Eglises d'Asie

L’Indonésie décide d’assouplir les règles sur la construction des lieux de culte

Publié le 10/06/2023




Le 5 juin, le ministre indonésien des Affaires religieuses, Yaqut Cholil Qoumas, a annoncé vouloir réviser un décret voté en 2006 sur la construction des lieux de culte dans le pays, et considéré comme déséquilibré en faveur de la majorité musulmane. Depuis le vote du décret il y a 17 ans, plusieurs milliers de lieux de culte des groupes minoritaires ont été fermés ou n’ont pu être rénovés, dont une majorité d’églises chrétiennes, tandis que le nombre de mosquées est passé de 243 000 en 2010 à 550 000 en 2020.

Le ministre indonésien des Affaires religieuses, Yaqut Cholil Qoumas, a annoncé la réforme d’un décret de 2006 sur la construction des lieux de culte.

Le gouvernement indonésien a décidé d’assouplir les règles pour la construction des lieux de culte, dont les églises, en proposant des amendements à un décret voté il y a 17 ans et considéré comme un obstacle important pour les communautés locales. Le 5 juin, le ministre des Affaires religieuses, Yaqut Cholil Qoumas, a confirmé que le décret ministériel de 2006 sera modifié afin de répondre aux recommandations du Forum pour l’harmonie religieuse (FKUB – Forum Kerukunan Umat Beragama), qui joue un rôle de médiateur sur les questions interreligieuses dans le pays.

Selon les règles actuelles, un permis de construction d’un lieu de culte ne peut être obtenu du gouvernement qu’avec une série de recommandations dont celle du forum FKUB (dont les membres sont majoritairement musulmans). Avec les changements proposés, il suffirait d’obtenir la recommandation du ministère du gouvernement local (de la province en question) afin d’entamer la construction.

« Souvent, plus il faut de recommandations, plus c’est difficile de les obtenir », a commenté le ministre, qui fait partie de du Nahdlatul Ulama, la plus grande organisation islamique modérée en Indonésie. « On ne peut le nier », a-t-il ajouté, en évoquant de nombreuses propositions de nouveaux lieux de culte qui sont souvent rejetées dans le pays. « On peut résoudre tous les problèmes si on commence par être honnêtes, en particulier vis-à-vis de notre propre religion », a-t-il insisté.

Plusieurs milliers de permis refusés pour les minorités depuis 2006

Andreas Harsono, un chercheur de l’organisation Human Rights Watch, estime qu’en supprimant les autorisations du forum FKUB pour la construction des lieux de culte, « le gouvernement revient au principe de la liberté de religion garanti par la Constitution de 1945 ». Selon lui, la fondation du FKUB en 2006 a été problématique. « La minorité devait se soumettre à la majorité. Cela ne correspond pas au principe de la liberté de religion qui suppose que tous les citoyens bénéficient des mêmes droits dans leur pratique religieuse, quelle que soit leur religion. »

Par ailleurs, étant représentatif de la population, le forum a toujours compté une majorité de membres musulmans. « À Jakarta, 83 % des 21 membres du FKUB sont musulmans. Par conséquent, les décisions prises par le forum reflètent souvent un veto de la majorité », assure Andreas. Selon lui, depuis 2006, on compte plusieurs milliers de lieux de culte des groupes minoritaires qui ont été fermés ou dont les permis de rénovation ont été refusés. La plupart d’entre eux sont des églises, parce que les chrétiens forment la plus grande minorité religieuse en Indonésie, tandis que le nombre de mosquées est passé de 243 000 en 2010 à 550 000 en 2020, selon les chiffres du ministère des Affaires religieuses.

Les minorités religieuses ont salué la décision du gouvernement. Le pasteur Palti Pandjaitan, du groupe Solidarité pour les victimes de violations de la liberté de religion et de croyance Solidarity (Solidarity Group for Victims of Violations on Freedom of Religion and Belief), interrogé le 8 juin, estime que la nécessité d’obtenir 60 signatures de la part d’habitants du voisinage doit également être réformée. Pour lui, certains d’entre eux pourraient être intolérants ou opposés à la construction d’une église. Le père Antonius Benny Susetyo, prêtre catholique, pense quant à lui que les permis de construction ne devraient être obligatoires que pour les lieux de culte publics et permanents. « Les lieux de culte qui sont utilisés de manière limitée ne devraient pas avoir besoin d’autorisation, comme les chapelles des couvents ou les salles de prière dans les maisons familiales. »

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

The Ministry of Religion Affairs / Ucanews