Eglises d'Asie – Inde
La Caritas indienne poursuit son travail de sensibilisation contre la traite des personnes
Publié le 28/06/2019
Selon l’Indice mondial de l’esclavage, l’Inde compte environ huit millions de victimes de la traite des personnes. Selon les statistiques officielles du gouvernement indien, 8 132 cas ont été rapportés en 2016, mais les autorités indiquent que le problème s’est aggravé avec une augmentation de 20 % en 2015. Selon la définition des États-Unis, la traite des personnes concerne le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace ou par la force, dans le but de les exploiter. La définition comprend l’offre de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation. C’est ce qui est arrivé à Meenu, qui avait seulement 13 ans quand sa mère l’a emmenée voir un agent de recrutement de l’État de l’Uttar Pradesh, pour lui trouver du travail afin d’aider à subvenir aux besoins de sa famille, son père alcoolique ne travaillant plus. L’agent de recrutement a versé une avance à la famille et a emmené Meenu à New Delhi, où elle a été confiée à un autre agent, qui l’a placée dans un foyer aisé de la capitale. Elle y a été battue et abusée régulièrement, jusqu’à être hospitalisée un an plus tard. À l’hôpital, quelqu’un a alerté une ONG qui est intervenue. Avec l’aide de l’ONG, Meenu a pu porter plainte contre l’agent et son employeur, accusés de trafic d’être humains et d’abus sexuels. La traite des personnes peut survenir quand les conditions sont propices à l’exploitation, indique le département du travail social de l’université de Delhi, la pauvreté n’étant qu’un des nombreux facteurs. La recherche de l’université indique également d’autres facteurs comme la pression sociale sur les victimes poussées à migrer, un manque d’emplois locaux ou d’opportunités éducatives, et des structures familiales fragiles. « Les trafiquants deviennent plus habiles parce qu’ils savent comment cibler à la fois les personnes les plus vulnérables et les moins visibles », explique un rapport du département universitaire. Parfois, même sans la coopération d’un agent intermédiaire, les circonstances peuvent pousser les gens à se retrouver dans des situations tellement injustes qu’on peut les comparer à la traite des personnes. Le cas de Dishada Bano, une jeune musulmane de 15 ans, en est un exemple. Dishada Bano, originaire de l’État du Bengale occidental, dans le nord-est de l’Inde, a été mariée par sa mère à un homme de cinquante ans de New Delhi. Aujourd’hui mère de trois filles, elle confie avoir été abusée régulièrement par son mari. « Il était aveugle d’un œil et n’arrivait pas à trouver une femme, donc il a décidé d’en acheter une », ajoute-t-elle. Dishada Bano explique avoir été torturée, battue et ridiculisée pour n’avoir conçu que des filles, la forçant à fuir avec ses filles. Aujourd’hui, elle travaille comme domestique et loge dans une cabane en périphérie de Delhi.
Sensibilisation et lutte contre la misère
En 2017, la Caritas indienne a lancé le programme Swarakha (autodéfense) contre la traite des personnes, près de la frontière indo-népalaise, où la plupart des cas ont été rapportés. Le directeur adjoint du programme, le père Jolly Puthenpura, explique que depuis son lancement, la Caritas a lancé un programme contre la traite des personnes dans 75 villages du nord-est du pays, dans les États de l’Assam et de l’Arunachal Pradesh. « L’Église est présente partout dans le Nord-Est, et grâce à ce grand réseau de paroisses et de personnes, nous pouvons contribuer à lutter efficacement contre le problème », assure le prêtre, qui ajoute que Caritas, grâce à des interventions collectives, a pu secourir 282 personnes. « Aujourd’hui, on peut constater un vrai changement, parce que notre programme de sensibilisation auprès des femmes et des enfants leur permet d’être mieux informés et conscients des dangers », confie le père Puthenpura, qui explique que les communautés locales apprennent à ne pas se laisser avoir par les trafiquants. Les chrétiens engagés sur le terrain soulignent que les programmes de sensibilisation doivent être menés de pair avec la lutte contre la misère. Selon les statistiques officielles du gouvernement indien, près d’un quart de la population indienne est considéré comme pauvre ou très pauvre.
(Avec Ucanews, New Delhi)
CRÉDITS
Ians