Eglises d'Asie

Les Philippines réélues au Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU

Publié le 17/10/2018




La décision de réélire les Philippines au Conseil des Droits de l’Homme de l’Assemblée générale des Nations unies, annoncée la semaine dernière, divise les évêques philippins et les ONG militant pour les Droits de l’Homme dans le pays. Le pays a obtenu 165 voix sur 192, ce qui en fait le dernier pays de la région Asie-Pacifique en termes de nombre de votes. Beaucoup critiquent l’ironie et l’hypocrisie de la décision, en rappelant les crimes dont le gouvernement Duterte est accusé dans le cadre de la guerre contre la drogue. Les 47 membres du Conseil ont été élus pour un mandat de trois ans, de 2019 à 2021.

La réélection des Philippines au Conseil des Droits de l’Homme des Nations unies, annoncée la semaine dernière, a provoqué des réactions divisées dans le pays, parmi les évêques catholiques et les organisations militant pour les Droits de l’Homme. Pour un évêque catholique, l’élection est en même temps « très ironique », mais en même temps « stimulante ». Un autre pense que l’élection des Philippines n’est pas méritée à cause des abus dont est accusée l’administration du président Rodrigo Duterte. « Désormais, nous devons démontrer que nous valorisons la vie davantage au-dessus de toute question matérielle », soutient Mgr Ruperto Santos, évêque de Balanga. Ce dernier souligne que les Philippins doivent maintenant se montrer « sérieux et sincères dans la défense des Droits de l’Homme et le respect et la préservation des vies humaines ». L’appartenance au Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, pour l’évêque, doit constituer un défi invitant le pays à s’améliorer et à travailler pour le bien de la population.
Mgr Arturo Bastes, évêque de Sorsogon, estime de son côté que le pays ne mérite pas de siège au Conseil. « Je trouve cela étrange et hypocrite», soutient-il, ajoutant que ceux qui ont voté en faveur du pays ont pris une « mauvaise décision ». Malgré l’opposition de l’ONG Human Rights Watch, les Philippines ont été réélues parmi les 47 membres du Conseil pour un nouveau mandat de trois ans, de 2019 à 2021. Dans un communiqué, le gouvernement philippin a déclaré que la décision était une reconnaissance de sa détermination à protéger les Droits de l’Homme et de sa tolérance zéro envers les abus. Le porte-parole du président Duterte, Salvador Panelo, a vu dans l’élection des Philippines un soutien de la guerre contre la drogue menée par le gouvernement. « La campagne du président contre les drogues illégales, la corruption et la criminalité a finalement été reconnue par la communauté internationale », a-t-il déclaré.

Un « siège » pour pousser le gouvernement à agir

Les Philippines ont reçu 165 votes sur 192, ce qui en fait l’avant-dernier pays en termes de nombre de votes et le dernier pour la région Asie-Pacifique, aux côtés du Bahreïn. La commission philippine des Droits de l’Homme a salué la décision, estimant que cela constituera une pression sur le gouvernement philippin afin de se pencher sur les nombreuses violations des Droits de l’Homme. « La crédibilité des Philippines, en tant que membre du Conseil, repose sur sa capacité à prendre des décisions efficaces pour répondre concrètement à ces accusations », a déclaré la commission dans un communiqué. L’évêque auxiliaire de Manille, Mgr Broderick Pabillo, partage ces sentiments en ajoutant que parce que les Philippines font partie du Conseil, « nous pouvons désormais demander au gouvernement de mieux respecter les Droits de l’Homme ».
L’ONG Karapatan souligne de son côté que la réélection « ne constitue pas une absolution du gouvernement Duterte concernant les violations des droits menées contre les Philippins ». La porte-parole de l’organisation, Cristina Palabay, ajoute que « cela n’efface pas les milliers de vies tuées dans le cadre de la guerre contre la drogue ». Les opposants politiques de Duterte ont par ailleurs déclaré que le fait que les Philippines aient « gagné un siège » au Conseil était à la fois « trompeur et hypocrite ». « Après s’être constamment élevé contre le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU qui avait dénoncé les meurtres, le gouvernement Duterte change brusquement de direction en encensant le Conseil », remarque la sénatrice Risa Hontiveros. Pour elle, c’est « la fausseté à son paroxysme ».

(Avec Ucanews, Manille)