Eglises d'Asie

Les responsables chrétiens de l’Uttar Pradesh repoussent des accusations de conversions forcées

Publié le 08/02/2020




Suite à une accusation de conversions forcées par le groupe VHP (Vishwa Hindu Parishad, ou Assemblée mondiale des Hindous) contre les responsables chrétiens de l’État de l’Uttar Pradesh, dans le nord de l’Inde, les chrétiens ont vivement protesté et repoussé les accusations. Ils dénoncent une période trouble qui traverse le pays, au cours de laquelle n’importe quel groupe ou individu peut porter de telles accusations, sans aucun fondement, en tentant de diviser la population selon la caste ou la religion. Avec presque 200 millions d’habitants, l’Uttar Pradeshh est l’État le plus peuplé du pays, pour seulement 350 000 chrétiens soit 0,18 % de la population. En comparaison, dans l’ensemble du pays, les chrétiens représentent environ 2,5 % de la population indienne.

Des catholiques en prière, à New Delhi durant un concours biblique.

Une organisation hindoue de l’État de l’Uttar Pradesh, dans le nord de l’Inde, a accusé les missionnaires chrétiens de conversions forcées, une accusation repoussée comme sans fondement par les responsables catholiques de la région. Le groupe Vishwa Hindu Parishad (VHP, ou Assemblée mondiale des Hindous), a identifié trente localités situées dans huit districts, dans l’est de l’Uttar Pradesh, où des conversions forcées par des missionnaires chrétiens se produiraient. Les districts concernés sont ceux de Sonebhadra, Mirzapur, Chandauli, Varanasi, Prayagraj, Kaushambhi, Amethi et Jaunpur. Le groupe VHP a déclaré vouloir mettre fin aux conversions forcées d’ici 2024. « Il n’y a rien de vrai dans cette accusation. Alors que nous traversons une période où des groupes tentent de diviser les gens selon la caste ou la religion, n’importe qui peut affirmer ce genre de choses », a déclaré Mgr Raphy Manjaly, évêque d’Allahabad. « Tout d’abord, l’Église en Inde ne défend ni n’encourage les conversions religieuses. Si vraiment cela s’est produit, qu’ils le prouvent et nous verrons ce que nous pouvons faire. Mais cela n’arrivera pas parce qu’il n’y a aucune preuve », ajoute-t-il. « Ces rapports de conversions sont sans fondement et trompeurs. Cela dit, nous devons être très prudents et attentifs, parce qu’ils usent de nombreuses manœuvres au nom du Ghar Wapsi [reconversion]. »

Seulement 0,18 % de la population de l’Uttar Pradesh

Le groupe VHP affirme que la liste en question a été définie sur la base des rapports reçus par des activistes. L’organisation a annoncé le lancement prochain d’une campagne massive pour convaincre les hindous qui auraient été convertis au christianisme. Le 2 novembre, la commission juridique de l’État de l’Uttar Pradesh a soumis un rapport au ministre en chef Yogi Adityanath, en proposant une nouvelle loi contre les conversions forcées. Le chef de la commission, le juge Aditya Nath Mittal, a affirmé auprès des médias locaux que « la loi actuelle n’est pas suffisante contre le problème et qu’il faut une nouvelle législation dans l’État de l’Uttar Pradesh ». Avec presque 200 millions de personnes, l’Uttar Pradesh est l’État indien le plus peuplé. Il compte près de 350 000 chrétiens, qui représentent seulement 0,18 % de la population. En comparaison, dans l’ensemble du pays, les chrétiens représentent en moyenne près de 2,5 % de la population indienne. L’Uttar Pradesh, comme le gouvernement fédéral, est dirigé par le BJP (Bharatiya Janata Party), le parti nationaliste hindou, et proche du mouvement militant nationaliste hindou du RSS (Rashtriya Swayamsevak Sangh). Les nationalistes hindous accusent souvent les chrétiens de recourir à la force ou à des manœuvres « sournoises » pour convertir les gens. Les responsables chrétiens expliquent que les lois anti-conversion ont été votées près de deux décennies après l’indépendance indienne, dans le but de contrôler la conversion des hindous au christianisme ou à l’islam. Malgré ces lois, aucun chrétien n’a été condamné pour conversion forcée, malgré les plaintes déposées au fil des décennies.

Lois anti-conversion

Beaucoup de ces affaires viennent de villages du nord du pays, où des groupes hindous affirment que le travail missionnaire chrétien dans les domaines de l’éducation et de la santé est trompeur et mené dans l’unique but de convertir les gens. En 2018, l’Uttarakhand est devenu le neuvième État du pays à voter des lois contre les conversions religieuses (après l’Arunachal Pradesh, l’Odisha, le Madhya Pradesh, le Chhattisgarh, le Gujarat, l’Himachal Pradesh, le Jharkhand and le Tamil Nadu). De telles lois exigent de déposer un acte de conversion pour informer les autorités, un mois avant la cérémonie. Elles pénalisent également les conversions par des moyens mensongers, par la force ou la tromperie – passibles d’amendes et de peines de prison. Le révérend Peter Balder, de l’Église du Nord de l’Inde (ENI), assure qu’il n’a entendu parler d’aucune conversion religieuse. « Assister à une célébration ou à une rencontre de prière n’est pas une preuve de conversion », ajoute-t-il. A. C. Michael, ancien membre de la Commission des minorités de Delhi, accuse le groupe VHP de « déclarer la guerre au christianisme ». « C’est un fait que depuis que le ministre en chef Yogi Adityanath est arrivé au pouvoir ici, les chrétiens ont subi de nombreux cas de violences. Des pasteurs et des membres de l’Église qui ont organisé des célébrations tout à fait paisibles ont été battus sans pitié, y compris des femmes et des enfants », dénonce-t-il. « Presque une centaine d’églises ont été fermées au cours des deux ou trois dernières années. Des pasteurs ont été arrêtés au milieu de la nuit comme des terroristes, pour les empêcher de présider les célébrations dominicales. Cette nouvelle initiative risque d’encourager les violences contre les chrétiens. »

(Avec Ucanews, New Delhi)


CRÉDITS

Bijay Kumar Minj / Ucanews