La dépréciation de la vie humaine par la guerre du gouvernement philippin contre les drogues me semble refléter les « signes des temps » Cela doit susciter la réaction, la réflexion et l’action des communautés ecclésiales locales, particulièrement durant le temps du Carême. Durant ce temps de contrition pour les chrétiens, nous sommes amenés à méditer sur la Passion et la mort de Jésus. Il est devenu le modèle même de l’abnégation et de l’amour véritable. Il invite chacun d’entre nous à tout donner. Ce Carême 2 018 s’est ouvert sur la saint Valentin. Aux Philippines, le mois de février est non seulement considéré comme le « mois de l’amour » mais aussi comme celui du patriotisme.
En février 1872, trois prêtres philippins – Mariano Gomez, Jose Burgos et Jacinto Zamora – ont été exécutés pour avoir demandé que les Philippines soient reconnues comme une province de l’Espagne. C’est-à-dire qu’ils demandaient que les Philippins et les Espagnols puissent bénéficier du même statut, que les Philippins soient représentés au parlement espagnol (Cortes Generales), que les paroisses soient confiées au clergé local et que les droits de l’homme soient reconnus. Si la Commission historique nationale commémore cette terrible histoire de persécution l’Église aux Philippines semble avoir déjà oublié la contribution de ces trois prêtres pour la liberté. Le sacrifice de ces trois martyrs philippins peut faire l’objet d’une belle méditation de Carême. Leurs morts ont manifesté leur grand amour pour leur pays. Près de 150 ans après leur exécution, justice n’est toujours pas rendue.
« Honorons les martyrs de la foi »
Pire encore, la persécution continue contre les chrétiens qui défendent les pauvres et les opprimés. L’exemple le plus récent est celui du meurtre brutal du père Marcelino Paez en décembre, qui avait accéléré la libération d’un prisonnier politique. Le meurtre rappelle l’assassinat d’un missionnaire italien, le père Tulio Favali, la décapitation du père Nilo Valerio, la disparition du père Rudy Romano et la mort du père Edgar Kangleon, durant la dictature des années 1980.
Durant ces années-là, beaucoup de chrétiens se sont joints à Christians for national liberation (Chrétiens pour la libération nationale), une organisation souterraine qui rassemblait des chrétiens, inspirés par le martyr des prêtres philippins du siècle précédent. Beaucoup de ces chrétiens ont dû faire des choix difficiles à cause de l’Évangile, au prix de leur liberté voire de leur vie. Malheureusement, ils semblent avoir été oubliés de beaucoup de chrétiens philippins, prêtres, évêques et religieuses, ces jours-ci. Même l’assassinat récent du père Paez n’a pas fait l’objet de prières, de réflexion et d’indignation collective de la part des évêques, et encore moins de la part des fidèles.
En cette période de miséricorde et de contrition, le vrai symbole d’amour est Jésus sur la Croix, déclarant ainsi qu’« il n’y a de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime ». Durant le Carême, nous devons partager la peine et la souffrance de nos frères et sœurs, victimes de graves violations des droits de l’homme dans le pays. Honorons les martyrs de la foi par des actes de charités, en témoignant concrètement de notre amour.
(Ucanews, Mary Aileen Bacalso)
Mary Aileen Bacalso est secrétaire générale de la Fédération asiatique contre les disparitions involontaires (AFAD). Pour son dévouement pour la cause des personnes disparues, le gouvernement argentin lui a accordé le prix international des droits de l’homme Emilio Mignone en 2013.