Eglises d'Asie – Philippines
Le gouvernement philippin renforce les règles pour la protection des migrants dans les pays du Golfe
Publié le 14/06/2023
Aux Philippines, le taux de chômage risque d’empirer alors que près de 120 000 Philippins travaillant dans les pays du golfe Persique vont vraisemblablement devoir rentrer chez eux, Manille ayant insisté pour la protection des droits des travailleurs philippins à l’étranger.
Le nombre de retour de migrants s’est intensifié ces derniers mois quand les autorités philippines ont insisté pour l’application stricte des contrats de travail des migrants dans les pays du golfe, après le meurtre d’une aide domestique, Jullebee Ranara, au Koweït. Ainsi, près de deux mille migrants travaillant dans différents pays sont rentrés aux Philippines le 7 juin.
En janvier dernier, Jullebee Ranara, âgée de 34 ans, aurait été violée, tuée et brûlée par le fils de son employeur, avant que son corps soit enterré dans le désert. Depuis, le ministère philippin du Travail cherche mieux faire respecter les règles pour les migrants philippins travaillant au Moyen Orient, ce qui pousse certains d’entre eux à être licenciés. Le gouvernement a notamment interdit les premières embauches comme domestiques au Koweït et des négociations bilatérales sont en cours avec l’Arabie Saoudite et le Yemen afin d’assurer la protection des droits de la diaspora philippine.
1,1 million de migrants philippins ont perdu leur travail durant la pandémie
« Nous devons imposer le respect de nos contrats de travail en mettant en place des sanctions plus importantes. Les contrats de nos compatriotes n’avaient aucune crédibilité car il n’y avait aucune amende ou peine de prison mentionnée concernant l’employeur. Nous devons changer cela selon notre loi et la leur », a déclaré Hans Cacdac, secrétaire du Département des travailleurs migrants au sein du gouvernement philippin.
Le 7 juin durant une conférence de presse, Hans Cacdac a également souligné que « soit ces pays accepteront nos demandes pour la protection de nos travailleurs, soit ils devront les renvoyer s’ils ne peuvent les protéger ». Cette mesure aurait entraîné une hausse du chômage dans le pays selon le Département du travail et de l’emploi. Ce dernier précise que ces retours s’ajouteront aux quelque 1,1 million de travailleurs migrants qui ont perdu leur travail durant la pandémie, depuis 2020. Le 8 juin durant une autre conférence de presse, le ministre du travail, Bienvenido Laguesma, a cependant assuré que 60 % des migrants qui ont perdu leur travail durant la crise sanitaire ont retrouvé un emploi.
De leur côté, les migrants rapatriés craignent qu’aucun pays du Moyen-Orient n’accepte des migrants philippins si la position « agressive » de Manille sur le sujet continue. Anthena Geron, 32 ans, se dit à la fois heureuse et inquiète à propos de ces mesures. « J’apprécie que notre gouvernement soit aussi proactif pour la protection de nos droits à cause de la mort de Ranara. Mais j’ai peur de ne pouvoir trouver du travail dans les pays arabes à cause de demandes trop exigeantes. » Elle ajoute que son employeur au Koweït lui a offert une indemnité de départ de 909 dollars US avant de lui demander de rentrer dans son pays.
« Le nombre de Philippins sans emploi a triplé en un an »
Les Philippines font déjà face à un taux de chômage élevé. En mars, l’Autorité nationale des statistiques a compté 2,42 millions de Philippins au chômage, sur une population active de 51 millions de personnes. Le gouvernement du président Ferdinand Marcos a organisé une foire à l’emploi à l’échelle nationale du 10 au 12 juin afin d’offrir des postes à près de 72 000 migrants, majoritairement de retour des pays du golfe.
Ranjit Rye, qui enseigne les sciences politiques à l’Université des Philippines, estime que la montée du chômage est une menace pour la situation socio-économique du pays. « Le nombre de Philippins sans emploi a triplé en un an, comparé au nombre d’emplois disponibles. Donc le marché de l’emploi est saturé. Les gens choisissent donc de se contenter d’emplois à temps partiel plutôt que de rester au chômage, ce qui est une autre catastrophe pour le secteur. »
(Avec Ucanews)