Eglises d'Asie – Vietnam
Des communautés vietnamiennes fêtent Noël avec les victimes des inondations
Publié le 29/12/2020
Dang Thi Xuan se lève tous les jours à 4 heures du matin pour aller acheter des fruits à quelques kilomètres de chez elle, avant de les revendre au marché de Phong Chuong. Dang Xuan, 49 ans, mère de trois enfants, tient un stand où elle vend des mangues, des bananes, des oranges, des pommes de lait et des goyaves. Elle tente d’inviter les passants à acheter ses produits, disposés à même le sol. « Les religieuses [de la congrégation des Amantes de la Croix] m’ont aidé généreusement pour cela en m’offrant 4 millions de dongs [142 €], et je gagne environ 50 000 dongs par jour [1,77 €] », explique Dang Thi Xuan, une veuve dont le mari est mort en 2015. Elle ajoute qu’à cause des tempêtes et des inondations d’octobre et novembre, elle a perdu 50 poulets, 8 porcs et une tonne de riz ; sa ferme de trois hectares a également été endommagée.
Dans la commune de Phong Chuong, dans le district de Phong Dien, dans la province de Thua Thien Hue – dans le centre du Vietnam, frappé par plusieurs typhons durant l’automne –, les inondations ont causé 4 décès et ont détruit 53 maisons. « Nous n’avons plus rien. En ce moment, pour nous nourrir, nous nous contentons de riz, de nouilles instantanées et de sauce de poisson donnés par des bienfaiteurs », souligne-t-elle. Sa fille aînée, au lycée, a dû quitter l’école pour travailler avec sa mère au marché, afin de soutenir la famille. Dang Thi Xuan explique que beaucoup de gens ont dû vendre des biens ou recourir à des emprunts coûteux afin de mieux préparer les prochaines récoltes de janvier. Selon le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, plusieurs provinces centrales du pays ont été fortement affectés par les fortes pluies et par les typhons d’octobre et novembre, qui ont causé au moins 249 décès et 57 personnes portées disparues, sans compter 241 500 maisons endommagées.
1,3 milliard d’euros de pertes à cause des inondations
Les catastrophes naturelles ont détruit 24 000 hectares de cultures et de fermes piscicoles ; près de 3,2 millions de têtes de bétail ont également péri dans les intempéries. Les pertes économiques totales ont été évaluées à près de 30 mille milliards de dongs (1,3 milliard d’euros). Truong Thi May, âgée de 36 ans, une mère de deux enfants du district de Quang Dien, confie quant à elle que son élevage de crevettes a été endommagé par les inondations. Afin de subvenir aux besoins de sa famille, elle fait traverser le fleuve sur un petit bateau qu’elle possède, et elle ramasse des escargots qu’elle peut revendre pour 15 000 dongs, afin d’acheter du riz. Ils vivent aussi grâce à des dons alimentaires, dont des nouilles instantanées. Elle explique qu’ils ont vendu leur télévision et des vêtements pour 1 million de dong (35 €) afin d’acheter des médicaments pour son cœur. Son mari, qui souffre d’épilepsie, est actuellement sans travail. « Nous remercions les sœurs catholiques qui nous rendent visite et qui nous ont offert 5 millions de dongs pour nos traitements médicaux et pour les frais de scolarité », confie-t-elle, en ajoutant que ses enfants auraient dû quitter l’école sans l’aide des religieuses.
Sœur Marie Le Thi Anh Phuong, des Filles de Notre Dame de la Visitation, explique que sa congrégation a dû réduire les dépenses en supprimant certaines fêtes de Noël prévues pour les personnes dans le besoin, afin d’utiliser l’argent économisé pour mieux soutenir les victimes des inondations, en leur permettant de fêter Noël, de réparer leurs maisons et de faire pousser leurs cultures. Habituellement, elles organisent des repas de Noël pour des centaines de personnes handicapées et de malades. Sœur Marie Phuong, âgée de 45 ans, explique que les religieuses ont également mis en contact des bienfaiteurs étrangers avec plusieurs centaines d’étudiants. Ces derniers ont besoin d’aide dans leurs études, leurs familles ayant tout perdu dans les intempéries. Leurs parents peinent à joindre les deux bouts en revendant des objets d’occasion, en vendant de la nourriture dans la rue ou en pêchant. Beaucoup de gens ne peuvent payer les réparations, et manquent de couvertures, de moustiquaires ou de vêtements pour l’hiver. Les enfants ont également besoin de livres et de fournitures scolaires.
« C’est le véritable esprit de Noël »
Les religieuses rassemblent des enfants dans leur couvent tous les samedis, notamment pour leur enseigner l’anglais. Elles organisent également des crèches vivantes tous les ans. Marie Phan Thi Lien, âgée de 30 ans, confie que durant l’avent, les membres de l’association des Filles de Notre Dame de la Visitation économisent environ 10 000 dongs par jour pour les plus démunis. Ainsi, le 21 décembre, quelques jours avant Noël, 30 membres de l’association se sont rendus dans la paroisse de Khe Sanh afin d’offrir des cadeaux de Noël aux membres de la communauté Van Kieu, affectée par les inondations. Marie Lien ajoute cependant que cette année, l’association n’a pas pu organiser de fêtes pour le jour de Noël comme tous les ans.
Le père Joseph Phan Tan Ho, responsable des œuvres caritatives de la congrégation, explique qu’avec un groupe pro-vie local, ils ont offert des cadeaux de Noël – des vêtements chauds, de la nourriture, des fournitures scolaires, des brosses à dents et du dentifrice – à plus de mille étudiants bouddhistes et catholiques. « Nous essayons de leur apporter la joie de Noël, afin de les consoler et de les encourager dans cette période difficile, parce que Jésus est venu sauver tous les hommes », explique le prêtre. Lucie Bui Thi Ha, du district de Phu Vang, fait partie des quelque 260 agriculteurs qui ont reçu du riz, de l’huile de cuisson et de la sauce nuoc-mam, lors d’une distribution organisée le 18 décembre à l’église de Mau Tai par les Filles de Marie de l’Immaculée Conception. « Nous n’avions pas les moyens de décorer notre maison et d’organiser un repas de Noël comme d’habitude, mais nous avons ressenti toute la solidarité communautaire et la sympathie de beaucoup de gens », assure Lucie Ha, âgée de 55 ans, qui vend des fruits dans la rue. « C’est le véritable esprit de Noël qui se manifeste malgré ces temps difficiles », confie-t-elle.
(Avec Ucanews, Hué)
CRÉDITS
Ucanews