Eglises d'Asie

Frère Harun, fondateur de deux centres d’accueil pour personnes handicapées

Publié le 23/10/2020




Quinze ans après sa fondation, en 2005 à Purworejo, dans la province de Java central, le centre Sahabat Kita pour personnes handicapées mentales peut accueillir une trentaine de patients. Le fondateur du centre, le frère Ferdinandus Harun, de la congrégation des Frères de la Charité, cofondateur d’un autre centre en 2014 dans l’île de Flores, explique avoir été inspiré par le charisme de sa congrégation et sa devise (« Dieu est amour »), après avoir reçu une formation de 4 ans en psychiatrie. En 2018, l’Association psychiatrique indonésienne a publié une étude recensant 9 millions de personnes handicapées mentales dans le pays.

Frère Ferdinandus Harun, de la congrégation des Frères de la Charité, a fondé deux centres de réhabilitation pour les personnes handicapées mentales.

Le frère Ferdinandus Harun, de la congrégation des Frères de la Charité, explique que le charisme particulier de sa congrégation, dont la devise est « Dieu est amour », l’a amené à fonder deux centres de réhabilitation pour les personnes handicapées mentales en Indonésie. Sa congrégation a été fondée en 1807 par le père Joseph Triest. Le religieux explique que les membres de sa congrégation sont appelés à vivre dans le monde en faisant rayonner l’amour de Dieu, particulièrement auprès de ceux qui sont marginalisés à cause de la maladie, du handicap, de la pauvreté ou de leur différence. « Beaucoup de personnes atteintes de handicap mental ne sont pas traitées correctement. Inspiré par le charisme de charité de ma congrégation, j’ai fondé ces centres de réhabilitation avec plusieurs confrères religieux », confie le frère Ferdinandus Harun, âgé de 55 ans, qui a rejoint la congrégation en 1992.

En octobre 2005, près d’un an après avoir achevé une formation de quatre en psychiatrie à l’Institut IICT en Belgique, Ferdinandus Harun, originaire de Flores, a co-fondé un premier centre nommé Sahabat Kita (« nos amis ») à Purworejo, dans la province de Java central. « Nous l’avons appelé ainsi parce que nous voulions devenir amis avec les personnes handicapées. Nous voulions les entourer, les traiter avec respect et non les ignorer », explique le religieux. Les deux premiers patients du centre sont venus d’un hôpital voisin, dans la province de Yogyakarta. « Tous deux reçoivent toujours des soins au centre. L’un d’eux a perdu tout contact avec sa famille. La famille du deuxième souhaite que nous continuions à nous occuper de lui. » Les autres personnes accueillies aujourd’hui au centre ont été soit trouvées dans les rues de la ville, soit envoyées par des familles qui n’arrivaient pas à s’en sortir seules. Avec dix thérapeutes, le centre peut loger trente patients.

2 000 personnes soignées en six ans

En septembre 2014, neuf ans après l’ouverture de Sahabat Kita, frère Ferdinandus Harun a co-fondé un deuxième centre appelé Renceng Mose, dans le district de Manggarai (dans la province des Petites îles de la Sonde orientales – Nusa Tenggara). « Rencenq Mose, cela veut dire ‘vivre ensemble’. Nous voulions vivre ensemble aux côtés des personnes handicapées mentales, en harmonie, en nous soutenant mutuellement », confie le religieux. Contrairement à la province de Java central, les Petites îles de la Sonde orientales ont très peu d’équipements médicaux capables d’offrir un traitement aux personnes handicapées mentales. Le seul hôpital psychiatrique de la région a été construit il y a seulement trois ans, à Kupang, capitale de la province. « Rencenq Mose est le premier établissement de Flores à avoir commencé à accueillir et soigner les personnes handicapées mentales dans la région », confie frère Ferdinandus Harun. Depuis sa fondation, le centre a également une clinique, ainsi que dix soignants et médecins. Comme le premier centre, il peut accueillir trente patients. À ce jour, il a déjà accueilli plus de 2 000 patients.

Disgrâce familiale

Bien qu’en baisse, la pratique consistant à enchaîner les personnes présentant un handicap mental est toujours fréquente en Indonésie. Certaines personnes peuvent rester enchaînées ou enfermées toute la journée dans des espaces confinés. Pour frère Ferdinandus Harun, « ce genre de pratiques se poursuivent parce qu’ils sont souvent vus comme une disgrâce pour la famille et qu’ils soient considérés comme incurables ». En 2018, l’Association psychiatrique indonésienne a publié une étude recensant près de 9 millions de personnes souffrant d’un handicap mental dans le pays, dont environ 400 000 personnes atteintes de schizophrénie. De son côté, le ministère de la Santé affirme que sur 450 000 personnes enregistrées comme handicapées mentales, 19 800 d’entre elles sont enchaînées ou enfermées, pour la plupart dans des régions rurales.

« Au nom de l’amour de Dieu »

Depuis 2017, le ministère des Affaires sociales s’est efforcé de mettre fin à ces pratiques. « Les patients qui ont connu cela souffrent de blessures aux jambes. Nous les soignons pour qu’ils puissent marcher à nouveau, tout en leur offrant des soins psychiatriques », confie frère Ferdinandus Harun. Le centre leur propose aussi un accompagnement spirituel et social, ajoute-t-il. « Nous voulons les aider à se prendre en main, à être autonomes et à s’intégrer dans la société. » Le religieux reconnaît qu’il y a des difficultés. « Il y a toujours des risques. Certains nous frappent ou nous crachent dessus alors que nous essayons de les soigner. C’est quelque chose que nous rencontrons tous les jours. » Pourtant, il refuse de se laisser décourager. « Nous les soignons comme nous pourrions soigner n’importe qui. Nous le faisons au nom de l’amour de Dieu. »

(Avec Ucanews, Jakarta)


CRÉDITS

Centre de réhabilitation de Renceng Mose