Eglises d'Asie – Corée du Nord
Des éleveurs nord-coréens en colère face à la pénurie alimentaire
Publié le 12/01/2023
Des fermiers nord-coréens, interrogés le 7 janvier par le service coréen de Radio Free Asia (RFA), ont fait part de leur déception alors que le gouvernement de Pyongyang, face à une grave pénurie alimentaire, a réduit de moitié leurs rations annuelles tandis que celles réservées au bétail restent inchangées. Les fermiers ont rappelé qu’ils ne survivaient que grâce aux céréales fournies par le régime, qui les aident à supporter les pénuries.
« À cause des mauvaises récoltes de cette année, les éleveurs qui ont travaillé 365 jours n’ont reçu que l’équivalent de 200 jours de céréales », a confié l’un d’entre eux, anonyme. Contrairement aux autres fermiers, les éleveurs travaillant sur les fermes collectives et qui s’occupent des bêtes ont reçu 100 kg supplémentaires pour 100 jours de travail, en plus de ce qu’ils reçoivent pour eux-mêmes.
« Les fermiers se plaignent que les bœufs sont mieux traités »
Le comté de Kimjongsuk, dans la province nord-coréenne de Ryanggang, le long de la rivière Yalu, compte environ quatre à six groupes de fermes collectives pour un total de 300 à 400 fermiers, qui élèvent chacun entre trois et six bœufs destinés à être employés comme bêtes de trait (utilisées pour l’agriculture). Le traitement préférentiel réservé au bétail provoque la colère de nombreux éleveurs qui s’efforcent de s’en sortir malgré les baisses de rendements de la production céréalière.
« Cent kilogrammes de grains et de tiges de maïs ont été fournis pour le bétail dans les fermes collectives », précise un fonctionnaire anonyme de la province de Pyongan du Sud. « Par conséquent, les fermiers se plaignent que les bœufs sont mieux traités que les hommes et qu’ils sont plus importants que le peuple aux yeux du gouvernement », ajoute-t-il.
Toutefois, d’ici l’an prochain, les éleveurs doivent toujours payer pour la nourriture des bêtes, en plus des médicaments et des ferrures pour les sabots, ce qui les force à travailler comme porteurs dans les gares et les marchés pour améliorer leurs revenus.
Une production en baisse de 180 000 tonnes cette année
Les problèmes rencontrés par la population dépassent toutefois celui des rations alimentaires. Les températures auraient notamment chuté sous zéro, et des habitants seraient morts de faim ou de froid. Par ailleurs, des enfants mendiants, appelés kotebji, ont perdu la vie dans la rue, et des employés ont perdu leur travail et tentent de chasser ou de pêcher dans des régions reculées faute de moyens pour s’acheter à manger.
Durant les années 1990, les autorités nord-coréennes avaient cessé de fournir des rations alimentaires pour les bœufs dans les fermes collectives, à cause de la crise économique. « Le fait que des grains et des tiges de maïs soient fournis au bétail pour la première fois [depuis les années 1990] semble destiné à augmenter la production agricole en mobilisant toutes les bêtes pour l’agriculture », estime un fonctionnaire anonyme. « Mais il reste à voir si cela suffira pour améliorer les rendements », ajoute-t-il.
En décembre, les autorités nord-coréennes ont forcé les citoyens à donner du « riz patriotique » à l’État malgré une grave pénurie alimentaire, ce qui aurait provoqué le mécontentement de la population. La plupart des citoyens ont reçu l’ordre de donner 5 kg, les fermiers entre 10 et 15 kg et les étudiants et les personnes âgées entre 2 et 7 kg.
Le pays a subi des maigres récoltes en raison de faibles températures et d’un manque d’ensoleillement en juillet (une période cruciale pour la production rizicole selon l’Administration sud-coréenne du développement rural). L’agence estime que cette année, la production céréalière en Corée du Nord a atteint environ 4,51 millions de tonnes, soit une baisse de près de 180 000 tonnes.
(Avec Ucanews)