Eglises d'Asie

Tokyo en deuil après le décès de Mgr Mori, artisan du dialogue de l’Église locale avec la société japonaise

Publié le 05/09/2023




Ce mardi 5 septembre, Mgr Tarcisius Isao Kikuchi, archevêque de Tokyo, a célébré les funérailles de Mgr Paul Kazuhiro Mori, évêque auxiliaire émérite, dans la cathédrale Sainte-Marie. Mgr Mori a joué un rôle fondamental dans le dialogue de l’Église locale avec la société japonaise. Il y a quelques années, il a confié que « le message de foi ne parvient pas toujours à répondre aux demandes profondes des gens ; le problème crucial n’est pas lié à l’Orient ou à l’Occident, il s’agit de savoir comment toucher les cœurs des Japonais ».

Mgr Paul Kazuhiro Mori, évêque auxiliaire émérite de Tokyo, est décédé le 2 septembre au matin dans la capitale japonaise à l’âge de 84 ans.

L’archidiocèse de Tokyo porte le deuil de son évêque auxiliaire émérite, Mgr Paul Kazuhiro Mori, qui est décédé ce samedi 2 septembre au matin dans un hôpital de la capitale japonaise à l’âge de 84 ans. Avec lui, l’Église locale perd une figure qui a joué un rôle important dans les interactions pas toujours aisées entre l’Église catholique et la société japonaise, notamment avec le Shinsei Kaikan, le Centre culturel catholique situé dans le district de Shinjuku, dans le centre de Tokyo, que Mgr Mori a dirigé de 1985 à 2021.

Né à Yokohama en 1938 dans une famille non catholique, Mgr Mori a été baptisé durant sa troisième année de lycée dans une école jésuite. Il a rejoint les Carmes déchaux avant de prononcer ses vœux perpétuels en 1962. Il a été ordonné prêtre en 1967, et dix ans plus tard, il a quitté son ordre religieux pour être incardiné dans le clergé diocésain de Tokyo.

Il a expliqué ce choix dans une interview accordée il y a quelques années dans le magazine Mondo e Missione (publié par la congrégation missionnaire italienne PIME – Institut pontifical pour les missions étrangères) : « Une fois que je suis devenu prêtre, j’ai compris que la relation aux autres était fondamentale pour mon ministère. Alors que j’ai fait face à divers problèmes sociaux et que je me suis passionné pour ces questions, j’ai compris que la voie du Carmel n’était pas pour moi. C’est pourquoi je suis devenu un prêtre diocésain. »

« J’ai l’opportunité d’être en prise directe avec les problèmes de la société japonaise »

Il a été nommé évêque auxiliaire de l’archidiocèse de Tokyo en 1985, aux côtés de Mgr Pierre Seiichi Shirayanagi qui était alors archevêque. Il a assumé cette tâche et cette responsabilité durant quinze ans jusqu’en l’an 2000 quand, à la surprise de beaucoup de fidèles, il a décidé de prendre sa retraite à l’âge de seulement 62 ans.

Après cela et jusqu’en 2021, il a été l’âme du Shinsei Kaikan, un centre qui offre un riche programme de formations sur la culture chrétienne, ainsi que des opportunités de réflexion et de comparaison avec la culture japonaise dominante en vue de mieux comprendre en profondeur ce qui fait du pays ce qu’il est.

Pour l’évêque défunt, les activités culturelles sont inséparables des relations humaines. « À travers les formations sur le christianisme proposées aux débutants, et grâce aux contacts informels que j’ai avec de nombreux individus différents, je peux rencontrer beaucoup de monde et j’ai l’opportunité d’être en prise directe avec les problèmes de la société japonaise », a-t-il expliqué.

« Mon impression, c’est que le message de foi que propose l’Église ne parvient pas toujours à répondre aux demandes profondes des gens, à leurs problèmes existentiels », a-t-il confié en 2011 au magazine Mondo e Missione, alors qu’il collaborait avec ce média avec une chronique régulière sur la présence chrétienne au Japon. « Quand je propose les mots de la Bible à mes interlocuteurs, au début, ils semblent n’avoir aucune valeur ; mais quand débute une amitié, les choses changent et les gens s’ouvrent. »

« Le problème, c’est de ne pas savoir comment gagner la confiance des gens »

Pour Mgr Mori, le problème crucial « n’est pas lié à l’Orient ou à l’Occident ». « Le problème, c’est de ne pas savoir comment gagner la confiance des gens, comment toucher les cœurs des Japonais. Plutôt qu’un problème d’inculturation théologique, je suis convaincu qu’il s’agit avant tout de permettre aux gens de trouver un équilibre entre la foi, la vie et l’expérience du Christ dans leur vie. » En 2019, à la veille du voyage apostolique du pape François au Japon, il a également remarqué : « J’ai constaté un vide de plus en plus grand dans les cœurs des gens, en particulier chez les jeunes générations. Nous faisons face à tant d’épreuves. »

Plus spécifiquement, a-t-il ajouté, « je pense par exemple au nombre de suicides, aux ‘hikikomoris’ [un terme désignant l’état d’isolement social extrême rencontré par certains jeunes japonais], aux familles brisées, à la crise de certaines valeurs fondamentales de notre société, à la compétitivité excessive de notre système économique et social ». Dans ce contexte, il a souligné que « pour nous, aujourd’hui, la proclamation de l’Évangile nous pousse à être proches de toutes ces situations qui ont besoin d’espérance ».

Les funérailles de Mgr Kazuhiro Mori doivent avoir lieu ce mardi 5 septembre dans la cathédrale Sainte-Marie de Tokyo, en présence de Mgr Tarcisius Isao Kikuchi.

(Avec Asianews)


CRÉDITS

Asianews