Eglises d'Asie – Inde
Inde Les chrétiens indiens demandent une protection pour Noël
Publié le 20/12/2018
Le ministre indien de l’Intérieur, Rajnath Singh, s’est vu demander la protection des chrétiens par les forces de l’ordre à l’approche de Noël, dans la crainte de nouvelles attaques de la part des militants hindous extrémistes. Le groupe chrétien œcuménique Persecution Relief a envoyé une lettre au ministre afin de lui en faire la demande, lui rappelant une série d’attaques violentes survenues à Noël ces dernières années. « Il y a beaucoup de tensions et un fort sentiment d’insécurité au sein de la minorité chrétienne cette année », précise le groupe dans sa lettre publiée le 14 décembre, demandant le déploiement des forces de l’ordre auprès des Églises et des institutions chrétiennes à travers le pays. « Très souvent, des Églises, des institutions ou des maisons chrétiennes sont visées par les extrémistes antichrétiens », poursuit la lettre. Malgré la demande du ministère de l’Intérieur à tous les États de faire particulièrement attention au respect de la loi et de l’ordre durant les célébrations de Noël, pour Persecution Relief, il faut faire davantage.
Selon le groupe, la plupart des derniers cas de violences dans les États du nord de l’Inde n’ont pas fait l’objet de plaintes parce que les victimes ont peur de s’adresser à la police, celle-ci se montrant souvent aveugle face aux attaques, en refusant d’enregistrer les plaintes. Beaucoup des États du nord contrôlés par le parti pro hindou du Bharatiya Janata Party (BJP) sont suspectés de soutenir les groupes extrémistes. Le fondateur de Persecution Relief Shibu Thomas a ainsi joint à sa lettre la liste d’une série de dix attaques survenues durant les fêtes de Noël 2016 et 2017. Pour lui, les chrétiens indiens vivent une période particulièrement difficile, alors que les discriminations contre les chrétiens, qui représentent seulement 2,3 % des 1,3 milliard d’habitants de l’Inde, ont augmenté depuis l’arrivée au pouvoir du BJP en 2014. « Au moins 150 pasteurs ont été emprisonnés depuis janvier 2018 dans le pays, c’est un record », précise Thomas.
« Le temps que les accusés soient acquittés, le mal est fait »
La plupart des pasteurs ainsi arrêtés sont accusés d’avoir enfreint les lois contre les conversions forcées, en vigueur dans sept États indiens. Ces lois pénalisent les conversions par contrainte, par ruse ou par la force. « Nous vivons une situation particulièrement dangereuse, estime Mgr Leo Cornelio, archevêque de Bhopal. Les chrétiens sont attaqués et envoyés en prison pour conversions forcées, tandis que les musulmans sont accusés de terrorisme. » Mgr Cornelio affirme que les attaques contre les chrétiens font partie d’une stratégie savamment orchestrée destinée à diffamer les chrétiens en les représentant comme des hors-la-loi. « Cela prend énormément de temps pour régler une affaire en justice, à cause de délais interminables imposés par le système judiciaire indien. Et quand les accusés sont acquittés, le mal est fait », dénonce l’archevêque.
Les chrétiens engagés tels que Shibu Thomas continuent d’affirmer que les États dirigés par le BJP soutiennent les extrémistes depuis plusieurs années. « Nous n’avions encore jamais rencontré une telle situation, où la police va jusqu’à s’accompagner des groupes extrémistes pour arrêter les pasteurs chez eux ou dans leurs églises. » Le père Maria Stephen, responsable des relations publiques de l’Église catholique au sein de l’État du Madhya Pradesh, dans le centre de l’Inde, demande : « Si nous ne nous sentons pas en sécurité, comment pouvons-nous célébrer Noël dans nos familles et nos églises ? » Pour lui, le gouvernement fédéral doit assurer la sécurité des chrétiens afin qu’ils n’hésitent pas à participer aux célébrations de Noël. Selon les archives présentées au parlement fédéral en début d’année, les violences religieuses ont augmenté ces deux dernières années. En 2017, 822 attaques ont causé 111 morts 2384 blessés ; en 2016, 703 attaques ont entraîné 86 morts et 2321 blessés. En 2015, 751 attaques ont été enregistrées contre des chrétiens.
(Avec Ucanews, Bhopal)
CRÉDITS
Ucanews