Eglises d'Asie

Les persécutions des chrétiens ravivées sous le nouveau mandat du BJP

Publié le 29/06/2019




Alors que le Premier ministre Narendra Modi prêtait serment le 30 mai, au début de son second mandat après sa victoire aux dernières élections nationales indiennes, de nombreux cas de violences contre les chrétiens ont été rapportés, notamment dans les États du Karnataka, du Jharkhand, de l’Haryana, du Maharashtra, du Tamil Nadu et de l’Uttar Pradesh. Selon l’organisation Portes Ouvertes, l’Inde est classée au 10e rang des pays les plus dangereux pour les chrétiens. Allen Brooks, un responsable chrétien de l’État d’Assam, affirme que ces injustices sont constatées en particulier dans les États dirigés par le BJP, où la police, les lois et l’administration civile sont manipulées contre les minorités.

Alors que le Premier ministre Narendra Modi a commencé son second mandat après avoir mené son parti du BJP (Bharatiya Janata Party) à la victoire lors des dernières élections nationales, des cas de violences contre la minorité chrétienne ont été déplorés. Les chrétiens semblent subir une nouvelle vague de menaces de la part des groupes nationalistes hindous, depuis que le parti pro hindou du BJP a maintenu sa place au pouvoir en mai. « En remportant un second mandat, la victoire du BJP a stimulé les groupes extrémistes, qui continuent de menacer les minorités dans le pays, affirmant que l’Inde appartient exclusivement aux hindous », regrette le militant chrétien A. C. Michael, membre de la branche indienne de l’ONG Alliance Defending Freedom. Le BJP a remporté 303 sièges sur 545 au sein du Parlement indien, dans une large victoire, lors des élections nationales d’avril et mai dernier, après la fin du premier mandat de Narendra Modi qui avait débuté en mai 2014. Selon A. C. Michael, plusieurs attaques contre des chrétiens ont été rapportées dans les États du Karnataka, du Jharkhand, de l’Haryana, du Maharashtra, du Tamil Nadu et de l’Uttar Pradesh, seulement deux semaines après le début du nouveau mandat de Narendra Modi. Le 30 mai, alors que ce dernier prêtait serment en tant que Premier ministre, la police de l’Uttar Pradesh, dans le nord de l’Inde, a détenu le pasteur Roopsen Paswan, de l’Assemblée de l’Église des croyants dans le district de Rai Bareli. Le pasteur était accusé d’avoir maintenu l’organisation d’une assemblée malgré des ordres de dispersion. Selon les responsables de la communauté, il a été libéré sous caution le même jour, avec un avertissement lui demandant de ne plus organiser de célébrations dans le district. Le 2 juin, plusieurs groupes hindous ont demandé aux pasteurs de Jagannath Nagar, dans l’État de Maharashtra, de ne pas organiser de célébrations le dimanche. Les pasteurs ont été menacés de violences dans le cas contraire. Un pasteur et sa femme ont également été enlevés par un groupe de 150 militants hindous, qui sont entrés dans une église durant les célébrations dominicales, dans la région de Moradabad dans l’Uttar Pradesh. Ils ont été relâchés après l’intervention des anciens du village, après avoir reçu l’ordre de ne plus organiser de célébrations à cet endroit. « Ce ne sont pas des attaques isolées. Ces violences font partie d’une stratégie à grande échelle lancée par les groupes nationalistes hindous, destinée à terroriser les minorités, en particulier les chrétiens, et à en faire des citoyens de second rang », estime Peter Sony, un militant basé à New Delhi. « Ils pensent que les chrétiens et les musulmans ne sont pas Indiens, mais des colons étrangers qui doivent rester à leur place. » Peter affirme que de nombreux citoyens craignent que la Constitution indienne ne soit modifiée pour favoriser une hégémonie hindoue.

Le gouvernement reste imperturbable

Les groupes hindous qui soutiennent le BJP affirment que l’Inde est la terre des hindous, et que les minorités religieuses doivent accepter leur domination s’ils veulent y vivre. Portes Ouvertes, une ONG internationale qui défend les chrétiens persécutés pour leur foi, a classé l’Inde au 10e rang des pays les plus dangereux pour les chrétiens. Patsy David, également membre de l’ONG Alliance Defending Freedom, assure que le gouvernement reste silencieux face aux attaques des hindous contre les chrétiens, parce que cela soutient l’idée d’une Inde exclusivement hindoue. « Si une maison chrétienne est attaquée par un groupe hindou et que l’affaire est signalée, la police a tendance à arrêter les plaignants, voire à les menacer d’être chassés du village. C’est arrivé de nombreuses fois », explique-t-il. David affirme que beaucoup de chrétiens restent isolés dans les villages, et que certains ne peuvent même pas utiliser les centres de soins ou accéder à la source d’eau potable du village. Allen Brooks, un responsable chrétien laïc basé dans l’État d’Assam, dans l’est de l’Inde, estime que ces injustices sont constatées en particulier dans les États dirigés par le BJP. Selon lui, la police, les lois et l’administration civile sont utilisés habilement contre les chrétiens. Allen Brooks pense notamment à des cas de harcèlement comme l’arrestation d’une Missionnaire de la Charité, accusée de trafic d’enfants l’an dernier, ou les enquêtes qui se poursuivent contre la communauté fondée par sainte Teresa de Calcutta pour vérifier si des dons ont été utilisés pour des conversions forcées. Selon Allen, même des hôpitaux et des écoles catholiques ont été accusés d’avoir violé les lois anti-conversion, qui existent dans sept États indiens. Malgré les accusations de conversions forcées, aucun chrétien n’a jamais été condamné, et la communauté chrétienne est restée stable, à près de 3 % de la population indienne. Selon le dernier recensement de 2011, le pays compte 966 millions d’hindous, soit 80 % de la population, et 172 millions de musulmans, soit 14 % de la population. Les chrétiens sont 29 millions, soit 2,3 %.

(Avec Ucanews, New Delhi)


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