Eglises d'Asie – Indonésie
Nusa Tenggara : les efforts des autorités civiles et religieuses pour mieux intégrer les personnes handicapées
Publié le 26/08/2021
Après avoir obtenu son diplôme au sein d’une école privée l’an dernier, Kristina Viani Varnilan a choisi de quitter son village de l’île de Flores, majoritairement chrétien, pour aller gagner sa vie à Makassar, dans la province du Sulawesi du Sud. Elle a pris cette décision pour pouvoir aider sa famille. Aînée de quatre enfants, Kristina Varnilan, âgée de 20 ans, est devenue la principale source de revenus pour ses proches depuis que son père, Siprianus Judin, 45 ans, a commencé à présenter des signes de maladie mentale. Sa mère, Birgita Gimbul, était déjà atteinte de problèmes mentaux et ne peut pas travailler. Pour que Kristina puisse partir à Makassar, son frère de 17 ans a dû quitter l’école afin de s’occuper de leurs parents et de leurs deux autres frères et sœurs, âgés de 13 et 10 ans.
« À Makassar, j’ai travaillé comme domestique en gagnant un salaire de 1,2 million de roupies (70,81 euros) par mois, que j’ai envoyé à ma famille », explique-t-elle. Toutefois, neuf mois plus tard, elle a reçu un appel urgent de sa famille, lui demandant de revenir, l’état de son père empirant. En juin dernier, elle a donc démissionné afin de rentrer dans son village de Wuwur, dans la province des Petites îles de la Sonde orientales (Nusa Tenggara). Kristina Varnilan explique que l’état de son père empire de jour en jour, qu’il quitte souvent la maison et qu’il est parfois agressif et menaçant envers les autres villageois. Début août, il a même frappé un voisin et tué deux de ses porcs avec une machette. Le père a donc dû être attaché par sa famille. « C’était déchirant, mais nous n’avions pas le choix, nous devions assurer la sécurité de nos voisins », assure Kristina.
De nombreuses initiatives contre la pratique de l’enchaînement
Le fait d’attacher voire d’enchaîner des patients atteints de handicaps mentaux est toujours une pratique courante en Indonésie, bien qu’illégale, ces personnes étaient considérées comme dangereuses pour les autres dans les villages ruraux du pays. Une pratique qui repose sur une certaine ignorance des populations locales concernant les maladies mentales, nombre d’habitants ignorant que certaines conditions peuvent être soignées ou contrôlées. Les handicapés mentaux sont donc enfermés, parfois jusqu’à leur mort. Ces dernières années, de nombreuses initiatives ont été lancées par différents groupes et militants, y compris au sein de l’Église catholique indonésienne, afin de lutter contre ces pratiques. Pour Kristina Varnilan et ses proches, leur situation les a forcés à travailler dans les champs afin de survivre et nourrir leurs parents. « Nous préparons les repas et nous nous occupons de laver notre père à tour de rôle », confie-t-elle.
Leur famille a cependant obtenu des aides alimentaires et financières quand leur histoire a été racontée sur un site d’information local. Les autorités locales ont également réagi rapidement. Le 19 août, le chef du district de Manggarai, Herybertus Nabit, ainsi que son adjoint Heribertus Ngabut, ont visité leur maison au village de Wuwur en proposant d’accueillir les deux parents au Centre de Réhabilitation de Renceng Mose, à Ruteng, dirigé par la congrégation des Frères de la Charité. « Les coûts seront intégralement couverts par le gouvernement », a assuré le chef de district. Il a également confié que dès cette année, le gouvernement local réservera un budget spécial pour le traitement des personnes handicapées vivant dans le district.
Le jour suivant, Kristina Varnilan a également obtenu de l’aide de la Fondation Saint-Paul du diocèse de Ruteng, qui dirige l’université catholique de Saint-Paul Ruteng. La fondation lui a offert une bourse pour se former au métier de sage-femme. Le père Ledobaldus Roling Mujur, responsable de la fondation, a assuré que tous les frais d’étude seront couverts par la fondation. « On peut espérer qu’avec cette qualification, elle pourra mieux prendre soin de sa famille à l’avenir. » Kristina se réjouit, de son côté, que ses prières aient été entendues. « Je profiterai au maximum de cette opportunité. Cela m’a vraiment manqué de ne pas aller à l’université l’an dernier quand j’ai terminé le lycée, mais qu’aurais-je pu faire d’autre alors que mes parents avaient besoin d’aide ? » Elle ajoute qu’aujourd’hui, elle doit aussi s’occuper de ses jeunes frères et sœurs et veiller sur leur éducation.
(Avec Ucanews)
CRÉDITS
Ucanews