Eglises d'Asie

Sœur Lalita Meena : « Noël au milieu des chrétiens persécutés, comme la Sainte-Famille »

Publié le 31/12/2021




Ce Noël, la souffrance des chrétiens persécutés a été partagée, pour une fois, par les grands médias du pays. Malgré l’assassinat, en 1999 à Sarat, en Odisha, du père Arul Dos par des fanatiques, et malgré de nombreuses autres violences survenues depuis, la foi de l’ethnie Ho, présente dans la région, n’a pas été étouffée. Sœur Meena, supérieure d’un couvent de Sarat, témoigne du Noël 2021 vécu par la communauté locale, d’une manière proche de la Sainte-Famille, au milieu de la pauvreté et des persécutions, mais consciente de l’espérance apportée par Jésus.

Noël 2021 dans la paroisse de Sarat, dans le district de Mayurbhanj, dans l’État d’Odisha (dans l’est de l’Inde).

Dans la paroisse catholique de Sarat, dans le district de Mayurbhanj, nous avons près de 700 familles catholiques ; dans notre couvent, nous sommes quatre religieuses. C’est un village reculé d’Odisha, et il s’agit de l’ancienne paroisse du père Arul Dos, un prêtre catholique, qui a été tué avec des arcs et des flèches durant la nuit du 1er septembre 1999, par une foule de fanatiques hindous.

Nous avons une merveilleuse pastorale à Sarat. Nous sommes auprès des pauvres gens et nous nous rendons dans les villages pour visiter les familles. Elles sont toutes de l’ethnie Ho, une tribu indigène qui a sa propre langue Ho. Nous leur enseignons le catéchisme et nous les préparons aux sacrements. Nous aidons aussi les jeunes femmes et les jeunes à obtenir des emplois et à devenir indépendants financièrement.

Nous dirigeons un internat (actuellement fermé à cause des restrictions sanitaires) et nous offrons des cours de couture. Nous les aidons aussi à mieux connaître leurs droits, pour qu’ils puissent mener des vies meilleures et accéder aux différents programmes de développement et de soutien du gouvernement. Le peuple Ho mène une vie simple, pas si différente de celle de la grotte de la Nativité où le prince de la Paix est né.

Les villageois indigènes rencontrent de nombreuses difficultés. La grotte où Jésus est né sentait sans doute l’odeur des bêtes, qui avaient du fourrage et de l’eau pour la nuit, mais saint Joseph a sûrement dû la nettoyer et ajouter de la paille dans la mangeoire. Il a peut-être dû nettoyer les excréments d’animaux avec ses propres mains, d’un coin à l’autre de l’étable, sans eau pour se nettoyer. Ce qui signifie que Joseph et Marie se sont simplement mêlés aux bêtes par un froid mordant.

« Ces gens-là aussi partagent les souffrances de la famille de Joseph »

On peut imaginer les souffrances endurées par la Vierge Marie en donnant naissance à son fils premier né. Après la naissance, cette pauvre famille a dû fuir vers une terre étrangère pour se cacher. La misère de cette famille démunie, rejetée de tous à l’époque, est une image que j’aime me rappeler. J’ai le sentiment que les décorations lumineuses, les sapins de Noël, les belles crèches et les célébrations festives ne reflètent pas le vrai sens de la Nativité. Cela aurait par exemple plus de sens de rendre visite à une pauvre veuve dans un des villages, quelqu’un qui n’a pratiquement pas de quoi se nourrir, se loger et se vêtir, et lui acheter de la nourriture et des vêtements chauds afin de l’aider un peu à traverser l’hiver.

J’aime me souvenir de toutes ces personnes déplacées, tous les chrétiens persécutés qui vivent loin de leurs villages. Je connais beaucoup d’entre eux personnellement. Je me souviens de sans-abri, de personnes affamées, de filles et de femmes abusées sexuellement, d’innocents derrière les barreaux, de communautés indigènes et Dalits (intouchables) exploitées… Je crois que ces gens-là aussi partagent les souffrances et les douleurs de la famille de Joseph. Laissons l’enfant Jésus les consoler et leur donner sa puissance divine, afin qu’ils puissent faire face aux épreuves avec courage et vivre dignement.

Après la messe de minuit, durant la veille de Noël, les membres de la tribu Ho sont restés dans les villages toute la nuit, en dansant et en entonnant des chants de Noël, avant de rentrer chez eux au matin. Leurs célébrations sont communautaires. En ce temps de Noël, c’est un beau témoignage de voir Dieu vivre au milieu du peuple Ho démuni. Dans le district de Mayurbhanj, même deux décennies après le meurtre du père Arul Doss, la foi de cette communauté reste très forte. Ils savent que Jésus est venu comme l’un d’entre eux. Malgré des vies fragiles confrontées aux dangers et à l’insécurité, Jésus est venu apporter la vie et l’espérance.

(Avec Asianews)


CRÉDITS

Asianews