Eglises d'Asie

Plus de 2 000 chrétiens indiens rassemblés à New Delhi contre les violences religieuses

Publié le 21/02/2023




Le 19 février à New Delhi, plus de 2 000 chrétiens indiens de presque 79 confessions différentes ont manifesté contre la hausse des violences religieuses envers les minorités chrétiennes en Inde. Ils ont demandé au gouvernement fédéral, au pouvoir judiciaire et à la société civile d’agir concrètement contre les atrocités commises, en particulier dans les États de l’Uttar Pradesh, du Chhattisgarh, du Madhya Pradesh, de l’Uttarakhand, du Karnataka et du Jharkhand, dont la plupart ont voté des lois anti-conversion radicales.

Le 19 février à New Delhi, plusieurs milliers de chrétiens ont manifesté contre l’augmentation des violences religieuses dans le pays.

Plusieurs milliers de chrétiens indiens, représentant presque 79 confessions différentes, ont organisé une manifestation dans la capitale, ce dimanche 19 février, contre l’augmentation du nombre de violences envers les minorités religieuses dans le pays.

Plus de 2 000 personnes ont ainsi voulu demander au gouvernement fédéral, au système judiciaire et à la société civile d’agir concrètement contre les atrocités commises, avec une préoccupation particulière pour celles qui ont lieu dans les États de l’Uttar Pradesh, du Chhattisgarh, du Madhya Pradesh, de l’Uttarakhand, du Karnataka et du Jharkhand. La plupart de ces États, dirigés par le parti pro-hindou du BJP (Bharatiya Janata Party – « Parti du peuple indien »), ont en effet voté des lois anti-conversion radicales.

« Notre Premier ministre parle de sabka saath, sabka vikas’ [des efforts collectifs pour une croissance inclusive’], mais qu’arrive-t-il à la communauté chrétienne dans le pays ? La hausse des violences contre les chrétiens est une situation malheureuse », confie Anastasia Gill, ancienne membre de la Commission pour les minorités de Delhi. La religieuse ajoute que les manifestants se sont rassemblés pour attirer l’attention des différents acteurs, dont le gouvernement, la Cour suprême et la société civile, sur le sort réservé aux minorités chrétiennes indiennes.

Au moins 598 affaires de violences religieuses enregistrées en 2022

Michael William, président du Forum chrétien unifié (UCF), une organisation pour les droits de l’homme basée à New Delhi, a également expliqué devant les participants que « nous partageons l’angoisse de nos concitoyens dont les droits fondamentaux sont attaqués ». Selon l’UCF, au moins 598 affaires de violences religieuses ont été enregistrées en 2022, dont des menaces, des émeutes, des attaques brutales, des cas de vandalisme et de fermeture d’églises, des agressions sexuelles et des situations d’exclusion sociale, ainsi que de fausses déclarations dans le cadre des lois draconiennes anti-conversion.

Toutefois, dans son rapport annuel publié le 30 janvier dernier, la fédération Fiacona (Fédération des organisations chrétiennes indiennes américaines d’Amérique du Nord) a mentionné un nombre plus élevé en parlant de 1 198 affaires de violences religieuses en 2022, ce qui représente une hausse considérable de 157 % par rapport à 2021. Selon le rapport de la fédération, l’an dernier, les chrétiens indiens ont perdu près de 56 millions de dollars en coûts judiciaires et autres dépenses (liées aux afflictions psychologiques et émotionnelles causées par des attaques coordonnées contre leurs institutions et contre les fidèles).

De son côté, sœur Gill a aussi évoqué la situation de l’État majoritairement indigène (Adivasi) du Chhattisgarh, dans l’est de l’Inde, en soulignant avoir constaté une série d’attaques contre les chrétiens indigènes, accusés à tort de conversions religieuses. La religieuse a notamment raconté que le 2 janvier, une foule s’est attaquée à l’église du Sacré-Cœur de Narayanpur seulement deux semaines après l’expulsion forcée de plusieurs centaines de chrétiens Adivasis de leurs villages dans les districts de Narayanpur et de Kondagaon. Selon elle, la région de Bastar, dans le sud du Chhattisgarh, a subi une série d’attaques contre les chrétiens indigènes au cours des derniers mois.

« Nous ne comprenons pas pourquoi la police regarde sans rien dire »

Selon de nombreux militants et opposants, ces attaques sont provoquées par des individus et des groupes extrémistes qui sont liés au parti pro-hindou du Premier ministre Narendra Modi. A. C. Michael, président de la Fédération des associations catholiques de l’archidiocèse de Delhi, souligne que presque toutes les affaires enregistrées suivent le même modèle. Il s’agit toujours de « menaces, de pressions et d’agressions perpétrées par des foules en colère composées d’extrémistes religieux ».

Ces personnes bénéficient même d’un sentiment d’immunité, en étant souvent soutenues voire accompagnées par la police et les médias locaux. Ces groupes surviennent au milieu de célébrations et accusent les membres de conversions forcées. « Nous avons du mal à comprendre pourquoi la police regarde sans rien dire », poursuit A. C. Michael.

Les participants à la manifestation du 19 février, organisée peu avant des élections locales dans deux États majoritairement chrétiens du pays, ont signé une déclaration destinée au président Droupadi Murmu, premier président indien indigène. Le document est censé rappeler aux dirigeants régionaux et nationaux que le sentiment d’impunité a dépassé les limites. « Nous adresserons cette déclaration au président, au Premier ministre, au ministre de l’Intérieur et aux porte-parole des deux chambres du Parlement », renchérit sœur Gill. « Nous l’enverrons aussi à tous les ministres en chef dans le pays. »

Minakshi Singh, secrétaire général de l’organisation Unity in Compassion, basée dans l’Uttar Pradesh (l’État où a été enregistré le plus grand nombre d’attaques contre les chrétiens et où une loi anti-conversion est en vigueur), explique que par cette déclaration, les manifestants veulent assurer le droit constitutionnel à la liberté religieuse des minorités.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Bijay Kumar Minj / Ucanews