Eglises d'Asie

La Cour constitutionnelle maintient l’interdiction des mariages interreligieux

Publié le 03/02/2023




Le 31 janvier, la Cour constitutionnelle indonésienne a rendu son verdict en réponse à une pétition déposée par un homme catholique, en défendant la loi de 1974 sur le mariage, en maintenant l’interdiction du mariage interreligieux dans le pays. Pour l’avocat du plaignant, la loi actuelle viole ses droits constitutionnels. « Dans l’Église catholique, le mariage interreligieux est certes une difficulté, mais un mariage légal reste possible », souligne père Postinus Gulo, du diocèse de Bandung, qui s’est dit attristé par la décision de la Cour.

Ahmad Nurcholish, de la Conférence indonésienne pour la religion et la paix (ICRP), avec un couple interreligieux.

La Cour constitutionnelle indonésienne a maintenu une loi datant de plus de cinq décennies interdisant les mariages interreligieux, en rejetant la requête d’un homme catholique qui demandait à pouvoir se marier avec une femme musulmane. Dans un verdict annoncé le 31 janvier, sept des neuf juges du tribunal ont rejeté la pétition déposée par Ramos Patege et défendu la loi de 1974 sur le mariage.

L’avocat du plaignant a affirmé que la loi en question viole les droits constitutionnels du couple et affecte leur liberté de choisir une religion ou une croyance de leur choix. Wahiduddin Adams, un des juges, a souligné qu’une provision de la loi stipule qu’un mariage « est considéré comme valide s’il est contracté selon les lois de chaque religion et croyance », et que cela ne limite donc pas la liberté de religion et de croyance.

« Les dispositions de la loi concernent le mariage légal selon la religion ou la croyance, et non le droit de choisir une religion ou croyance », a-t-il ajouté. « La Cour reste sur sa position sur la constitutionnalité d’un mariage valide, qui doit se faire selon la religion ou croyance », a-t-il précisé, en affirmant qu’il n’y a pas de circonstances ou de conditions suffisantes pour un amendement de la loi.

Par ailleurs, deux autres juges, Suhartoyo et Daniel Yusmic Foekh (un catholique), ont partagé des opinions similaires en soulignant au contraire que la loi doit être changée afin de répondre aux réalités de l’époque.

« C’est une réalité qui est ignorée par la Cour constitutionnelle »

Le père Postinus Gulo, membre de la Sainte-Croix, diplômé en droit canon à l’Université pontificale grégorienne et membre du tribunal matrimonial du diocèse de Bandung, dans la province de Java occidental, s’est dit attristé par la décision.

« Dans l’Église catholique, le mariage interreligieux est certes une difficulté, mais un mariage légal reste possible s’il y a une dispense accordée par l’évêque et le vicaire général », a-t-il souligné. Pour le prêtre, avec la loi actuelle, les couples ne peuvent enregistrer un mariage interreligieux dans le pays. « Nous devons comprendre que c’est un défi pour nous, mais aussi une opportunité de continuer d’être fidèles et fiers de notre foi catholique », a-t-il poursuivi.

Pour Ahmad Nurcholish, conseiller sur le mariage interreligieux et directeur de programme au sein de la Conférence indonésienne pour la religion et la paix (ICRP), cette décision montre que le gouvernement ne fait que revenir en arrière, bien que dans l’ensemble, les communautés religieuses deviennent plus ouvertes. Il ajoute que les religions autorisent les fidèles à se marier avec quelqu’un d’une autre religion, parfois avec des cérémonies célébrées selon la foi des deux religions du couple.

« Par exemple, pour le cas de l’islam et du catholicisme, un mariage islamique et une bénédiction dans une église peuvent avoir lieu. Ainsi, c’est légal selon l’islam et selon les règles de l’Église catholique », affirme-t-il. L’État, ajoute-t-il, n’a pas besoin de s’en mêler et doit laisser les citoyens faire leurs propres choix.

Il ajoute que la loi a poussé les couples interreligieux à choisir des moyens de la contourner, comme des mariages à l’étranger (notamment à Singapour, en Thaïlande, en Australie, à Hong-Kong, aux Pays-Bas, aux États-Unis et en Allemagne). « Pour ceux qui n’en ont pas les moyens, la loi reste bien sûr un problème. » Ahmad Nurcholish et son organisation ont soutenu le mariage de 1 576 couples de différentes religions depuis 2005. Le groupe offre ses services de conseil et de défense à environ une trentaine de couples par mois. « C’est une réalité qui est ignorée par la Cour constitutionnelle et par le gouvernement. »

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Ucanews