Eglises d'Asie – Indonésie
La Cour suprême interdit les mariages interreligieux en Indonésie
Publié le 22/07/2023
La Cour suprême indonésienne a ordonné aux tribunaux de ne pas accepter les demandes d’enregistrement de mariages entre personnes de différentes croyances religieuses. Afin de s’assurer de faire connaître clairement cette décision, la Cour a publié une lettre signée par Muhammad Syarifuddin, juge en chef de la Cour suprême, dans laquelle les tribunaux sont ordonnés de respecter l’article 2 de la loi de 1974 sur le mariage, qui légalise les mariages seulement au sein de la même religion.
Dans le cadre de cette loi, les musulmans peuvent enregistrer leur union auprès du Bureau des Affaires religieuses, tandis que les autres doivent se tourner vers le Bureau d’état civil. La possibilité des mariages interreligieux n’est pas considérée. Pourtant, malgré cette loi, un précédent juridique existe.
En 1986, la Cour suprême a accordé à une femme musulmane le droit d’enregistrer son mariage avec un homme non musulman auprès du Bureau d’état civil. Le mois dernier, un tribunal de district de Jakarta a fait la même chose en accordant à un couple – un homme chrétien et une femme musulmane – le droit d’enregistrer leur mariage. Le juge en question Bintang AL, a estimé le mariage interreligieux comme raisonnable et inévitable étant donné l’hétérogénéité de la population indonésienne.
Plusieurs organisations protestent contre la décision
Le Conseil indonésien des oulémas (MUI), a quant à lui contesté la décision du tribunal de district. Pour cette raison, le MUI a salué l’interdiction de la Cour suprême, en affirmant qu’elle clarifie la jurisprudence sur le sujet et qu’elle comble les lacunes juridiques. « Toutes les parties concernées doivent obéir à la circulaire, en particulier les juges qui ne comprennent pas ou qui font semblant de ne pas comprendre la loi sur le mariage », a réagi Asrorun Ni’am, un responsable du conseil, dans une déclaration publiée ce mardi.
Plusieurs organisations ont protesté contre la décision de la Cour suprême, parce qu’elle « met un terme aux progrès réalisés par les institutions judiciaires de l’État concernant la garantie des droits des citoyens de différentes origines », selon Halili Hasan, directeur de l’institut SETARA pour la démocratie et la paix, basé en Indonésie. Ahmad Suaedy, conférencier à l’université Nahdlatul Ulama Indonesia, à Jakarta, pense quant à lui que la décision de la Cour suprême n’était pas nécessaire, étant donné que plusieurs interprétations du mariage interreligieux existent au sein même de l’islam.
Cette question non plus n’est pas nouvelle. En janvier dernier, la Cour constitutionnelle a rejeté une pétition demandant une révision de la clause sur le mariage interreligieux de la loi de 1974 sur le mariage. E. Ramos Petege, un homme catholique de Papouasie, avait déposé la pétition afin de pouvoir se marier avec une femme musulmane avec qui il était depuis trois ans. Au-delà de tous les aspects juridiques de la question, le manque de reconnaissance légale des couples interreligieux peut entraîner de nombreuses difficultés en termes de droits, d’héritages et d’accès aux avantages sociaux.
(Avec Asianews)