Eglises d'Asie – Indonésie
Archidiocèse de Jakarta : un fonds solidaire pour financer les obsèques des plus démunis
Publié le 24/08/2019
Veronica Dasiyem, une paroissienne de 56 ans de l’église Saint Joseph de Jakarta Est, confie que même quatre ans après la mort de son mari, elle n’oublie pas l’aide qu’elle a reçue pour financer les frais des obsèques. Son mari, Antonius Tommy Ingleton, 79 ans, est mort d’une pneumonie en mai 2015 dans un hôpital près de leur quartier, une zone de bidonvilles de la capitale indonésienne. Trois mois après le décès, une organisation catholique lui est venue en aide en signant un accord de financement, pour un coût de seulement 80 000 roupies (5,09 dollars) par an. « C’est un prix accessible même pour des gens démunis comme moi. Cela m’a permis d’économiser environ deux cents roupies par jour », confie Veronica, mère de trois enfants. Aujourd’hui à la retraite, elle avait l’habitude, autrefois, de se tenir devant l’église le dimanche pour vendre des œufs salés et autres plats de rue, alors que son mari, retraité du secteur privé, ne touchait aucune pension. À la mort de son mari, l’aide financière était salutaire. « J’ai reçu une aide de dix millions de roupies [636 euros] pour les obsèques, ce qui était suffisant pour couvrir les frais », explique-t-elle, ajoutant qu’elle a dépensé l’argent pour pouvoir enterrer son mari dignement. Margaretha Timu a reçu une aide similaire il y a quelques mois, quand son fils de deux ans est mort d’une paralysie cérébrale. « Nous nous étions inscrits en 2017 parce que nous pensions que cela pourrait nous aider », confie la jeune femme de 34 ans, qui vit à Tangerang, dans l’ouest de la capitale.
Bénédiction de Saint Joseph
Veronica Dasiyem et Margaretha Timu font partie des quelque 25 000 catholiques qui se sont inscrits auprès de l’organisation appelée BerKHat Santo Yusup (BKSY), ou Bénédiction de Saint Joseph, qui intervient dans 32 paroisses sur les 66 que compte l’archidiocèse de Jakarta. Lancée par plusieurs anciens élèves du petit séminaire Saint Pierre Canisius de Java Central, l’initiative a été inaugurée en novembre 2013 par Mgr Ignatius Suharyo Hardjoatmodjo, archevêque de Jakarta. Il s’agissait d’une réponse à l’appel de l’archevêque, après sa nomination en 2009, invitant les catholiques à montrer plus de foi et de compassion. À ce jour, le fonds solidaire est venu en aide à plus de trois cents familles. « Nous avons vu que l’archidiocèse avait besoin d’un projet qui suscite la compassion des fidèles », confie Theodorus Wiryawan, un des anciens séminaristes derrière l’initiative. « C’est pourquoi nous avons voulu nous tourner vers les plus faibles, vers les marginalisés et les handicapés. Nous voulons leur permettre de mourir dignement, quelles que soient les circonstances. » Le fonds a également permis de soulager un peu les soucis financiers de ceux qui en ont bénéficié, assure-t-il. L’archevêque de Jakarta salue l’initiative. « Quand quelqu’un montre beaucoup de foi et de compassion, on se pose la question : ‘Qu’est-ce que je peux faire pour rendre mon entourage plus humain ?’ Les initiateurs du programme ont répondu à cette question de façon concrète. »
Graines de compassion
Même si plus de 25 000 personnes sont déjà inscrites, la question de la durabilité du fonds se pose. Selon Franciscus Caratiolo Purwanto, un des administrateurs, près de vingt membres décèdent chaque mois, ce qui met à l’épreuve la capacité du fonds à venir en aide à tous les inscrits. Pour pouvoir faire face, le fonds invite les catholiques plus aisés à se montrer solidaires, notamment en participant à une opération baptisée « café en attente » (Pending Coffee), proposant aux clients de commander un café tout en offrant un ou plusieurs cafés qui pourront être bus plus tard par quelqu’un dans le besoin. « Ce genre d’opération peut susciter des graines de compassion qui peuvent grandir par diverses activités quotidiennes, en commençant par de petites choses », assure Theodorus Wiryawan. Une fois, alors qu’un prêtre jésuite célébrait son anniversaire, celui-ci a demandé à ses amis de faire un don pour le fonds BKSY plutôt que de lui faire des cadeaux. « Nous avons ainsi pu rassembler près de 90 millions de roupies en seulement deux semaines », raconte le prêtre. Dans un avenir proche, le fonds prévoit de se développer pour pouvoir atteindre encore d’autres personnes auprès d’autres paroisses de l’archidiocèse, et ailleurs dans le pays. Environ 3 000 personnes faisant partie de trois paroisses de l’archidiocèse de Java Central ont déjà déposé une demande, explique Theodorus Wiryawan. La compassion est la pierre sur laquelle ce fonds a été construit, confie Heribertus Kasyanto, un autre séminariste à l’origine du projet. « Mgr Suharyo voit le fonds comme quelque chose qui dépasse un simple projet caritatif. Pour lui, cela résume tout ce que nous voulons faire comprendre aux catholiques – c’est-à-dire que nous devons prendre soin des autres. »
(Avec Ucanews, Jakarta)
CRÉDITS
Oc Mit / Ucanews