Eglises d'Asie

« Food heroes » : le sorgho contre la sècheresse dans l’île de Flores

Publié le 08/02/2019




Au village de Kimakamak, sur l’île de Flores, le diocèse de Larantuka incite depuis plusieurs années les paysans à cultiver le sorgho, une plante à grande valeur énergétique qui peut être une alternative efficace au maïs en période de sècheresse et sur des terres arides. Ainsi, Yustina Jari et son mari, agriculteurs à Kimakamak, participent au projet afin de tenter de combattre la malnutrition et les retards de croissance dans la région. Yustina a fait partie des huit femmes indonésiennes qui ont reçu le prix « Food heroes » en 2018 pour leur travail.

Dans une région frappée par la sécheresse de son île natale de Flores, Yustina Jari a mis plusieurs années avant de découvrir les atouts de la culture du sorgho pour soutenir l’économie locale et combattre la malnutrition des enfants. Elle s’est enthousiasmée pour les avantages de la plante en 2016 grâce à Oxfam Indonésie et la Fondation pour la recherche et le développement social, une organisation catholique locale, quand les ONG ont présenté le sorgho comme l’une des meilleures graines pour cette région aride. Tout a commencé il y a deux ans quand le diocèse de Larantuka, où se trouve Kimakamak, le village de Yustina, a commencé à encourager les catholiques à essayer de planter du sorgho. « On nous a dit que c’était parfait pour cet environnement et ce climat. La forte valeur énergétique du sorgho peut permettre de combattre la malnutrition », explique-t-elle. La malnutrition est un grave problème dans les régions les plus pauvres du pays, où plusieurs millions d’enfants indonésiens souffriraient de la faim. Yustina confie que ces dernières années, le sous-district de l’Adonara oriental où se trouve son village a enregistré plus de deux mille enfants avec un retard de croissance dû à la malnutrition.

Mais les efforts conjoints de Yustina et de son mari, Yakobus Doni, sur leur ferme de trois hectares, ont été particulièrement efficaces contre la malnutrition et les retards de croissance, affirme Yustina. Le couple s’est joint à trente autres paysans en remplaçant le maïs et le manioc par le sorgho. Yustina explique que le sorgho était cultivé par les générations précédentes avant que sa culture soit découragée au cours de la dictature de Suharto. Le défi consistait à faire du sorgho un aliment adapté pour les enfants, ajoute Yustina, qui a commencé à cuisiner des plats en mélangeant de la farine de sorgho avec du millet et des haricots. Grâce à une formation du diocèse sur la culture et la production de la graine, elle a acheté dans un village voisin de quoi moudre les graines de sorgho, le millet et les haricots. Elle confectionne ainsi du porridge, des céréales, de la glace et des boissons à partir de ces ingrédients, avant de les offrir à une clinique locale pour contribuer à mieux nourrir les enfants. « Je le fais pour convaincre les gens que les enfants peuvent apprendre à aimer le sorgho sans aucun problème », souligne-t-elle. Aujourd’hui, l’un de ses objectifs est de faire prendre conscience que la consommation des nourritures instantanées fournies par les grands groupes industriels va achever de marginaliser les paysans en les laissant sans travail.

« Food heroes » 2018

Kamaria Kewa Lamanele, directeur du département de la santé du district de Flores oriental, explique que le sorgho est devenu un aliment de base pour les enfants de la région. En 2017, le chef du district a décidé de soutenir l’utilisation des produits locaux comme le sorgho. « Nous apprécions le travail des fermiers comme Yustina Jari, qui se démènent sans relâche pour produire et encourager ces récoltes locales », ajoute-t-il. Fransiska Wain, du département de la santé du district, confie que le gouvernement prévoit de nouveaux efforts pour lutter contre la mauvaise alimentation et ses conséquences sur la santé. Pour son travail, Yustina Jari fait partie des huit femmes qui ont été ajoutées en 2018 par Oxfam Indonésie à la liste des « food heroes » (héros de l’alimentation). Le prix leur a été remis le 15 décembre. « Ce prix n’est pas seulement pour moi, mais pour toutes les femmes de mon village qui sont toutes concernées par la santé des générations futures », insiste Yustina. Sa prochaine tâche sera d’encourager les femmes des autres villages de la région à faire de même, en particulier pour la culture du sorgho, du millet et des haricots. « Le diocèse nous a incités à continuer d’encourager les autres villageois. Ces plantes sont incroyables, parce qu’elles peuvent survivre sur ces terres arides », poursuit-elle, ajoutant qu’elle a distribué des graines gratuitement dans les villages alentour. « Nous voulons aider d’autres personnes à améliorer leurs revenus et l’alimentation de leurs enfants », explique son mari, Yakobus Doni. Selon Hendrikus Eko, chef du village de Kimakamak, le ministère de l’agriculture doit contribuer au projet en offrant aux cultivateurs du sorgho des machines à moudre. Aujourd’hui, Yustina Jari compte fonder une petite entreprise avec d’autres femmes de son village afin de produire davantage de produits à base de sorgho qui seront vendus dans d’autres régions.

(Avec Ucanews, Larantukia)

Crédit : Caroline Gredler, USAIDPixnio