Eglises d'Asie

Des religieuses catholiques vietnamiennes apportent un soutien aux personnes atteintes de maladies mentales

Publié le 02/05/2023




Le traitement des troubles psychiatriques est peu développé dans le pays et beaucoup de malades sont encore enchaînées à leur domicile ou abandonnées par leurs proches.

Sœur Rose Ngo Thi Kim Thanh, de la congrégation des Sœurs de Saint Paul de Chartres, et un bénévole visitent un patient à l’hôpital psychiatrique de Hué le 22 avril 2023.

Le Van Hoat nettoie sa maison et fait sa lessive tous les jours : des tâches apparemment simples, qu’il n’a pourtant pas été capable d’accomplir pendant de nombreuses années. Vêtu d’un vieux tee-shirt et d’un short, le visage pensif, ce célibataire de 50 ans originaire de Hue, capitale de la province de Thua Thien Hue, dans le centre-sud du Viêt Nam, avait auparavant peu d’occasion de parler, si ce n’est pour dire “merci” aux personnes qui lui rendaient visite et lui offraient de la nourriture.

Hoat, dont les parents sont décédés il y a plusieurs années et qui n’a pas de frères et sœurs, souffre de troubles mentaux depuis plus de vingt ans.

Sœur Mary Le Thi Thu Huong, assistante sociale des Filles de Notre-Dame de la Visitation, se souvient de l’avoir rencontré en décembre 2022 alors qu’elle offrait, avec quelques bénévoles laïcs, des cadeaux de Noël aux communautés locales.

Hoat s’est incliné devant eux, les mains croisées, et leur a demandé des cigarettes. Huong et deux autres religieuses de sa congrégation ont entamé la conversation puis ont commencé à lui rendre visite régulièrement. Elles ont même aidé à rétablir l’alimentation électrique de sa maison.

“Nous essayons de faire quelque chose d’utile pour sa santé physique et mentale, comme de lui parler tous les jours, lui donner de la nourriture, des médicaments et des vêtements, et lui apprendre à faire le ménage”, explique Huong. La religieuse se dit heureuse que Hoat retrouve peu à peu un comportement normal et qu’il ait réappris des tâches simples comme le nettoyage et la lessive.

« Ma santé s’améliore progressivement grâce aux religieuses qui s’occupent de moi », déclare Hoat, qui retrouve le chemin de l’intégration sociale. Auparavant, l’homme était mis à l’écart par ses voisins qui l’évitaient « de peur d’être attaqués », mais aujourd’hui, suivant l’exemple des religieuses, leur attitude a changé. Ils traitent Hoat comme un membre à part entière de la communauté et lui apportent leur aide lorsque c’est nécessaire.

Selon ses proches, Hoat a été diagnostiqué comme souffrant d’un problème mental en 2003, après avoir subi un grave traumatisme cérébral lors d’un accident de la route. Dans l’impossibilité de payer les soins médicaux, il a été livré à lui-même.

Hoat avait jusqu’alors l’habitude de pêcher des poissons dans la rivière pour gagner sa vie. Après l’accident, « il a commencé à errer sans but dans les rues et à manger des restes dans les bistrots locaux. » explique un proche. « Il dormait sur le marché et, dès qu’il avait une crise, il criait sur les gens et déchirait ses vêtements. Par conséquent, personne n’osait s’approcher de lui. »

En 2022, la province de Thua Thien Hue a enregistré 4 895 cas de schizophrénie, d’épilepsie et de dépression. Seulement 450 patients étaient hébergés dans des centres pour sans-abri.

Le ministère de la santé a indiqué l’année dernière que les cas de troubles mentaux étaient en augmentation et que le pays comptait près de 15 millions de patients, soit 15 % de sa population. La maladie mentale peut surgir après avoir perdu un être cher, à la suite d’une lésion cérébrale ou pour des raisons génétiques. Beaucoup de malades sont abandonnés par leur famille et errent seuls dans les rues.

La congrégation de sœur Huong verse des allocations d’un million de dongs (42 dollars) par mois à 17 patients psychiatriques, dont Hoat, afin d’éviter qu’ils ne souffrent de faim et de sous-nutrition.

“Nous encourageons également leurs proches à passer du temps avec eux, à les écouter, à les réconforter, car ils ne seront guéris que s’ils reçoivent de l’affection de la part des membres de leur famille”, rappelle la religieuse.

Selon la sœur Marie Truong Thao, de l’association catholique Caritas, les travailleurs de Caritas aident chaque mois 50 patients atteints de maladies mentales dans la province de Thua Thien Hue. Beaucoup d’entre eux sont d’anciens prisonniers ou toxicomanes.

Dans le cas des femmes, nombreuses sont celles qui ont subi des violences domestiques. Beaucoup d’entre elles vivent seules et « celles qui vivent avec des parents ont parfois les jambes enchaînées à l’intérieur des maisons, par crainte des potentiels dommages physiques qu’elles pourrait causer à elles-mêmes et aux autres » selon la sœur Thao. La religieuse s’occupe notamment depuis plusieurs mois d’une jeune femme de 24 ans confinée pendant des années dans une pièces minuscule par ses parents, qui la croyaient « possédée par un démon. »

A Hue, Hoat fait des progrès remarquables et discute désormais régulièrement avec les religieuses et les autres personnes qui lui rendent visite, en les appelant par leur nom. Ce quinquagénaire, qui n’est pas de confession catholique, exprime sa gratitude aux religieuses. “J’espère que le pire est passé et que je pourrai bientôt me remettre à gagner ma vie”, dit-il en sirotant un thé devant sa modeste maison.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Ucanews