Eglises d'Asie

En Inde, les plus pauvres confrontés aux changements climatiques

Publié le 13/07/2021




En Inde, la température moyenne a grimpé de 0,7 °C entre le début du XXe siècle et 2018. Elle devrait encore augmenter de 4,4 degrés d’ici 2100, selon un rapport récent du gouvernement. Face à cette situation, seuls quelques habitants ont la climatisation ; la plupart utilisent des ventilateurs bon marché, avec des volets épais pour se protéger du soleil. « Ce sont les pauvres comme nous qui sont les plus touchés », explique Kuldeep Kaur, un habitant de la ville de Sri Ganganagar (État du Rajasthan), située au nord du pays dans le désert de Thar.

La chaleur est difficile à supporter dans la ville de Sri Ganganagar, située dans l’État indien du Rajasthan, près de la frontière pakistanaise et dans le désert de Thar, dans le nord du pays. Une réalité qui risque de menacer plusieurs millions d’Indiens au cours des prochaines décennies, confrontés aux changements climatiques. Tandis que certains habitants des pays les plus riches peuvent trouver du répit avec l’air conditionné et autres conforts modernes, beaucoup d’habitants de Sri Ganganagar – ou ailleurs en Inde – n’ont pas même l’eau courante. C’est là que sont régulièrement enregistrées les chaleurs les plus extrêmes du pays (autour de 50 °C). C’est pourquoi les quelque deux millions d’habitants du district de Sri Ganganagar – équivalent à la population de la Slovénie – se lèvent toujours très tôt durant les longs mois d’été. En fin de matinée, le soleil est déjà brûlant et la température est de près de 42 °C – à cette heure-là, tous se sont déjà retirés chez eux jusqu’au soir. « À midi, seuls ceux qui n’ont pas le choix sont dehors. Nous nous abritons ici », confie Dinesh Kumar Shah, un marchand de fruits, en montrant un grand parasol noir.

« Ce sont les pauvres comme nous qui sont les plus touchés »

Seuls quelques habitants chanceux ont la climatisation ; la plupart des habitants utilisent des ventilateurs ou des climatiseurs bon marché – entre les coupures de courant –, avec d’épais volets verts appelés « tarpals » pour se protéger du soleil. « Ce sont les pauvres comme nous qui sont les plus touchés », explique Kuldeep Kaur, un habitant. « Les ventilateurs plafonniers qui sont dans nos maisons ne font que brasser l’air chaud. C’est particulièrement difficile pour les jeunes enfants qui sont à la maison durant l’été. Mais je pense qu’il n’y a pas grand-chose que les citoyens ordinaires peuvent faire. Nous devons juste le supporter », ajoute-t-il. Le long des canaux d’irrigation qui traversent la ville, on voit beaucoup d’habitants qui profitent de l’eau boueuse pour se rafraîchir. Cela leur permet d’arroser leurs plantations et de se baigner. « C’est bien mieux que n’importe quel ventilateur », confie Arjun Sarsar, 16 ans, qui a déjà passé quatre heures à se détendre au canal avec ses amis.

En Inde, la température moyenne a grimpé d’environ 0,7 degré Celsius entre le début du XXe siècle et 2018. Elle devrait encore augmenter de 4,4 degrés d’ici 2100 selon un rapport récent du gouvernement. L’étude estime également que la fréquence des canicules sera trois à quatre fois supérieure par rapport à la période 1976-2005, et que les vagues de chaleur seront deux fois plus longues. Selon un rapport préliminaire du Conseil consultatif scientifique de l’ONU sur le climat (publié le mois dernier), d’ici 2080, plusieurs centaines de millions de personnes risquent d’être affectées par au moins 30 journées de canicules par an, même si le monde respecte les Accords de Paris sur le climat (limitant le réchauffement de la planète à un niveau nettement inférieur à 2 °C). Les fortes canicules peuvent être mortellement dangereuses, en particulier si elles sont combinées à des forts taux d’humidité. « Ce sont deux facteurs qui augmentent en Inde et dans le monde entier », souligne Roxy Mathew Koll, climatologue à l’Institut indien de météorologie tropicale.

« Les gens arrivent à vivre avec »

Les villes indiennes appliquent des « plans d’action chaleur », comme des plantations d’arbres et des revêtements de toits réfléchissants – même si ces initiatives ne remplacent un programme mondial destiné à réduire les émissions. À Sri Ganganagar, les habitants tentent de se rafraîchir en buvant du jus de canne mélangé avec des feuilles de menthe et du citron, servi dans des gobelets en plastique par Mathura Choudhary pour 10 roupies (11 centimes d’euro). « C’est la meilleure période de l’année pour les ventes », explique ce dernier, depuis son étal au bord de la route. « Qui ne voudrait pas d’un verre ou deux de cela durant l’été ? C’est froid, frais et sucré », assure-t-il. De son côté, Sitaram Sevta remplit des bidons d’eau que son entreprise distribue aux maisons qui n’ont pas l’eau courante. Il explique que les habitants sont habitués à la chaleur estivale. « Les gens arrivent à vivre avec. Et ce n’est trop chaud pour l’instant. Ce n’est pas encore un vrai été comme on peut en vivre ici… La température n’est encore que de 41 ou 42 degrés », ajoute-t-il.

(Avec Ucanews)

Crédit P. Casier (CGIAR) / CC BY-NC-SA 2.0