Eglises d'Asie – Indonésie
Les intellectuels catholiques indonésiens au service de l’unité nationale dans la diversité
Publié le 04/07/2019
Quelques années après avoir rejoint l’Association des intellectuels catholiques indonésiens (Iska), Vincentius Hargo Mandirahardjo est devenu responsable de l’organisation. En 2017, l’avocat de 58 ans a été élu président de l’Iska, le plus ancien groupe d’intellectuels catholiques du pays, pour un mandat de quatre ans. Avant cela, ce paroissien de l’église Saint-Matthias de Depok, une banlieue de Jakarta, a été responsable du département Loi et règlements du groupe. « Je suis fier de cette organisation. Les membres viennent de cadres professionnels très variés, mais nous sommes unis par nos idées et par notre réflexion. C’est notre force », explique Vincentius Mandirahardjo, qui confie que son premier objectif, en tant que responsable de l’organisation, est de poursuivre les efforts d’Iska pour maintenir la diversité en Indonésie. L’Iska, fondée le 22 mai 1958 sous le patronage de saint Albert le Grand, cherche à associer les intellectuels catholiques pour qu’ils mettent leur foi et leurs connaissances au service de l’État et de la communauté catholique locale, dans l’esprit des cinq principes de l’idéologie nationale de la Pancasila. Les Indonésiens voient la Pancasila comme un symbole d’unité nationale. Celle-ci repose sur une société juste et civilisée, une Indonésie unie, une démocratie guidée par la sagesse dans la délibération et la représentation, la justice sociale pour tous les citoyens et la croyance en un Dieu unique. « Actuellement, nous faisons en sorte que les jeunes indonésiens comprennent ces principes et les fondations sur lesquelles notre pays s’est construit, car ce sont les futurs dirigeants de notre pays. S’ils ne sont pas suffisamment formés dans ce domaine, des divisions peuvent émerger », affirme Vincentius Mandirahardjo.
Éducation civique
Le groupe Iska fait partie de l’organisation MIIC-Pax Romana (Mouvement international des étudiants catholiques), un réseau international affilié à l’Unesco, qui œuvre pour la promotion des droits de l’homme, dans un esprit de solidarité avec les pauvres et avec les minorités, et pour le dialogue interreligieux. Dans ce cadre, Iska organise divers programmes, en particulier pour les jeunes. « Nous voulons dire aux gens qu’ils ne doivent pas oublier leurs responsabilités de citoyens, au service de l’unité et de la diversité du pays », explique Vincentius Mandirahardjo. En 2017, son groupe a lancé le programme Sekolah Kebangsaan (éducation civique), destiné en particulier aux lycéens. Ce programme amène une équipe d’Iska à visiter de nombreuses écoles à travers le pays. Les sessions, qui durent environ trois heures, attirent souvent plusieurs centaines d’étudiants. « Ce programme est une concrétisation de l’engagement d’Iska au service de l’unité nationale. Il est destiné à éduquer les jeunes d’une façon interactive et moderne », confie Paulinus Prasetyo Nurhardjanto, qui fait partie de l’équipe. « En général, les étudiants se montrent très réceptifs et enthousiastes », assure Paulinus, originaire de la ville de Bekasi, près de Jakarta.
Préserver la sagesse locale
Depuis l’an dernier, Iska a également organisé des programmes sur la diversité nationale, pour lesquelles les dix branches régionales de l’organisation organisent des débats réguliers. « Le but est de soutenir la sagesse locale, qui se reflète sur la diversité nationale. Par exemple, à Ambon, la capitale de la province de Maluku, il y a ce qu’on appelle le ‘pela gandong’ », raconte Vincentius Mandirahardjo, qui explique que c’est ainsi qu’on appelle les relations harmonieuses entre les villages chrétiens et musulmans dans la province, et qui sont restées fortes malgré les violences extrémistes qui ont éclaté au court des dernières décennies. « La sagesse locale renforce l’unité nationale, elle semble être oubliée par beaucoup de gens », regrette Vincentius. Actuellement, Iska prépare la publication d’un livre qui recense les pensées et les idées issues du programme lancé par l’organisation. Il doit paraître en août, alors que l’Indonésie fêtera le 74e anniversaire de son indépendance le 17 août prochain. Un autre programme a été lancé par Iska l’an dernier, appelé Indonesia Bijak (Sage Indonésie), afin d’appeler à utiliser les réseaux sociaux pour lutter contre les discours de haine et les fake news. Ainsi, le groupe a commencé par former des équipes dans dix villes indonésiennes afin d’organiser des sessions de formations interactives dans les écoles. « Si nous nous contentons de parler de la Pancasila et la promotion de la diversité parmi les jeunes indonésiens, ils ne seront pas intéressés. Mais si nous leur montrons des exemples concrets comme l’utilisation des réseaux sociaux, ils peuvent écouter et apprendre », estime Joannes Joko, membre d’Iska. Selon le père Paulus Christian Siswantoko, secrétaire général de la commission épiscopale pour la justice et la paix et pour la pastorale des migrants et des personnes itinérantes, Iska joue un rôle essentiel dans la société indonésienne. « Cela donne aux gens, en particulier aux catholiques, une vision sur la diversité, qui peut et qui doit être soutenue aujourd’hui. Il ne s’agit pas seulement de soutenir le dialogue interreligieux, mais aussi de se demander comment construire le dialogue au quotidien. Iska cherche à inviter les gens à prendre l’habitude de vivre dans la diversité », confie le prêtre. À l’image du slogan revendiqué par Mgr Albertus Soegijapranata, qui fut le premier évêque natif d’Indonésie : « Être 100 % catholiques, et 100 % indonésiens. » Pour Vincentius Mandirahardjo, « Iska est là pour défendre et promouvoir la sagesse nationale. C’est une grande responsabilité ».
(Avec Ucanews, Jakarta)
CRÉDITS
Ucanews