Eglises d'Asie – Inde
Les pêcheurs de Goa manifestent pour protéger le littoral
Publié le 01/03/2019
Aninha Rocha, une indienne de Goa de 94 ans qui se déplace en fauteuil roulant, a déposé une demande pour faire reconstruire sa maison en pisé (terre crue) il y a plus de dix ans, mais sa requête a mystérieusement disparu. Une enquête a pourtant découvert que le permis de reconstruction lui avait été accordé, mais les autorités de l’État de Goa, ancienne colonie portugaise sur la côte ouest indienne, affirment qu’elles ne peuvent plus mettre en œuvre la reconstruction à cause des nouvelles lois imposées par le Tribunal Vert National (NGT). « Ce genre d’astuce harcèle les habitants les plus démunis », regrette Aninha. « Les lois sont manipulées par les autorités au détriment de personnes comme moi », ajoute-t-elle. « Pendant que j’attends la suite des procédures judiciaires, beaucoup de propriétés construites illégalement apparaissent autour de chez moi. » D’autres victimes, qui se retrouvent dans la même situation qu’Aninha, soulignent que ces lois ont été votées pour protéger le littoral, et non pour être manipulées contre les habitants de ces régions en les empêchant de reconstruire leurs maisons. Par ailleurs, des milliers d’habitants de l’État ont participé à des manifestations afin de protéger les terres agricoles et les sources de la région contre les promoteurs immobiliers.
Selon les catholiques, qui représentent près d’un quart de la population de l’État sur 1,4 million d’habitants, affirment que l’Église essaie de les soutenir. Mais le 18 janvier, le gouvernement a voté l’ouverture du littoral au développement immobilier, portuaire et touristique, provoquant la protestation généralisée des organisations de pêche, entre autres. L’avis publié par le ministère de l’environnement, des forêts et du changement climatique a réduit les « zones de non-développement », de 200 mètres à seulement 50 mètres du littoral. « Cela permettra aux promoteurs de construire plus près de la côte et des dunes », explique Claude Alvares, du groupe Goa Foundation. Olencio Simoes, secrétaire général du Forum des pêcheurs de Goa (Goenchea Ramponkaracho Ekvott), demande que le ministère protège l’environnement au lieu de le détruire. Pour lui, cette décision cherche à apaiser le lobby immobilier avant les élections nationales de mai 2019. Son organisation a organisé une manifestation contre la décision le 23 février, à Margao, en collaboration avec le National Fishworkers Forum. Ils demandent le retrait de la nouvelle loi et une régulation plus stricte, dans l’esprit de la loi de 2011 sur la Zone de régulation côtière.
Projet « SagarMala » : modernisation du littoral
Le père Eremito Rebello, qui a participé aux manifestations de la semaine dernière, estime que la mesure est dangereuse à cause du niveau irrégulier des marées hautes. Et avec le passage de plus en plus fréquent des tsunamis et des tempêtes, il estime que le gouvernement devrait plutôt vers l’inverse et éloigner davantage les constructions du littoral. « Avec les élections qui approchent, la balle est dans votre camp », a-t-il confié aux manifestants, laissant entendre qu’ils devraient plutôt voter contre le BJP (Bharatiya Janata Party), le parti pro hindou, qui dirige l’État de Goa et de nombreux États majeurs du pays. Les militants affirment que la décision du gouvernement menace le travail des communautés du littoral comme les pêcheurs et les fermiers. De même, ils estiment que cela expose le littoral à la construction d’éoliennes, de ports, d’entrepôts, de zones industrielles, de lignes électriques et de projets touristiques… Le littoral de Goa est perturbé depuis déjà plus d’une décennie par les changements climatiques. Ainsi, par endroits, plus de deux cents mètres de plages ont déjà été consumés par la mer. Olencio Simoes, du Forum des pêcheurs de Goa, explique que la décision du gouvernement est liée au projet « SagarMala », destiné à moderniser les ports à travers toute la péninsule indienne. Cette opération comprend plus de 400 projets liés au développement de nouveaux ports ou à la modernisation des ports, dont la fin des travaux est prévue d’ici 2035 pour un coût total de 114 milliards de dollars. Les lois de zonage du littoral, votées il y a déjà presque dix ans, ont été votées à l’origine pour protéger les communautés du littoral en préservant l’environnement et en soutenant le développement durable.
(Avec Ucanews, Panaji)
CRÉDITS
Bosco Eremita / Ucanews