Eglises d'Asie

L’Inde rétrogradée en nation « partiellement libre », selon le rapport de l’ONG Freedom House

Publié le 10/03/2021




Selon le nouveau rapport de l’ONG américaine Freedom House, l’Inde du Premier ministre Narendra Modi chute dans la catégorie des nations « partiellement libres », pour la première fois depuis 1997. Ce rapport, qui évalue les droits et les libertés politiques dans le monde, a ainsi rétrogradé le statut de l’Inde de pays « libre » à celui de pays « partiellement libre ». Il pointe en particulier les atteintes croissantes à la liberté d’expression depuis l’arrivée au pouvoir, en 2014, de Narendra Modi et de son gouvernement nationaliste hindou.

En août 2017, des chrétiens du nord-est de l’Inde manifestent à New Delhi.

Intitulé « Democracy under siege » (« la démocratie assiégée »), le rapport annuel de l’ONG Freedom House met en lumière une évolution mondiale inquiétante, marquée par « une forte modification des équilibres internationaux entre forces démocratiques et autoritaires ». Le nombre de pays appartenant à la catégorie « non libre » est à son plus haut niveau depuis 2006. Et l’évolution de l’Inde, la plus grande démocratie du monde avec 1,3 milliard d’habitants, se caractérise par « une chute de sa position dans les hauts rangs des nations libres », ce qui pourrait affecter les critères démocratiques à travers le monde.

D’après ce rapport, les libertés se détériorent en Inde depuis l’arrivée au pouvoir, en 2014, de Narendra Modi. « Les intimidations visant les journalistes et les critiques du gouvernement ont augmenté sous Narendra Modi et son parti nationaliste hindou du BJP [Parti du Peuple indien], tout comme les attaques contre les non-hindous, résume l’ONG. Certains groupes minoritaires, notamment les musulmans, les dalits [anciennement ‘intouchables’], et les adivasis [populations aborigènes] restent économiquement et socialement marginalisés. » L’ONG souligne une « accélération » de cette tendance depuis 2019, avec « une violence croissante et des politiques discriminatoires ». Le rapport liste plusieurs évènements qui se sont déroulés en Inde en 2020, des émeutes religieuses visant des musulmans dans la capitale au recours à une loi sur la sédition pour bâillonner les voies critiques.

73 pays rétrogradés sur 210

L’ONG américaine estime que l’Inde privilégie désormais « les étroits intérêts nationalistes hindous au prix des valeurs fondatrices d’inclusion et d’égalité des droits pour tous ». Dans ce cadre, le rapport souligne notamment la répression qui vise les protestataires de la nouvelle loi sur la citoyenneté ayant introduit des critères religieux à la défaveur des musulmans, concernant la naturalisation des migrants originaires des pays voisins.

Toujours selon le rapport, la pandémie du coronavirus a intensifié la chute des libertés en Inde. Le 25 mars 2020, un confinement très strict avait paralysé l’Inde et mis à la rue les plus vulnérables. Durant plusieurs semaines, des millions de travailleurs migrants ont été pris au piège dans les grandes villes, sans soutien ni ressources, avant de prendre la route pour rentrer dans leurs villages, dans un gigantesque exode.

Dans un communiqué, les autorités indiennes ont fortement condamné ce rapport et l’ont qualifié de « mensonger, incorrect et déplacé ». New Delhi rappelle que de nombreux États de l’Inde ne sont pas dirigés par le parti nationaliste hindou du BJP, reflet d’un processus électoral libre et « d’une démocratie dynamique ». Les autorités réfutent toute répression contre les critiques et rejettent l’ensemble des accusations émises dans le rapport.

L’Inde n’est cependant pas le seul pays épinglé par le rapport de l’ONG américaine. La Chine est notamment citée pour la désinformation et la censure déployée lors de la phase initiale de la pandémie sur son sol, mais aussi les États-Unis, pointés pour un déclin démocratique sous la présidence de Donald Trump. Sur un total de 210 pays, le rapport a rétrogradé le niveau des libertés de 73 pays, qui représentent 75 % de la population mondiale. Freedom House calcule ainsi que seuls 20 % de la population mondiale vivent aujourd’hui dans des pays « libres », une proportion à son plus bas niveau depuis 1995.

(EDA / A. R.)


CRÉDITS

Bijay Kumar Minj / Ucanews