Eglises d'Asie

Le cas de l’État du Tamil Nadu, théâtre de violences antichrétiennes

Publié le 29/10/2022




À l’occasion de la fête hindoue de Diwali, qui s’est déroulée le 24 octobre, le Vatican a tenu à adresser un message sur « la manière dont nous, chrétiens et hindous, pouvons ensemble promouvoir la convivialité et la coresponsabilité pour le bien de chacun ». L’initiative intervient dans un contexte marqué par une recrudescence des violences ciblant les chrétiens, sous le gouvernement de Narendra Modi et du parti du BJP. Le Tamil Nadu, dans le sud de l’Inde, est ainsi le théâtre d’un nombre préoccupant d’incidents et d’agressions.

Le lundi 24 octobre, le Vatican a tenu à adresser un message à l’occasion de la grande fête hindoue de Diwali (ici en 2016 à New Delhi).

Le communiqué du Vatican est daté du 10 octobre et signé par le cardinal Miguel Ángel Ayuso Guixot (président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux) et par Mgr Indunil Janakaratne Kodithuwakku Kankanamalage (secrétaire du Conseil). Il souligne un contexte global de « cas croissants de tensions, de conflits et de violences dans différentes parties du monde, sur la base d’identités et de suprématies religieuses, culturelles, ethniques, raciales et linguistiques – souvent alimentés par des politiques concurrentielles, populistes et expansionnistes, ainsi que par des mouvements majoritaires ou minoritaires et par l’utilisation abusive flagrante des médias sociaux », qui sont « une source de préoccupation pour nous tous ».

Certains de ces traits sont particulièrement parlants à l’échelle de l’Inde ; le puissant parti nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi, au pouvoir depuis 2014, y promeut « l’hindutva », idéologie qui défend une suprématie et une nation hindoues, au détriment des minorités musulmanes et chrétiennes.

Au Tamil Nadu, dans le sud de l’Inde, un État qui n’est pas dirigé par les nationalistes hindous et leur est même culturellement et traditionnellement opposé, le BJP (Parti du peuple indien) s’efforce d’étendre sa présence politique. Simultanément, le Tamil Nadu est le théâtre de nombreuses violences commises contre les chrétiens et leurs institutions par des acteurs hindous fondamentalistes.

Dans le cadre d’une procédure d’intérêt publique introduite en août dernier auprès de la Cour suprême par plusieurs organisations chrétiennes, les chiffres présentés par l’United Christian Forum (UCF) montrent ainsi que le Tamil Nadu est particulièrement ciblé par ce type d’incidents.

L’État du Tamil Nadu qualifié de « laboratoire de l’hindutva »

En 2019, cet État indien était le deuxième État le plus visé par des attaques à l’encontre des chrétiens, avec 56 incidents répertoriés, derrière l’Uttar Pradesh qui en comptabilisait quant à lui 73. Il est à noter que le Tamil Nadu est le seul État non dirigé par le BJP, ou avec une faible présence politique de ce parti, à comptabiliser un tel nombre d’incidents. Entre 2014 et 2022, le Tamil Nadu a cumulé 227 attaques ciblant les communautés chrétiennes.

Concernant les premiers mois de l’année 2022, 26 incidents sont à déplorer, le Tamil Nadu se retrouvant derrière les États à l’importante population aborigène du Jharkhand et du Chhattisgarh, et, toujours en tête, l’Uttar Pradesh avec un record de 121 épisodes violents. La montée des groupes extrémistes dans les régions tribales survient notamment en opposition à une présence chrétienne traditionnelle.

Les chiffres avancés ont été collectés au moyen d’une ligne téléphonique gratuite de soutien aux chrétiens, mise en place par l’UCF, et cela dans un contexte où la police refuse régulièrement d’enregistrer les plaintes déposées par les chrétiens ou de poursuivre les agresseurs. La nature des incidents répertoriés varie : il peut s’agir de lieux de culte vandalisés, de messes interrompues, ou encore d’agressions à l’encontre des fidèles ou des religieux.

Ce mois-ci, le site d’information The News Minute, spécialisé dans les régions du sud de l’Inde, a publié une enquête dénonçant des « attaques systématiques » à l’encontre des chrétiens dans l’État du Tamil Nadu, qualifié de « laboratoire de l’hindutva ». L’enquête fait notamment part de différents cas témoignant de l’hostilité de la police et de l’administration indienne face aux missionnaires.

L’hostilité croissante portée aux minorités chrétiennes et musulmanes dans le cadre du suprématisme hindou au pouvoir se renforce depuis ces dernières années par d’autres évolutions importantes, qui vont du durcissement des lois anti-conversion au blocage des financements étrangers en faveur des organisations religieuses non-hindoues, ou encore à la diffusion de « fake news » stigmatisant les minorités.

(EDA)


CRÉDITS

Ucanews