière, troublées par des dérives sectaires. Nous espérons apaiser ces tensions. »
Durant ces élections, des groupes sectaires ont fait pression contre l’ancien gouverneur chrétien de Jakarta, Basuki Tjahaja Purnama, qui a été accusé de blasphème et n’a pas pu remporter les élections. Plusieurs manifestations menées par des groupes musulmans, notamment des musulmans radicaux, ont eu lieu et on semé le trouble parmi les habitants de la capitale.
Vraie fraternité
Le père Yohanes Ruse, secrétaire général de la commission liturgique des évêques indonésiens, approuve l’initiative de la commission de contrôle. Toutefois, le prêtre estime que ces directives concernent davantage une lettre pastorale qu’une prédication ; l’Église a d’ailleurs interdit que les sermons soient utilisés à fins politiques : « Les évêques ont publié une lettre pastorale en 2017. Ils y ont appelé les catholiques à s’ouvrir, à construire le dialogue avec les autres religieux, afin de lutter contre le fanatisme religieux et de permettre une vraie fraternité. »
Les évêques ont espéré que les catholiques puissent éviter de se diviser à cause de campagnes sectaires ou d’orientations politiques. De son côté, Masdar Masudi, le porte-parole de Nahdlatul Ulema, la plus importante organisation islamique d’Indonésie, affirme que ces directives seront utiles pour des élections paisibles : « Qu’on le veuille ou non, les gens utiliseront les prédications pour faire passer leurs visions politiques, sur des critères ethniques, religieux ou raciaux, ce qui peut détruire la paix. »
Il a également invité les mosquées à réprimander ceux qui utiliseraient ce genre de manœuvres pour véhiculer des campagnes destructrices. Le révérend Jeirry Sumampow, porte-parole de la Communion des Églises d’Indonésie, ajoute que même si ce n’est pas le travail de la commission, il ne peut qu’approuver cette initiative qui mérite son soutien : « Son effort encourage les institutions religieuses à faire plus attention aux sentiments raciaux, religieux ou ethniques, ainsi qu’à la corruption. Cela peut être destructeur pour notre démocratie. »
Les dérives sectaires prennent de l’ampleur, c’est pourquoi les organisateurs des élections régionales prennent ces mesures afin d’enrayer cette tendance destructrice pour le pasys. Lucius Karus, un analyste politique, a salué cette décision qu’il voit comme une avancée. Pour lui, les prédications peuvent influencer fortement les gens : « C’est pourquoi nous avons besoin de directives pour les guider, pour que ceux qui prêchent puissent aider les gens à mieux comprendre ce que cela veut dire de vivre ensemble en société. »
Markus Septiyanto, employé du secteur privé, vit dans l’ouest de Jakarta. Il s’est trouvé affecté par les tensions sectaires durant les élections du gouverneur de la capitale l’année dernière. Il estime qu’impliquer les responsables religieux dans les élections est un bon moyen de changer les choses.