Eglises d'Asie

Des groupes catholiques philippins appellent à préserver la Sierra Madre

Publié le 28/09/2022




Menacée par un projet de barrage hydroélectrique, la plus longue chaîne de montagnes du pays a protégé l’intérieur des terres des inondations et des glissements de terrain provoqués par le super typhon Noru. Plusieurs groupes catholiques demandent des mesures en faveur de sa protection.

La chaîne de la Sierra Madre, dans le nord-est de l’île de Luçon.

Plusieurs groupes catholiques philippins ont observé, lundi 26 septembre, une journée annuelle de mobilisation pour sensibiliser l’opinion publique à la nécessité de protéger la plus longue chaîne de montagne du pays, la Sierra Madre.

Ces groupes catholiques de protection de la nature s’opposent à l’exploitation forestière et minière illégale, à la conversion des forêts en terres agricoles et à la construction du barrage controversé de Kaliwa dans la chaîne de montagnes.

Le barrage de Kaliwa, un projet de 244 millions de dollars américains, « aurait des répercussions négatives sur plus de 1 500 foyers, y compris des peuples autochtones installés sur les terres de leurs ancêtres dans les montagnes de la Sierra Madre », déclare Kristine Villaluz, secrétaire exécutive du Mouvement Catholique pour un Environnement plus Vert (Catholic Movement for a Greener Environment). Elle insiste sur le rôle protecteur joué par la montagne, qui a sauvé plusieurs provinces, dont la capitale Manille, des inondations et des glissements de terrain causés par le super typhon Noru, et réitère la ferme opposition de son groupe à la construction du barrage. La zone montagneuse abrite également des centaines d’espèces endémiques protégées.

Selon les écologistes, la Sierra Madre, qui s’étend sur 540 kilomètres de la province de Cagayan à celle de Quezon, du Nord au Sud du pays, agit comme un bouclier naturel contre les typhons venant de l’océan Pacifique.

Le projet de barrage a été désigné comme prioritaire par l’ancien président Rodrigo Duterte, pour résoudre le problème d’approvisionnement en eau des habitants de la capitale, Manille. Signé en 2018, le projet de construction inclut un prêt contracté auprès de banques chinoises et rencontre une forte opposition au sein de la société civile.

En février 2020, un groupe d’évêques catholiques s’est publiquement opposé au barrage en affirmant qu’il servait uniquement les intérêts des « grandes entreprises et des investisseurs chinois ».

Un autre groupe catholique de protection de l’environnement, Laudato Si, a également appelé à la protection de la Sierra Madre. Selon son porte-parole, Jovert Gomez : « La Sierra Madre constitue la colonne vertébrale de la côte orientale de Luçon. Elle nous protège des catastrophes naturelles, nous devons la remercier. »

Selon un prêtre du diocèse de Legazpi, le père Nicanor Diesta, dans la région de Bicol, au sud de Luçon, « les groupes privés devraient inclure les montagnes de la Sierra Madre dans leur programme de Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) ». Les programmes de responsabilité sociale incitent les entreprises à effectuer des actions en faveur de l’environnement, en échange de réduction d’impôts.

« Ici, dans notre diocèse, les mers et les océans sont inclus dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises, qui s’engagent à nettoyer nos eaux ou la plage au moins deux fois par an. Nous devrions faire la même chose pour la Sierra Madre, nettoyer ses routes, y planter des arbres et nous opposer à tout programme qui la menace », plaide-t-il.

La journée du 26 septembre a été déclarée Journée nationale de la Sierra Madre sous le mandat du défunt président philippin Benigno Aquino III, afin de souligner la nécessité de sauver la chaîne montagneuse, et en particulier ses arbres. Selon Kristine Vilaluz, le décret présidentiel a pour but « d’inciter les citoyens à contribuer à la préservation de la plus longue chaîne de montagne de notre pays ».

Selon le météorologue Ariel Rojas, la chaîne de montagnes contribue à affaiblir les vents, évitant ainsi des dégâts plus importants à l’intérieur du territoire, dans les provinces où le cyclone a touché terre. « Comme il y a une friction avec la surface, la circulation du vent est perturbée. Les pluies ont également été réduites et l’eau a été absorbée par le sol grâce aux arbres. Ainsi, moins il y a d’arbres dans la montagne, moins la Sierra Madre peut nous protéger, notamment à Manille » explique-t-il.

Les Philippines sont l’un des pays au monde les plus touchés par les typhons et cyclones. Le supertyphon Noru a fait au moins six morts ces derniers jours, dans la province de Luçon, au Nord du pays.

(Avec Ucanews)