Eglises d'Asie

Des prêtres, religieuses et psychologues auprès des victimes du Kerala

Publié le 06/09/2018




Suite aux inondations du 4 au 18 août dans l’État du Kerala, dans le sud du pays, près d’un million de victimes ont dû fuir leurs maisons pour se réfugier dans les camps de secours. À leur retour, beaucoup ont retrouvé leurs biens et leurs économies emportés ou détruits. Sous le choc, certains peuvent développer des troubles de stress post-traumatique, tomber dans la dépression ou même souffrir de tendances suicidaires. Des équipes de psychologues, de prêtres, de religieuses et de laïcs leur rendent visite afin de les soutenir et de les accompagner. Les dégâts au Kerala sont évalués, selon les premières estimations, à 2,82 milliards de dollars, mais ils pourraient s’élever jusqu’à 30 milliards de dollars.

Psychologues et autres conseillers travaillent nuit et jour afin de permettre à près d’un million de victimes de retrouver un semblant de normalité, suite aux inondations qui ont frappé l’État du Kerala dans le sud de l’Inde, les pires que le pays a connues depuis 1924. Ainsi, psychologues, groupes d’Église et ONG tentent d’aider les gens à dépasser les expériences traumatisantes qu’ils ont vécues durant les inondations, grâce à des services d’assistance téléphonique et des visites informelles à domicile. Le besoin d’aides psychologiques est devenu évident suite au suicide d’un homme de 68 ans et à l’arrêt cardiaque d’un autre homme, après qu’ils ont retrouvé leurs maisons détruites de retour des camps de secours. Des milliers de psychologues et de volontaires chrétiens ont rendu visite aux maisons des personnes affectées par les évènements afin de les aider à faire face après les inondations, qui ont frappé la région en août et dont les dégâts sont estimés à 200 milliards de roupies (2,82 milliards de dollars).
Selon les analystes, ces dégâts pourraient même s’élever à près de dix fois cette somme, jusqu’à 30 milliards de dollars, rapporte le quotidien India Today. « Beaucoup de ceux qui nous appellent sont en état de choc. Quelques-uns ont même perdu toute envie de vivre », explique un conseiller qui dirige une assistance téléphonique à l’hôpital Lourdes de l’archidiocèse de Verapoly, dans le district d’Ernakulam. L’angoisse est à son comble, quand beaucoup de gens ont perdu tout espoir en voyant tous leurs biens et toutes leurs économies englouties, reprend le conseiller. Il évoque le cas d’un homme d’âge moyen aux tendances suicidaires qui a été admis à l’hôpital récemment, ajoutant que la plupart des victimes ont été évacuées lors des inondations du 15 au 18 août, laissant beaucoup de zones résidentielles submergées.
« Ils ont dû quitter leurs maisons et tous leurs biens. Les inondations ont tout emporté et ont laissé des tas de boue chez eux », ajoute-t-il. Le psychiatre C. J. John, qui travaille à l’hôpital Medical Trust de Kochi, confie que la réaction classique est la stupeur suivie de la dépression. « C’était plus facile de s’occuper d’eux dans les camps, où ils fonctionnaient bien en petits groupes d’entraide, où ils pouvaient partager leurs souffrances », explique-t-il. « Mais quand ils sont retournés chez eux, ils se sont sentis abandonnés et impuissants, ce qui laisse la porte ouverte à divers désordres psychiques. » Des équipes de religieuses et des groupes d’Église ont commencé à visiter les familles des diocèses les plus affectés comme ceux d’Idukki, Changanacherry et Manathavady. Ils assurent que le simple fait de s’asseoir autour d’une tasse de thé pour écouter le témoignage des victimes peut avoir un effet bénéfique sur elles, car cela leur permet de vider leur sac et de se rappeler qu’elles ne sont pas seules.

« La plupart des victimes se rétablissent en quelques mois »

Roy Abraham Kallivayalil, secrétaire général de l’association World Psychiatric et chef du département de psychiatrie de l’hôpital de Pushpagiri, explique que l’établissement a accueilli plus de deux cents victimes ces deux dernières semaines. Plusieurs personnes ont exprimé l’envie d’en finir parce qu’elles ne voient pas comment elles peuvent s’en sortir financièrement, ajoute-t-il. « Selon l’OMS, 20 à 40 % des personnes qui souffrent des conséquences d’une catastrophe naturelle ou provoquée par l’homme risquent de développer au minimum des formes modérées de détresse psychologique », précise Roy, ajoutant que beaucoup de victimes souffrent de troubles sérieux voire graves. « Quelques-uns risquent de développer des troubles mentaux handicapants. Réagir à temps peut permettre de réduire considérablement le risque que cela arrive », assure-t-il.
Le père Paul Cheruvally, directeur de la branche sociale de l’Église syro-malabare de l’archidiocèse d’Ernakulam-Angamaly, confie qu’il dispose d’une équipe importante de conseillers expérimentés, dont des prêtres, des religieuses et des laïcs, qui rendent visite aux maisons affectées à travers l’archidiocèse. Moyan Roy, qui a été coordinateur de l’OMS pour la réhabilitation psychologique des personnes touchées par le tsunami qui a touché le Kerala en 2004, pense que l’implication de conseillers locaux est la bonne approche. « Ils sont familiers des conditions particulières de la communauté, ce qui les rend bien plus efficaces que des experts extérieurs », assure-t-il. Ils peuvent identifier des cas troubles de stress post-traumatique (TSPT) ou « syndrome du survivant », en relevant une série de symptômes : perte d’appétit, insomnie, vertiges, nervosité ou encore troubles de la concentration. Roy ajoute que selon son expérience, la plupart des victimes de catastrophes ou de traumatismes se rétablissent en quelques mois, à condition de recevoir un accompagnement ou une aide psychiatrie adaptés.

(Avec Ucanews, Kochi)


CRÉDITS

IANS / Ucanews