Un prêtre philippin rédemptoriste, connu pour sa défense des Droits de l’Homme et pour ses critiques contre le président Rodrigo Duterte, a décidé de mener une vie de solitude, en ermitage. Le père Amado Picardal, également connu comme le « prêtre à vélo » à cause de ses campagnes à vélo à travers le pays, en protestation contre les tueries liées à la guerre contre la drogue, a décidé qu’il était temps pour lui d’être silencieux. À 64 ans, le prêtre se dit déjà à une époque charnière de sa vie, et il ressent le besoin de se retrouver en solitude. « Ce n’est pas pour tout le monde, mais j’aime cela », explique-t-il avant de se rendre dans les montagnes d’une province centrale de l’archipel philippin. « Il y a toujours une période très active dans la vie de chacun, puis vient un temps pour devenir contemplatif. Les deux sont liés », assure le prêtre.
Le père Amado a décidé de passer le reste de sa vie dans le jeûne et la prière. Quand on lui demande pourquoi il a décidé ainsi de ne plus s’occuper des problèmes de la société philippine, le prêtre ajoute : « Il ne s’agit pas toujours de ce que je peux faire moi, mais de ce que Lui peut faire. » Pour lui, une vie de prière peut contribuer à transformer la société, « en particulier quand vous comprenez que vous vous battez contre des forces maléfiques ». Le prêtre pense que les Philippins devraient consacrer plus de temps à la prière silencieuse, assurant que le pays a besoin d’une « désintoxication spirituelle ». « Il y a un temps pour les manifestations publiques, mais il y a aussi un temps pour plier le genou », confie le père Amado, qui est aussi appelé « Father Pix » par ses amis.
Le prêtre, qui a également été responsable du corps des Communautés Ecclésiales de Base, qui dépend de la Conférence épiscopale philippine, explique que l’Église doit redoubler d’effort « si nous voulons renouveler notre société ». Premièrement, beaucoup de membres du clergé manquent à leurs devoirs en tant que serviteurs de l’Évangile, en particulier face au mal qui ronge notre société, estime le prêtre. « Ne vous contentez pas de célébrer la messe, soyez davantage », continue le prêtre, pour qui beaucoup de catholiques « pensent trop aux apparences ». Il estime que trop de fidèles ne font pas assez attention à leur « transformation intérieure ». « Les personnes qui participent aux processions religieuses et à la sainte messe sont parfois les mêmes qui soutiennent les tueries… C’est le problème d’un christianisme divisé. »
« Je veux vivre le sacerdoce dans toutes ses dimensions »
Le père Picardal a été ordonné prêtre le 24 avril 1981, et durant les 37 dernières années, il a vécu sa vie de prêtre à
Il a rejoint les Rédemptoristes en 1977 et a été ordonné quatre ans plus tard. Son travail aux côtés des communautés pauvres lui a ouvert les yeux sur les menaces de l’exploitation forestière illégale. Il a alors mené une rude campagne pour demander l’interdiction totale des abattages dans la province de Bukidnon, dans le sud de l’archipel. En 1995, il a terminé un doctorat en théologie à Rome, et durant les quinze années suivantes, le père Amado a mené une vie de « dialogue et de défenseur de la paix ». C’est en enseignant au grand séminaire de Davao, dans le sud de l’île de Mindanao, qu’il a été directement témoin des atrocités commises sous l’autorité de l’administration municipale, dont le maire était alors Rodrigo Duterte. Le prêtre a alors mené sa première campagne à vélo pour attirer l’attention sur ces tueries. Depuis, il a parcouru 12 000 kilomètres en pédalant, en marchant et en courant à travers le pays.
(Avec Ucanews, Tacloban)
