Eglises d'Asie – Inde
Les chrétiens indiens dénoncent les violences intercommunautaires qui ont fait plus de 34 morts à Delhi
Publié le 28/02/2020
Mgr Anil Joseph Thomas Couto, archevêque de Delhi, a adressé une lettre aux prêtres de l’archidiocèse afin de demander aux paroisses de participer à l’entraide auprès des victimes des violences intercommunautaires qui ont frappé la capitale indienne ces deniers jours. Mgr Couto a également appelé les églises à ouvrir leurs portes « pour cette noble cause, en ce temps du carême ». « S’il vous plaît, veuillez transmettre cela à tous pour que nous puissions nous préparer à agir », a-t-il souligné. Selon les médias locaux, les violences qui ont éclaté le 23 février sont les émeutes les plus meurtrières depuis les événements de 1992, quand la foule a détruit la mosquée Babri d’Ayodhya, dans l’Uttar Pradesh, et peut-être même depuis les émeutes anti-sikhs de 1984, après l’assassinat du Premier ministre Indira Gandhi. Les violences ont éclaté quand des groupes favorables à l’amendement de la loi sur la citoyenneté (CAA) se sont attaqués à des manifestants opposés à la nouvelle loi, jugée discriminatoire envers la minorité musulmane. Le CAA a été voté le 11 décembre dernier, dans le but d’accorder la citoyenneté indienne aux minorités persécutées d’origine pakistanaise, bangladaise et afghane, en excluant la naturalisation des migrants musulmans. Ces derniers y voient une nouvelle tentative du gouvernement du Premier ministre Narendra Modi de les marginaliser. La communauté musulmane estime que les mesures comme l’amendement CAA ou encore la mise à jour du « registre national des citoyens » (NRC) sont destinées à retirer la citoyenneté de plusieurs millions de musulmans indiens. De même, les membres des castes inférieures et des minorités ethniques, ainsi que les femmes, sont également exposés face au NRC.
Les dernières violences à Delhi ont entraîné les incendies de plusieurs centaines de véhicules, boutiques et maisons. Les rues de Chand Bagh et de Bhajanpura, en périphérie de la capitale, ont été désertées le 26 février. Les habitants du quartier sont restés chez eux face au déploiement de l’armée et de la police, en évitant les rues pleines de briques, de pierres et de verre brisé, au milieu des maisons, des bureaux et véhicules incendiés. Le 26 février, le Conseil national des Églises indiennes (NCCI), un forum d’Églises protestantes et orthodoxes, a publié une déclaration contre les violences en appelant à la solidarité. « Nous appelons les membres des différentes traditions chrétiennes à s’entraider, et les fidèles de toutes confessions religieuses et croyances à contribuer pour que nous puissions nous relever », insiste le communiqué, signé par le révérend Asir Ebenezer, secrétaire général du NCCI. La déclaration condamne également une « attaque indigne contre différents sites vulnérables de Delhi, avec la complicité explicite ou implicite des autorités ». De son côté, la Fraternité évangélique de l’Inde (EFI), l’alliance nationale des chrétiens évangéliques, a condamné les « intérêts politiques et les motifs haineux » derrière les violences. La déclaration de l’EFI, signée par le révérend Vijayesh, secrétaire général de l’organisation, a appelé les habitants de Delhi à « maintenir la paix et éviter de céder aux rumeurs haineuses répandues sur les réseaux sociaux ; nous ne devons pas céder à la haine ». Le communiqué a également demandé à ses communautés de la région de Delhi d’ouvrir « leurs cœurs et leurs communautés aux victimes » et de « venir en aide à tous ceux qui se retrouvent désemparés et démunis » face aux évènements. « Ce serait un acte de service au Seigneur en ce temps de carême », ont-ils ajouté.
(Avec Ucanews, Delhi)
CRÉDITS
Bijay Kumar Minj/ Ucanews