Eglises d'Asie

Les transfuges nord-coréens victimes de discriminations en Corée du Sud

Publié le 04/02/2023




Selon une nouvelle étude de la fondation Korea Hana (KHF) sur l’intégration sociale des réfugiés nord-coréens en 2022, menée auprès de 2 198 personnes sur les quelque 30 000 transfuges résidant en Corée du Sud, près de 19,5 % des répondants ont reconnu avoir subi différentes sortes de discriminations de la part des Sud-Coréens depuis leur installation. Le rapport cite en premier lieu des préjugés liés à l’accent nord-coréen, au mode de vie et au comportement, ainsi qu’aux compétences et aptitudes professionnelles.

Kim Hong-kyun, un réfugié nord-coréen, s’est installé en Corée du Sud et dirige un commerce de transports. Un transfuge sur cinq subirait des discriminations dans le pays.

Selon une nouvelle étude, les transfuges nord-coréens résidant en Corée du Sud subissent des discriminations à cause de la barrière de la langue et des images négatives sur leur pays d’origine, ce qui entraîne chez nombre d’entre eux des souffrances psychologiques.

Dans son enquête 2022 sur l’intégration sociale des réfugiés nord-coréens, dont les résultats ont été partagés le 1er février par le média catholique local CPBC (Catholic Peace Broadcasting Corporation), la fondation KHF (Korea Hana Foundation) constate qu’un transfuge nord-coréen sur cinq subit des discriminations à cause de « sa façon de parler, son mode de vie et son attitude ».

Park Joo-myung (le nom a été modifié pour respecter son anonymat), âgé de 43 ans, estime que malgré le soutien et les avantages fournis par la Corée du Sud pour qu’il puisse s’installer, son accent nord-coréen est un facteur de discrimination. « Je me suis senti vraiment isolé à cause de mon accent nord-coréen. Donc je n’ai pas d’autre choix que de réagir fortement à la moindre réflexion », explique-t-il.

KHF est une ONG qui a été établie par le ministère de l’Unification en 2010 afin d’aider les transfuges à s’installer grâce à différents projets. Dans son enquête annuelle de 2022, menée auprès de 2 198 réfugiés sur les quelque 30 000 transfuges nord-coréens que compte le pays, l’organisation note que 19,5 % des répondants reconnaissent subir différentes sortes de discriminations, selon CPBC. Ce chiffre était de 16,1 % en 2021.

Parmi les facteurs de discrimination, l’étude cite en premier lieu (44,2 % des répondants) des questions de langage, de mode de vie et de comportement. En deuxième position, on compte aussi une « perception négative sur l’existence des Nord-Coréens » parmi les Sud-Coréens. En troisième lieu (20,4 %), le rapport indique un préjugé sur les Nord-Coréens qui « manqueraient de qualifications en termes de compétences et d’aptitudes professionnelles ».

« J’essaie de me construire de nouveaux souvenirs et de préparer un avenir »

Les répondants se sont vus proposer de multiples options afin de mieux comprendre les types de discrimination qu’ils rencontrent. Kim Seong-gyeong, un professeur de l’Université des études nord-coréennes, remarque que si les Sud-Coréens savent se montrer accueillants envers les transfuges, ils changent toutefois de comportement et deviennent discriminants quand il s’agit de les embaucher. « À cause des discriminations et de l’exclusion sociale qu’ils subissent, certains refusent de parler de leurs origines nord-coréennes. Ce n’est pas quelque chose qui est difficile à dépasser », confie Kim.

Parmi les répondants à l’enquête, 85,9 % de ceux qui sont âgés de 20 et 50 ans ont pu participer à des activités économiques. Malgré tout, les pressions liées à leur réinstallation et aux discriminations ont pu entraîner des souffrances psychologiques, confie sœur Jean Mariange, directrice du centre catholique Seed of Peace (« Grain de paix »), basé à Uijeongbu (dans la province du Gyeonggi, dans la banlieue nord de Séoul, la capitale). « Beaucoup de réfugiés nord-coréens ont des problèmes psychologiques comme des dépressions, et beaucoup d’entre eux vivent de manière isolée », insiste la religieuse.

L’étude montre aussi une tendance suicidaire parmi les transfuges (11,9 des répondants), soit plus du double de la moyenne nationale (5,7 %). En 2021, ce chiffre était de 13,3 %. Cependant, Park Joo-myung et beaucoup d’autres transfuges estiment que si les préjugés et autres idées fausses sur eux diminuent, ils pourront s’installer plus facilement en Corée du Sud. « Je crois que je peux vivre en paix si je peux être en harmonie avec cette société. J’essaie de me construire de nouveaux souvenirs et de préparer un avenir », ajoute-t-il.

L’Église locale soutient l’accès à l’éducation et au logement des transfuges

L’Église catholique locale et plus d’une dizaine de ses institutions ont été parmi les premiers à soutenir les réfugiés nord-coréens. Le père Choi Joon-gyu, directeur de l’Université catholique de Corée, explique que l’université offre différentes bourses d’étude afin de soulager le poids financier des transfuges qui entreprennent des études dans le pays. « Eux aussi veulent aller à l’université et étudier pour mieux s’installer, mais la situation reste difficile », confie le prêtre. « Même si vous venez en Corée pour étudier, c’est difficile de se concentrer sur les études quand vous devez aussi travailler tard le soir pour gagner de l’argent. »

Depuis 2017, l’université catholique offre donc une aide financière de 500 000 wons (370 euros) par mois, en comptant des frais de scolarité et de logement, aux étudiants nord-coréens. Plus de dix congrégations religieuses sud-coréennes gèrent aussi des foyers et des aides au logement afin de les aider à s’installer.

En 2010, les franciscains ont notamment fondé la « Communauté Hanuri », où les transfuges masculins de plus de 18 ans peuvent être logés et devenir autonome en accédant à l’emploi en Corée du Sud. Le père Kim Kwon-soon, responsable de l’initiative, espère que le séjour des réfugiés dans la communauté les aidera « non seulement à s’adapter à la Corée du Sud » mais aussi à devenir une force qui pourra contribuer « à unir le Nord et le Sud une fois que l’unification sera établie ».

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Korea Hana Foundation / Ucanews