Eglises d'Asie

Les Philippines face au manque d’accès à l’eau et à l’assainissement

Publié le 22/03/2023




L’accès à l’eau potable et à l’assainissement s’est peu amélioré au cours des dernières années aux Philippines, selon un rapport. En 2021, près de 52 % de la population, soit environ 57 millions d’habitants, étaient affectés par le problème. L’organisation Water.org explique que « le pays s’urbanise rapidement et les villes grandissantes peinent à fournir aux nouveaux résidents une distribution d’eau adéquate ». La situation est attribuée principalement à la corruption et à la pauvreté.

Des habitants de Manille attendent devant un point d’eau potable.

« Nos dirigeants, depuis plusieurs années, promettent qu’ils vont améliorer la distribution d’eau potable. Mais pour l’instant, il y a à peine ce qu’il faut pour nous, nos animaux et nos plantes », explique Rolando Laceda, âgé de 56 ans, un habitant de Guinobatan Albay, au sud de Manille. Ce père de trois enfants confie que dans son quartier, les ressources en eau sont disponibles seulement entre 4 et 7 heures du matin, puis à nouveau à 23 heures.

« Je me lève tôt pour mettre de l’eau de côté dans cinq grands seaux, mais ce n’est pas assez parce que mes trois enfants doivent pouvoir se laver avant d’aller à l’école », poursuit-il. Il ajoute que ses enfants utilisent presque toute l’eau qu’il prépare le matin. « En général, je prends un bain vers minuit », précise-t-il. Il travaille dans un magasin de vente et de réparation de chaussures, et sa femme gagne également de l’argent en vendant des gâteaux. Malgré la qualité instable du service, Rolando paie plus de mille pesos philippins (17 euros) par mois pour pouvoir accéder à la distribution d’eau.

On compte de nombreuses familles semblables aux Philippines, affectées par le manque d’eau potable. Sevillo David Jr, directeur du Conseil national des ressources en eau (National Water Resource Board), reconnaît que près de 11 millions de familles sont touchées par le problème dans le pays, et que beaucoup d’entre elles sont forcées d’utiliser des « sources non protégées » comme des puits et des canaux.

Selon les chiffres officiels de 2020, les Philippines comptaient alors 26,3 millions de familles. Sevillo David explique que la situation force certaines familles à faire leurs besoins dehors, ce qui aggrave les risques de pollution de l’eau et des sols. « Ils n’ont pas le choix bien sûr, s’il n’y a pas d’eau », ajoute-t-il.

La corruption et la pauvreté parmi les causes du manque d’accès à l’eau potable

La situation ne s’est que peu améliorée au cours des dernières années. En 2021, sur 109 millions d’habitants, 52 % d’entre eux (soit environ 57 millions) ont été affectés par le manque d’accès à l’eau potable, selon l’organisation Water.org. Dans un rapport, le groupe a affirmé que « 43 millions d’habitants [soit 39 %] n’ont pas accès à des équipements sanitaires sûrs et à domicile ». « Malgré le développement du pays, les Philippines font face à des difficultés importantes en termes d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. Le pays s’urbanise rapidement, et les villes grandissantes peinent à fournir aux nouveaux résidents une distribution d’eau adéquate », poursuit l’organisation.

La corruption est citée parmi les causes du manque d’accès à l’eau et à l’assainissement. Les Philippines ont été classées 116e sur 180 pays par l’Indice de perception de la corruption 2022 établi par l’ONG Transparency International. En 2019, Cyril Ramos, un avocat engagé contre la corruption, a déclaré que le pays avait perdu près de 700 milliards de pesos à cause de la corruption (11,9 milliards d’euros), soit environ 20 % du budget national annuel.

La pauvreté est également facteur aggravant. L’Agence nationale des statistiques a signalé l’an dernier qu’environ 18,1 % des Philippins, soit environ 19,9 millions d’habitants, vivent sous le seuil de pauvreté. Mgr Jose Colin Bagaforo, évêque de Kidapawan et directeur de la Caritas nationale, souligne de son côté que la crise de l’accès à l’eau et à l’assainissement est un problème sérieux, et que son organisation est impliquée dans plusieurs projets depuis 2015, notamment des constructions de puits. « Plus de 50 000 habitants en ont bénéficié. Mais nous mettons avant tout l’accent sur les régions qui ont été touchées par les typhons et qui n’ont vraiment aucun accès à l’eau potable. Nous ne pouvons pas régler cette crise tout seuls », a-t-il expliqué. « Il y a encore beaucoup à faire. »

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Marissa Carbonel / Ucanews