Eglises d'Asie – Inde
L’Église catholique syro-malabare tend vers un rite unifié malgré une controverse liturgique
Publié le 03/09/2021
Les désaccords liturgiques se renforcent dans l’Église syro-malabare, de rite oriental, alors qu’un groupe de prêtres a choisi de ne pas suivre une décision synodale destinée à unifier les célébrations liturgiques dans l’ensemble des 35 diocèses de l’Église catholique orientale. Le 28 août, près de 300 prêtres de l’archidiocèse d’Ernakulum-Angamaly ont rencontré le cardinal George Alencherry, leur primat, ainsi que Mgr Antony Kariyil, vicaire épiscopal, afin d’expliquer leur décision. Le père Jose Vailikodath, membre du conseil des prêtres, confie qu’ils ont « rencontré Mgr Kariyil afin de le supplier d’accorder une dérogation du pape François concernant la décision synodale, pour que nous puissions poursuivre nos coutumes durant la célébration de la Sainte Messe, en célébrant face à l’assemblée ». Le 27 août, le synode des évêques a publié un décret en demandant aux paroisses de tous les diocèses d’appliquer une seule liturgie unifiée à partir du 28 novembre.
Le synode avait adopté cette réforme liturgique dès 1999, mais la décision n’avait pas été appliquée dans certains diocèses en raison de l’opposition des prêtres et des laïcs. Les évêques qui rencontrent des difficultés concernant la mise en œuvre de la décision devraient procéder par étapes et via des programmes de catéchèse. Tous les diocèses devraient avoir achevé ce processus d’ici le dimanche de Pâques, le 17 avril, a déclaré le synode de l’Église orientale, basé dans l’État du Kerala, dans le sud de l’Inde. Le père Vailikodath voit cette décision comme « arbitraire » et accuse le synode de « ne pas prendre en compte les sentiments des prêtres et des laïcs ». Le prêtre explique qu’ils ont affirmé à Mgr Kariyil que si la décision n’était pas revue, ils ne célébreraient plus la messe en public, afin d’éviter de s’opposer ouvertement à la décision du synode.
Un conflit liturgique qui remonte à plusieurs décennies
Ce conflit liturgique a débuté il y a près de quatre décennies quand l’Église syro-malabare a tenté de réformer sa liturgie. Tandis qu’une section de prêtres souhaitait renouveler la liturgie en revenant à ses origines, d’autres voulaient tendre vers une réforme plus moderne. Ainsi, ces derniers insistaient pour célébrer face au peuple durant la messe, alors que les autres voulaient célébrer face à l’autel. Après de nombreuses commissions et débats, le synode a décidé, en 1999, que le prêtre célébrerait face au peuple sauf durant la consécration et le rite eucharistique. Bien que cette décision ait été considérée comme un « compromis » par beaucoup, un groupe de prêtres, majoritairement de l’archidiocèse d’Ernakulam-Angamaly, a refusé de l’accepter. Ils ont fait appel à Rome et ont continué de célébrer l’ensemble de la messe face au peuple.
Début juillet, le pape François a poussé l’Église syro-malabare à appliquer la décision synodale de 1999 pour « la stabilité et la communion ecclésiales ». Le père Vailikodath assure que Mgr Kariyil n’a « exprimé aucun désaccord concernant nos demandes ». Le prêtre explique que sur les 513 prêtres de l’archidiocèse, 466 ont écrit une lettre au Vatican et au synode afin de faire part de leur désaccord. Le prêtre précise que durant plus de six décennies, ils ont célébré la messe face au peuple dans l’esprit du concile Vatican II, et que trois générations de fidèles ont grandi avec cette tradition. « La lettre du pape n’a pas demandé au synode d’appliquer cette décision de manière arbitraire sans prendre en compte les sentiments des fidèles et des prêtres », estime le prêtre.
« Écouter tout le monde et respecter la diversité »
Selon Mathew Kilukkan, responsable de la communication de l’archidiocèse, estime que la « décision malheureuse » du synode « contredit le concept même de synode », décrit par le pape François comme basé sur l’idée « d’écouter tout le monde et de respecter la diversité ». « Nous craignons que cet appel à l’uniformité détruise la possibilité d’unité dans l’Église, d’autant plus que cela s’est fait contre l’avis d’un tiers des évêques », ajoute-t-il. Pour de nombreux catholiques comme Cheriyan Joseph, un catéchiste du diocèse d’Idukki, une telle controverse aurait pu être évitée. « La célébration eucharistique est chère à mon cœur et pour beaucoup de catholiques. Ce genre de controverse est démoralisant, et tous ceux qui sont concernés devraient régler le problème sans perdre de temps avant que cela se transforme en scandale », a-t-il commenté.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Ucanews