Eglises d'Asie – Inde
Déconfinement : les travailleurs migrants indiens, inquiets et démunis, hésitent à retourner dans les villes
Publié le 11/06/2020
Selon une étude menée durant la pandémie par Caritas Inde, la branche sociale de la Conférence épiscopale indienne (CBCI), les travailleurs migrants qui sont retournés dans leurs villages refuseraient de retourner dans les villes dans un avenir proche. Les conclusions de l’étude ont été présentées le 6 juin lors d’une réunion rassemblant entre autres le président de la CBCI, le cardinal Oswald Gracias, les présidents régionaux de la CBCI et la direction de Caritas Inde. La rencontre a été organisée par vidéoconférence alors que le pays est toujours partiellement confiné. L’étude en question s’est concentrée sur les conséquences de la pandémie sur les travailleurs migrants et sur les petits agriculteurs. « Il nous faut absolument documenter notre travail pour que les autres pays, conférences et institutions nous connaissent. Même si les catholiques sont une minorité ici, nous pouvons vraiment aider les personnes dans le besoin », a déclaré le cardinal Gracias, archevêque de Mumbai. L’étude de Caritas Inde a été menée dans 18 États, dont les dix les plus marqués par l’épidémie – les États de l’Uttar Pradesh, du Bihar, du Jharkhand, de l’Odisha, du Madhya Pradesh, du Telangana, du Chhattisgarh, du Bengale occidental, du Maharashtra et de l’Assam. Une première enquête s’est intéressée aux besoins vitaux, aux ressources, aux droits, aux discriminations et à l’exploitation des travailleurs migrants.
9,4 % des petits agriculteurs n’ont reçu aucune aide
Les résultats ont constaté que 28,7 % d’entre eux refusent de retourner dans les villes ; 32,1 % l’envisagent à condition que la situation s’améliore, et 31,3 % sont indécis. Selon l’étude, leurs enfants ont été fortement affectés par la fermeture des écoles : 46,4 % d’entre eux ont arrêté leurs études. Près de 95,2 % des travailleurs migrants internes interrogés ont perdu leur travail et leur salaire, et 10,6 % d’entre eux ont également perdu des membres de leur famille. Concernant les petits agriculteurs, l’étude a interrogé 424 fermiers originaires de 18 États via 45 partenaires diocésains. L’enquête s’est concentrée sur les conséquences de la crise sanitaire sur la production et la distribution agricole, sur la quantité de nourriture et de nutrition disponible, ainsi que sur les revenus et sur les dépenses générées. Elle a conclu que 80,4 % des fermiers ont subi des pertes. Ces derniers ont également fait part de leur profonde inquiétude à propos des prochaines récoltes, alors que la dernière saison avait déjà provoqué des pertes financières. L’étude a constaté que seuls 55,4 % des fermiers interrogés ont reçu un soutien, que ce soit de la part du gouvernement ou d’ONG, tandis que 9,4 % d’entre eux n’ont reçu aucune aide. La sécurité alimentaire est également gravement menacée, alors que 49 % des foyers interrogés ont des ressources alimentaires limitées ; 16,5 % des répondants ont confié avoir sauté des repas au cours des dix derniers jours.
Mgr Sebastian Kallupura, archevêque coadjuteur de Patna et président de Caritas Inde, a conseillé de mettre en lien les administrations locales avec les bureaux de la CBCI afin d’établir une stratégie commune et soutenir au mieux les travailleurs migrants. « Nous avons également besoin de travailler avec le département de la CBCI sur les projets environnementaux afin de prendre soin de notre maison commune et suivre les recommandations de Laudato Si », a confié Mgr Kallupura, qui a également proposé d’organiser des campagnes de sensibilisation massives auprès des migrants, aux côtés de la Commission de la CBCI pour la santé. En appelant à documenter les expériences locales et les témoignages de foi, le père Paul Moonjely, directeur de Caritas Inde, a souligné qu’il est « important de partager le message que l’Église catholique est toujours au service du peuple en étant portée par sa foi ». Le père Jolly Puthenpura, directeur adjoint de Caritas Inde, a également informé les autorités à propos du soutien accru aux plus vulnérables en termes de cuisines communautaires, de kits alimentaires et d’hygiène, d’équipements de protection personnelle, de logement et d’aide psychologique et sociale.
(Avec Ucanews, New Delhi)
CRÉDITS
Bijay Kumar Minj / Ucanews