Eglises d'Asie

Liberté religieuse : une pétition rassemble plusieurs personnalités indiennes contre les lois anti-conversion

Publié le 15/02/2022




Plusieurs personnalités indiennes ont signé une pétition lancée par le National Solidarity Forum (NSF) contre les lois anti-conversion, votées dans plusieurs États comme l’Uttar Pradesh, le Gujarat et le Madhya Pradesh, tous dirigés par le parti pro-hindou du BJP. « Les attaques sur les minorités ont fortement augmenté ces dernières années, depuis que ces lois sont utilisées contre la dignité des chrétiens et des musulmans, en particulier des femmes, des Dalits et des Adivasis », estiment les participants dont Mgr Pierre Machado, archevêque de Bangalore.

Des chrétiens du nord-est de l’Inde manifestent à New Delhi en août 2017.

Une nouvelle pétition contre les lois anti-conversion, lancée par le forum NSF (National Solidarity Forum) – un réseau de divers groupes et particuliers formé en 2007-2008 suite aux émeutes antichrétiennes de Kandhamal –, a rassemblé plusieurs citoyens indiens reconnus comme Margaret Alva (ancien gouverneur des États de Goa, du Gujarat, du Rajasthan et de l’Uttarakhand). Ces derniers ont demandé la suppression de toutes les lois anti-conversion dans le pays, alors que l’État du Karnataka, dans le sud du pays, se prépare à son tour à mettre en œuvre sa propre loi contre les conversions religieuses.

La loi sur la protection du droit à la liberté de religion du Karnataka (2021), votée par l’assemblée législative de l’État le 24 décembre dernier, devrait passer devant la chambre haute d’ici la fin du mois. « Quels que soient les lieux où passent les lois anti-conversion, ironiquement appelées ‘lois sur la liberté religieuse’, elles deviennent une justification pour la persécution des minorités et des autres communautés marginalisées », déplore la pétition.

« Les attaques sur les minorités ont fortement augmenté ces dernières années, depuis que cette loi a été utilisée comme arme contre la dignité des chrétiens et des musulmans, en particulier des femmes et parmi ceux qui appartiennent aux communautés Dalits et Adivasis », a souligné la pétition, adressée au président indien Ram Nath Kovind. Parmi les signataires, on compte également l’amiral Laxminarayan Ramdas, ancien chef de la Marine indienne ; Mallika Sarabhai, danseuse et chorégraphe ; Medha Patkar, une militante sociale ; Mani Shankar Aiyar, membre du parti du Congrès ; ainsi que Mgr Pierre Machado, archevêque de Bangalore.

La pétition appelle à l’unité pour défendre les valeurs soutenues par la Constitution indienne, pour la protection des droits des minorités et des autres communautés marginalisées dans le pays. Ram Punyani , responsable et militante du forum NSF, évoque des attaques irrégulières et dispersées contre les chrétiens à travers le pays, sous prétexte de lutter contre des conversions forcées – alors que le recensement national indique une baisse de la proportion de chrétiens, de 2,6 % en 1971 à 2,3 % en 2011. Pour Ram Punyani, ces lois anti-conversion servent à intimider les communautés chrétiennes.

Les chrétiens représentent 1,87 % de la population au Karnataka

De son côté, Margaret Alva appelle le NSF à redoubler d’efforts afin de dissuader le gouvernement du Karnataka de mettre en œuvre sa loi anti-conversion. « Je vous appelle à signer cet appel à retirer la loi antichrétienne et d’autres lois similaires dans d’autres États du pays », a-t-elle demandé. John Dayal, membre fondateur du NSF, ajoute que ces lois affectent non seulement les chrétiens mais aussi les musulmans, les Dalits (intouchables), les Adivasis (indigènes) et les femmes indiennes.

Pour Brinnelle D’Souza, membre du département santé et santé mental au sein de l’Institut Tata de sciences sociales, ces lois « cherchent à renforcer les conflits religieux et le nationalisme de la majorité hindoue en Inde ». « De plus, elles infantilisent les pauvres et donnent du pouvoir à l’État sur des choses pourtant profondément personnelles », dénonce-t-elle. « Ces lois méprisent également les femmes en imposant des restrictions sur le choix d’un conjoint. Elles correspondent à un état d’esprit partant du principe qu’en Inde, les femmes ne sont pas en mesure de penser et d’agir par elles-mêmes. Ce sont des lois hautement patriarcales, ce n’est pas acceptable », ajoute Vidya Dinkar membre de l’équipe dirigeante du NSF.

La nouvelle loi du Karnataka rend les infractions pour conversion religieuse non susceptibles de libération sous caution, avec des peines allant jusqu’à dix ans de prison et 50 000 roupies (585 euros) d’amende. Des lois similaires ont été votées ou proposées dans d’autres États indiens comme l’Uttar Pradesh, le Gujarat, le Madhya Pradesh et l’Himachal Pradesh, tous dirigés par le parti pro-hindou du BJP (Bharatiya Janata Party), qui dirige également le Karnataka. Les chrétiens représentent environ 1,87 % de la population de l’État, sur 68,4 millions d’habitants.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Bijay Kumar Minj / Ucanews