Eglises d'Asie – Inde
10 000 chrétiens manifestent contre la discrimination au Jharkhand
Publié le 18/07/2018
Le 15 juillet, près de 10 000 chrétiens de l’État de Jharkhand, dans l’est de l’Inde, ont formé une chaîne humaine afin de protester contre ce qu’ils considèrent comme une répression d’État contre les chrétiens. Les chrétiens de l’État, pour la plupart originaires des minorités indigènes, affirment que leur gouvernement, dirigé par le BJP pro hindou (Bharatiya Janata Party), a développé des politiques qui les privent de leurs droits et de leurs terres. Sous une pluie battante, des femmes, des enfants et des personnes âgées appartenant à plusieurs Églises se sont joints à la chaîne humaine après les célébrations du dimanche. Des manifestations ont eu lieu à Ranchi, Gumla, Simdega, Bokaro, Jemshedpur et Khunty, les participants lançant des slogans contre les mesures des autorités de l’État.
« Des religieuses, des prêtres catholiques et des pasteurs sont attaqués et emprisonné. Des enquêtes sont menées contre leurs institutions. Ils se voient accusés de tous les maux de l’État », a déclaré l’organisateur, Prabhakar Tirkey, président du forum chrétien œcuménique Rashriya Isai Mahasangh. Les chrétiens sont furieux depuis l’arrestation récente de religieuses Missionnaires de la Charité, l’ordre fondé par sainte Mère Teresa, accusées de traite d’enfants. Le prêtre jésuite Alphonse Aind, directeur d’école dans un village reculé, a également été arrêté et placé en détention provisoire suite à des accusations de complicité de viol. Les chrétiens affirment que les arrestations font partie d’une campagne soutenue par l’État afin de présenter les chrétiens et les missionnaires comme des criminels et de salir leurs institutions. « Cela fait partie d’un plan organisé pour tenir les gens ordinaires éloignés des institutions chrétiennes et des missionnaires », dénonce Prabhakar Tirkey.
Isoler et fragiliser les communautés indigènes
Depuis que le BJP est venu au pouvoir au Jharkhand en 2014, des groupes hindous accusent les chrétiens de conversions illégales des Dalits (intouchables) et des populations indigènes, poursuit Prabhakar. Il y a un an, l’État a voté une loi condamnant à la prison le fait de changer de religion sans en informer le gouvernement. Ankita Kujur, qui a participé aux manifestations, assure que le gouvernement cherche à diviser les populations indigènes entre chrétiens et non chrétiens, afin d’isoler et fragiliser les communautés indigènes. La stratégie vise à s’attirer les votes des non chrétiens et à porter atteinte aux voix qui soutiennent les droits indigènes.
Le gouvernement de l’État affirme que toutes les personnes indigènes non chrétiennes sont hindoues. Pourtant, la plupart des personnes indigènes non chrétiennes suivent leur religion traditionnelle Sarna, et demandent au gouvernement de la reconnaître parmi les religions officielles. Le gouvernement a tenté de modifier deux lois de l’État en retirant des clauses protégeant les terres des populations indigènes. Celles-ci estiment que la tentative cherchait à transférer leurs terres aux compagnies minières. Le gouvernement a aussi fait face à l’opposition après avoir amendé une loi fédérale créée il y a cinq ans pour protéger les droits des agriculteurs et des personnes indigènes en cas de saisie de leurs terres. « À moins que l’on s’y oppose, cela va mettre en péril la communauté, peu à peu », poursuit Ankita Kujur.
Ajay Tirkey, président du comité central Sarna, confie que le comité a demandé le statut officiel pour la religion Sarna, « pour que nous puissions bénéficier d’une identité indépendante ». Les membres de la tribu Sarna sont aujourd’hui considérés comme hindous par le recensement officiel. L’État du Jharkhand compte environ 32 millions d’habitants, dont un million sont chrétiens, pour la plupart membres des communautés tribales.
(Avec Ucanews, Bhopal)