Eglises d'Asie

Entrée en vigueur de l’accord commercial UE-Singapour : une protection potentielle pour les droits de l’homme

Publié le 30/11/2019




L’accord de libre-échange (FTA) Union européenne-Singapour est entré en vigueur le 21 novembre. Ce nouveau traité commercial, le premier à être conclu entre l’UE et un pays membre de l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-Est), supprime tous les droits de douane qui étaient toujours en vigueur entre les deux parties. Selon les autorités singapouriennes, cet accord renforce le partenariat économique entre la Cité-État et l’Union européenne. Mais outre son importance commerciale évidente, l’accord comporte aussi des réglementations sur le commerce et le développement durable, pour la protection des droits des travailleurs et de l’environnement.

L’accord de libre-échange UE-Singapour, qui avait été signé à Bruxelles entre les deux parties en octobre 2018, est entré en vigueur le 21 novembre. Ce nouveau traité est le premier accord commercial entre l’UE et un pays de l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-Est). Pour la République de Singapour comme pour l’UE, l’accord devrait renforcer le partenariat économique entre les deux parties, avec la réduction des obstacles tarifaires et non tarifaires. Singapour est d’ailleurs, de loin, le partenaire commercial principal de l’Union européenne en Asie du Sud-Est, et l’UE est le troisième partenaire commercial de la Cité-État. Le volume total des échanges de biens entre l’UE et Singapour s’élevait à 53,2 milliards d’euros en 2017 ; le volume des échanges de services entre les deux parties était de 51,1 milliards d’euros pour la même période. L’UE est également le premier investisseur étranger à Singapour, avec un stock d’IDE (investissement direct à l’étranger) de 227 milliards d’euros, devant la Chine et les États-Unis.

Droits de l’homme, droits des travailleurs et environnement

Outre l’importance commerciale évidente de l’accord pour l’UE comme pour Singapour, l’accord comporte aussi une dimension humanitaire, alors que la Cité-État est régulièrement critiquée sur la question des droits de l’homme. Cecilia Malmstrom, commissaire européenne au commerce, a déclaré que l’accord comprenait « des clauses pour la protection des droits de l’homme et des travailleurs et pour la protection de l’environnement ». Ces clauses sont adoptées dans le cadre des Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies, adoptés en 2015 et définis comme à atteindre pour 2030. La clause sur les droits de l’homme permet la suspension unilatérale de l’accord de libre-échange par chacune des deux parties, en cas d’atteintes graves par l’autre pays signataire. Sous cette disposition, l’UE et Singapour s’engagent à respecter les droits de l’homme tels qu’ils sont garantis par le droit international. Singapour pourrait voir cette clause comme une forme d’ingérence potentielle dans ses affaires internes. De nombreux ONG et organisations internationales ont condamné à de nombreuses reprises les autorités singapouriennes, accusées de limiter la liberté d’expression et de réunion, de détentions prolongées sans procès, ou encore de permettre l’exploitation des travailleurs étrangers – des accusations niées par le gouvernement de la Cité-État.

En juin dernier, l’UE a également conclu un accord de libre-échange avec le Vietnam, où les libertés politiques et religieuses restent limitées. L’accord de libre-échange Vietnam-UE comporte pourtant, lui aussi, une clause sur les droits de l’homme. Selon l’UE, les accords commerciaux conclus avec le Vietnam et avec Singapour devraient contribuer à l’aboutissement d’accords commerciaux et d’investissements plus élargis avec l’ensemble des pays de l’Asean. L’UE est le premier commercial de l’Asean après la Chine, avec 237 milliards d’euros d’échanges de biens en 2017. Pour l’UE, l’avantage d’un accès facilité au marché commun européen a un prix : accepter les normes européennes sur un ensemble de questions qui touchent les relations commerciales comme les droits des travailleurs, la sécurité sociale et la protection de l’environnement. En octobre 2018, quand la Commission européenne a adopté le texte final de l’accord, Cecilia Malmström avait affirmé que l’UE contribuait ainsi à soutenir les normes européennes à l’international et à créer la possibilité d’approfondir les questions des droits de l’homme et de la protection des citoyens des pays partenaires. Le problème étant qu’à ce jour, l’UE n’a jamais activé la clause sur les droits de l’homme supposant la suspension des accords commerciaux, s’attirant ainsi les critiques des défenseurs des droits de l’homme.

(Avec Asianews, Singapour)

Crédit : William Cho / CC BY-SA 2.0