Eglises d'Asie – Divers Horizons
Trois religieuses dont deux asiatiques honorées pour leur combat contre la traite des personnes
Publié le 07/11/2023
La cérémonie d’inauguration et de remise des nouveaux prix SATA (Sisters Anti-Trafficking Awards – Sœurs contre la traite) a eu lieu le 31 octobre dernier à Londres. À cette occasion, deux religieuses asiatiques ont été récompensées pour leur travail. Sœur Seli Thomas, une religieuse indienne de la congrégation des Sœurs de Marie Immaculée, a reçu le « Common Good Award » (Bien commun). Sœur Françoise Jiranonda, de Bangkok, a reçu le « Servant Leadership Award ». Par ailleurs, sœur Patricia Ebegbulem, du Nigéria, a reçu le prix pour la Dignité humaine (Human Dignity Award).
Pour sœur Thomas, ce prix est un « symbole d’espoir » pour tous les hommes, les femmes et les enfants victimes de la traite des êtres humains, et qui font l’expérience de la honte et des traumatismes liés à leur exploitation. Selon les organisateurs de l’événement, les trois religieuses lauréates ont été honorées « pour leur courage, leur créativité, leur coopération et leurs accomplissements en faveur de la protection de leurs communautés contre la traite humaine ».
« C’est ce que je fais depuis 12 ans, et j’espère continuer le reste de ma vie »
Sœur Seli travaille à Krishnagar, dans l’État du Bengale occidental, dans le nord-est de l’Inde (près de la frontière bangladaise), où elle tente de protéger les jeunes femmes contre les réseaux d’exploitation. Pour cela, elle explique fournir une aide juridique gratuite, et elle organise des ateliers de sensibilisation sur les migrations sécurisées et la traite des personnes. Elle s’est également investie auprès des enfants des prostituées vivant dans les maisons closes de Krishnagar.
Après la remise du prix, la religieuse indienne a remercié les organisateurs et évoqué l’histoire d’une des victimes qu’elle est parvenue à sauver. Une femme âgée d’une trentaine d’années qui est venue la voir en larmes. « Ma sœur, où étiez-vous toutes ces années ? », a cité sœur Seli durant son témoignage. « Si je vous avais rencontré plus tôt, je ne se serais jamais devenue une travailleuse du sexe, je n’aurais pas été victime des trafiquants, vendue et revendue à des hommes encore et encore depuis l’âge de 12 ans. »
Sœur Seli a confié que c’était un témoignage « bouleversant et douloureux » à entendre. « Tout ce que j’ai pu faire, c’était la consoler, mais sa douleur m’a poussée à continuer », a-t-elle ajouté. « Je sais bien que je ne peux pas changer le monde entier. Ce que je peux faire, c’est obtenir quelques changements et donner de l’espoir à ceux qui désespèrent, et ainsi sauver quelques vies contre les trafics, une personne à la fois », a-t-elle expliqué. « C’est ce que je fais depuis 12 ans, et j’espère continuer ainsi pour le reste de ma vie. »
« Les religieuses sont les premières à se battre contre la traite »
L’événement a été parrainé par l’Union internationale des supérieures générales (UISG), qui représente environ 600 000 religieuses de 80 pays et qui a fondé le réseau anti-trafics Talitha Kum ; par l’ONG Arise, une organisation qui lutte contre l’exploitation à travers le monde ; et par la fondation Conrad N. Hilton, créée par l’hôtelier Hilton en 1944.
La cérémonie a rassemblé environ 200 personnes, catholiques et non-catholiques, dont l’ancienne Première ministre britannique Theresa May (de 2016 à 2019) et Mo Farah, un athlète britannique d’origine somalienne. Selon les derniers chiffres de l’ONU, en 2020, les taux de détection des crimes liés à la traite des personnes ont chuté de 11 % et les condamnations de 27 %, illustrant un ralentissement général de la lutte contre ce fléau – un problème accentué durant la pandémie, et qui continue d’empirer dans certains pays en voie de développement.
Récemment, l’ONG Arise a publié un communiqué de presse afin de signaler que « les religieuses sont les premières à se battre contre la traite humaine dans le monde ». « Elles se trouvent souvent dans une position unique dans des régions reculées ou difficiles d’accès. Elles sont intégrées dans leurs communautés, qui leur font confiance – ce sont des éléments essentiels pour un travail efficace contre ces réseaux », a poursuivi l’organisation.
De son côté, sœur Françoise Jiranonda, de Thaïlande, a contribué à développer le réseau anti-trafics Talitha Kum, dont elle a été directrice. Elle travaille aujourd’hui à Bangkok où elle a ouvert deux écoles afin de protéger les jeunes thaïlandaises, en particulier les femmes de l’ethnie Karen vivant dans les régions rurales du pays. Des étudiantes bénéficient ainsi de formations professionnelles gratuites afin de développer leurs compétences.
Par ailleurs, sœur Ebegbulem a fondé le projet Bakhita Villa (nommé d’après sainte Joséphine Bakhita, une ancienne esclave soudanaise devenue religieuse canossienne), afin de réhabiliter et réintégrer les femmes victimes d’exploitation. Elle dirige également des écoles et des programmes de sensibilisation dans des régions rurales hautement exposées, afin de protéger les jeunes en leur fournissant une éducation et des emplois.
(Avec Asianews)
CRÉDITS
Asianews