Eglises d'Asie

Cinq chrétiens nord-coréens arrêtés pour une réunion de prière « illégale » à domicile

Publié le 31/05/2023




Le 30 avril, cinq chrétiens nord-coréens ont été arrêtés après une descente de police, alertée par un informateur anonyme. Ils sont accusés de s’être rassemblés pour un temps de prière illégal à domicile. Selon un résident, les cinq détenus ont refusé de renoncer à leur religion malgré la pression des autorités communistes. La Commission pour la liberté religieuse internationale (USIRF) a classé la Corée du Nord parmi les pays coupables des violations les plus graves de la liberté de religion ou de croyance.

Une affiche de propagande à Gaeseong (dans la province de Hwanghae du Nord, à 7 km de la frontière avec la Corée du Sud).

Cinq chrétiens nord-coréens sont toujours en détention depuis leur arrestation par les autorités communistes. Les détenus sont accusés d’avoir organisé une réunion de prière « clandestine » fin avril, selon une information publiée le 28 mai par Radio Free Asia (RFA). Les cinq personnes, qui appartiennent à la même famille, s’étaient rassemblées chez elles quand les forces de l’ordre sont intervenues après la dénonciation d’un informateur anonyme.

La réunion de prière hebdomadaire avait lieu dans leur ferme familiale, dans le village de Tongam près de la ville de Sunchon, dans la province de Pyongan du Sud (dans le centre-ouest du pays), quand la police les a emmenés. Selon un résident anonyme, les personnes arrêtées n’ont enfreint aucune loi car il ne s’agissait pas d’un événement public ni de propagation ostensible de leur foi.

« Ils priaient et lisaient la Bible ensemble. Ils se sont rassemblés avec leurs proches pour prier, en disant simplement ‘O Jésus, Seigneur Jésus…’. Et ensuite ils ont été arrêtés », raconte-t-il. « Sur le site où ils se sont rassemblés, la police a trouvé plusieurs dizaines de bibles. Tous ceux qui étaient présents ont été arrêtés. » Malgré la pression des autorités, les cinq chrétiens détenus ont refusé de renoncer à leur religion, selon la source. « Un employé du service juridique nous a dit que les croyants ont refusé de leur dire d’où leurs bibles provenaient, et qu’ils ont ajouté ‘Tout pour Jésus, même dans la mort’. »

Les chrétiens nord-coréens « en permanence sous pression »

La Commission pour la liberté religieuse internationale (USIRF), basée aux États-Unis, a classé la Corée du Nord parmi les pays coupables des violations les plus graves de la liberté de religion ou de croyance. Selon RFA, le gouvernement ultra-communiste « continuerait d’exécuter, de torturer, d’arrêter et d’abuser physiquement des individus en raison de leurs activités religieuses ».

De son côté, l’ONG internationale Portes Ouvertes, qui soutient les chrétiens persécutés à travers le monde, estime que la Corée du Nord compte entre 50 000 et 70 000 chrétiens emprisonnés. Selon l’organisation, les chrétiens nord-coréens subissent une persécution « violente et intense » et sont « en permanence sous pression, menacés d’être arrêtés ou tués ».

Un autre résident anonyme a également raconté que le village de Tongam comptait autrefois une grande église, même avant l’occupation japonaise de la péninsule coréenne et l’arrivée de la religion Shinto en 1905. « L’église était au pied de la montagne. Je le sais parce que ma mère m’a dit qu’elle se trouvait là où étaient les missionnaires avant la libération [du régime colonial japonais en 1945] », a-t-il expliqué.

Le village a été attaqué à deux reprises par les forces de l’ordre en 1997 et 2005 et les croyants ont été envoyés dans des camps de travail. Avant la fin du régime colonial japonais, la ville de Sunchon comptait deux catholiques et 31 protestants. Au cours des dernières décennies, la plupart des croyants ont disparu à cause des raids de l’État.

1 411 cas de persécution religieuse signalés par l’ONG sud-coréenne NKDB

La Corée était une nation unie durant la période de règne de la dynastie Joseon (1392-1887) puis sous l’occupation japonaise. Le christianisme a commencé à se répandre et à se développer aux XVIII et XIXe siècles malgré les persécutions. Puis le régime colonial japonais a pris fin en 1945, après la Deuxième Guerre mondiale, et la Corée a été séparée en deux.

Le Sud est devenu la République de Corée et s’est associé avec les Occidentaux, tandis qu’un régime communiste a pris le pouvoir au Nord sous l’influence soviétique. Des désaccords sur l’unification ont ensuite conduit à la Guerre de Corée (1950-1953), quand les forces communistes du Nord ont envahi le Sud, causant près de 4 millions de morts et 10 millions de déplacés.

Les autorités communistes ont ensuite lancé une répression brutale contre les chrétiens en les accusant de collaborer avec les puissances occidentales, en particulier avec les États-Unis. Les églises ont été détruites et les chrétiens ont été torturés et tués, forçant de nombreux chrétiens à fuir vers le Sud.

Dans un rapport l’USCIRF souligne qu’en Corée du Nord, toute personne « surprise à pratiquer la religion ou même suspectée de défendre des positions religieuses en privé est exposée à des punitions sévères, y compris la torture, l’emprisonnement et l’exécution ». En octobre 2020, un livre blanc (« white paper ») de l’organisation NKDB (Database Center for North Korean Human Rights) – une ONG sud-coréenne qui surveille les violations des droits de l’homme en Corée du Nord – a signalé 1 411 cas de persécution religieuse dont 126 personnes tuées et 94 disparitions.

Le rapport de l’ONG s’est basé sur des témoignages de transfuges nord-coréens entre 2007 et juillet 2020, ainsi que sur d’autres sources. Malgré une répression stricte des religions, les chrétiens continuent de pratiquer leur foi discrètement selon différents rapports. Des bibles et d’autres contenus religieux sont passés illégalement dans le pays à travers la frontière chinoise puis distribués via un réseau clandestin créé par des croyants.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

John Pavelka (CC BY 2.0)