Eglises d'Asie – Divers Horizons
Conférence de carême : le cardinal Tagle soutient le rôle des familles pour la transmission de la foi
Publié le 13/03/2021
Le cardinal Luis Antonio Tagle, préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, a partagé son inquiétude à propos des populistes qui exploitent la religion pour servir leurs intérêts, en semant la division et en se servant de la colère de ceux qui se sentent exclus. Le 9 mars par vidéoconférence, depuis Rome, le cardinal Tagle a donné une conférence annuelle de carême retransmise au Saint Patrick’s College de Maynooth, à 25 km de Dublin, sur le thème « protéger la famille humaine et notre maison commune » – le collège Saint-Patrick de Maynooth, le séminaire national d’Irlande, a le statut d’université pontificale. « Notre monde, aujourd’hui, est de plus en plus divisé, et malheureusement, la religion est utilisée afin d’accentuer encore davantage ces divisions ; parfois, on retrouve aussi ces divisions entre les fidèles d’une même affiliation religieuse », a déploré le cardinal philippin. Il a également mis en garde contre le nombre grandissant de dirigeants populistes, dont certains « détournent la religion » à leurs fins. Selon lui, ces dirigeants savent qui sont les groupes en colère, et ils se présentent devant eux comme des messies en utilisant la religion afin de s’attirer des partisans.
« Tout est lié »
Le cardinal Tagle, qui est également président de Caritas Internationalis, a aussi cité l’encyclique Fratelli Tutti du pape François, dont plusieurs passages évoquent la question des dirigeants populistes qui affirment vouloir défendre le peuple, alors qu’ils ne défendent qu’un groupe et des intérêts particuliers. « Il nous faut comprendre pourquoi ces gens s’attirent autant de partisans ; pourquoi deviennent-ils si populaires ? » Le cardinal philippin a ajouté que la pandémie risque d’aggraver les sentiments d’exclusion, éprouvés par exemple par les plus pauvres ou par les migrants. « J’espère que face à cette crise sanitaire, nous aurons appris que nous sommes tous connectés les uns aux autres, que nous sommes dépendants de la Terre et que ce qui se passe dans une partie du monde a des conséquences universelles. J’espère que nous saurons devenir plus responsables les uns envers les autres. »
Appel à une plus grande créativité pastorale
Le cardinal Tagle, proche collaborateur du pape François, a également souligné que même si la pandémie a pu affecter la pratique de la foi, elle peut aussi entraîner « une plus grande créativité pastorale, en particulier au sein des familles ». Interrogé par Catholic News Service, le préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples a reconnu que cette période avait entraîné « beaucoup de souffrances ». « Pour nous, au sein de l’Église, une partie de cette souffrance vient du fait que même si nous voulons apporter une aide pastorale et un accompagnement spirituel, nous sommes dans l’incapacité de le faire comme nous le voudrions. » Toutefois, dans ce contexte, le cardinal philippin se dit inspiré par les « chrétiens cachés » japonais, en évoquant ces chrétiens qui ont gardé leur foi vivante de façon cachée durant plus de deux cents ans. Le cardinal Tagle a rappelé l’interdiction du christianisme au XVIIe siècle au Japon, et la réouverture du pays au christianisme deux cents ans plus tard. Quand les missionnaires français sont arrivés à Nagasaki au XIXe siècle, ils ont été surpris de découvrir des chrétiens qui avaient survécu à toutes ces années, sans structures ecclésiales officielles. « Au milieu des restrictions, ce sont les familles, les laïcs, et en particulier les mères et les grands-mères, qui ont transmis la foi. Ils ont été créatifs. »
« La mission ne s’arrête pas »
Ainsi, le cardinal philippin a souligné que cette crise peut être une occasion d’identifier les aspects de la vie chrétienne et de la vie d’Église auxquels « nous n’avons pas suffisamment prêté attention », et notamment « le rôle de la famille dans la transmission de la foi, et la formation des familles à la doctrine sociale de l’Église ». « Autrefois, la transmission de la foi, l’apprentissage des prières et du catéchisme se faisait à la maison. C’étaient les parents ou les grands-parents qui s’en chargeaient », a-t-il poursuivi, en ajoutant qu’avec la formation de ministères spécialisés comme les catéchistes et l’éducation religieuse, cette pratique a décliné. « Avec les confinements, les enfants n’ont pas pu aller à l’école du dimanche, et les catéchistes et les enseignants n’ont pas pu faire leur travail comme d’habitude. Les parents sont-ils équipés aujourd’hui pour former leurs familles, leurs enfants et leurs petits-enfants, et pour se former eux-mêmes sur la foi et la mission ? », a-t-il insisté. « Je pense que la pandémie nous a ouvert des possibilités, et elle a aussi servi de miroir en nous montrant nos faiblesses en termes de formation chrétienne. Cette crise a poussé de nombreuses paroisses et de nombreux diocèses à réévaluer la façon de mener la mission et l’engagement pastoral. Même ici au Vatican, nous sommes invités à réfléchir aux réponses les mieux adaptées face à la situation actuelle », a-t-il conclu. « La mission ne s’arrête pas. La question est de savoir comment procéder, dans un contexte qui a changé. »
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Angie de Silva / Ucanews