Eglises d'Asie

Les nationalistes hindous lancent une campagne nationale contre les conversions religieuses

Publié le 09/10/2020




Les groupes RSS et VHP, deux organisations nationalistes hindoues, ont annoncé le lancement d’une campagne nationale anti-conversions. Milind Parande, secrétaire général du VHP, a affirmé que « les conversions religieuses sont une forme de violence ». Le père Nicholas Barla, secrétaire de la Commission pour les Affaires indigènes de la Conférence épiscopale indienne, a vivement réagi en soulignant que « tout le monde reconnaît que l’Église est engagée dans de nombreuses œuvres caritatives. Notre principale inquiétude est que cela puisse être interprété comme une tentative de conversion, ce qui est faux ».

Des catholiques de l’archidiocèse de Delhi, le 9 avril 2017 lors d’un rassemblement annuel organisé à l’occasion du dimanche des Rameaux.

Plusieurs groupes nationalistes hindous préparent le lancement d’une campagne nationale contre les conversions religieuses, qu’ils dénoncent comme un crime et comme une forme de violence. Les groupes RSS (Rashtriya Swayamsevak Sangh) et VHP (Vishwa Hindu Parishad), qui affirment que les conversions forcées sont nombreuses dans les régions majoritairement indigènes, ont annoncé vouloir ramener les convertis à l’hindouisme. Pourtant, leurs revendications ont entraîné des vives réactions de la part des responsables chrétiens dans le pays. « L’Église catholique en Inde ne recherche pas les conversions religieuses, et si le RSS et le VHP affirment que nous le faisons, qu’ils le prouvent », réagit le père Nicholas Barla, secrétaire de la Commission pour les Affaires indigènes de la Conférence épiscopale indienne. « Ces groupes nous accusent régulièrement de conversions, mais il n’y a aucune donnée enregistrée indiquant des cas de conversions religieuses liés à l’Église locale. Par ailleurs, tout le monde reconnaît que l’Église est engagée dans de nombreuses œuvres caritatives. Notre principale inquiétude est que ce travail humanitaire puisse être interprété comme une tentative de conversion, ce qui est faux. Nous devrions continuer notre travail sans prêter attention à leur propagande », poursuit le prêtre.

La minorité chrétienne représente toujours 2,3 % de la population

A. C. Michael, coordinateur national du Forum chrétien unifié (UCFHR), confirme que ces accusations de conversions ne se retrouvent pas dans les chiffres du gouvernement. « Recensement après recensement, la minorité chrétienne représente toujours environ 2,3 % de la population indienne. Ces organisations auraient-elles des données cachées que nous n’avons pas ? Ce sont juste des excuses pour poursuivre leurs propres intérêts. Le droit à la liberté religieuse est un droit fondamental garanti par notre Constitution », souligne-t-il. Sajan K. George, président du Conseil global des chrétiens indiens (GCIC), ajoute que le RSS et le VHP cherchent à « répandre la haine contre les chrétiens en faisant germer les semences d’un esprit antichrétien ». « Les violences survenues à Kandhamal, le pire massacre antichrétien que nous avons connu, dans l’État d’Odisha en 2008, n’aurait pas été possible s’il n’y avait pas eu de campagne violente contre l’Église et les missionnaires dans la région, au moins dix ans avant les violences de Kandhamal », affirme-t-il.

De son côté, Vinod Bansal, porte-parole du groupe VHP, a déclaré que son groupe et les membres du RSS organiseront des visites à domicile dans les régions indigènes, afin de sensibiliser les gens sur la religion hindoue. « Nous appelons même le gouvernement fédéral à vérifier que les chrétiens et les musulmans convertis ne bénéficient pas des avantages réservés aux castes ‘répertoriées’ [des avantages garantis à certains groupes défavorisés de la population indienne, dont les dalits et les populations indigènes] », a-t-il insisté. Vinod Bansal a ajouté que les cas de conversions sont souvent rapportés au sein des régions majoritairement indigènes, dans les États du Bihar, du Chhattisgarh, du Jharkhand, de Jammu et Cachemire, du Madhya Pradesh, du Maharashtra, d’Odisha et du Bengale occidental. Milind Parande, secrétaire général du VHP, a également affirmé que « les conversions religieuses sont une forme de violence parce qu’elles privent les gens de leur culture, de leurs traditions et de leurs racines ». Selon lui, il faut légiférer pour faire cesser les conversions : « Nous échangeons avec les gouvernements locaux afin de formuler une nouvelle loi contre cette forme de violence. » Les cérémonies de « Ghar Wapsi » (« Retour à la maison »), destinées à re-convertir des chrétiens ou des musulmans à l’hindouisme, sont de plus en courantes depuis l’arrivée au pouvoir du parti BJP (Bharatiya Janata Party), en mai 2014. Les nationalistes hindous accusent notamment les chrétiens de convertir par la force ou par ruse. En 2018, l’État d’Uttarakhand est devenu le neuvième État indien à voter une loi sur les conversions religieuses (après ceux de l’Arunachal Pradesh, de l’Odisha, du Madhya Pradesh, du Chhattisgarh, du Gujarat, de l’Himachal Pradesh, du Jharkhand et du Tamil Nadu).

(Avec Ucanews, New Delhi)


CRÉDITS

Bijay Kumar Minj / Ucanews