Eglises d'Asie

Un évêque philippin souhaite plus de conseillers pédagogiques contre le harcèlement scolaire

Publié le 24/02/2023




Le 20 février, Mgr Alarcon, évêque de Daet et président de la Commission pour la jeunesse de la Conférence épiscopale philippine, a réagi à une déclaration récente du sénateur philippin Sherwin Gatchalian sur le nombre croissant d’élèves victimes de harcèlement scolaire dans le pays. « Presque 18 millions d’étudiants en ont été victimes, en raison du manque de conseillers pédagogiques pouvant les accompagner. Cela peut être empêché », a souligné l’évêque en appelant à mieux rémunérer les conseillers.

Des élèves du Saint Louise de Marillac College de Sorsogon, aux Philippines. Mgr Alarcon a appelé à mieux lutter contre les problèmes de harcèlement scolaire.

Mgr Rex Alarcon, évêque de Daet, dans la province de Camarines Norte dans le nord de l’archipel philippin, a appelé les législateurs du pays à voter rapidement une proposition loi qui pourrait développer le nombre de conseillers pédagogiques dans les écoles, dans le but de mieux lutter contre le fort taux de harcèlement scolaire.

L’évêque, qui est également président de la Commission pour la jeunesse de la Conférence épiscopale philippine, a souligné que « presque 18 millions d’étudiants ont été victimes de harcèlement scolaire dans le pays, et ceci en raison du manque de conseillers pédagogiques qui puissent accompagner les harceleurs et leurs victimes ». « Cela peut être empêché grâce à un accompagnement adapté », a insisté Mgr Alarcon, interrogé le 20 février.

Ses propos sont liés à une déclaration récente du sénateur philippin Sherwin Gatchalian, datés du 12 février et citant des chiffres de la Child Protection Network Foundation. Selon l’organisation, près de 17,5 millions d’élèves ont été victimes de harcèlement. L’enquête a été menée en janvier auprès de 654 écoles. Le sénateur Gatchalian a proposé de renforcer une loi sur la promotion de la santé mentale et du bien-être à l’école (Basic Education Mental Health and Well-Being Promotion Act), initialement présentée au Parlement en 2020, afin de mieux rémunérer les conseillers et de leur donner un cadre de travail plus adapté.

Un conseiller pour 6 733 élèves en moyenne

La loi cherche à renforcer la promotion des services de santé mentale face au nombre croissant de problèmes psychologiques parmi les enseignants et le personnel scolaire, selon une information du Manila Bulletin publiée le 31 janvier. Le sénateur Gatchalian explique que le ratio entre les étudiants et les conseillers pédagogiques est disproportionné. « Le ministère de l’Éducation n’embauche qu’un conseiller pour 500 élèves, ce qui veut dire qu’actuellement, les Philippines n’ont que 4 069 conseillers [au mois de juin 2022] pour plus de 27 millions d’étudiants », confie l’élu philippin, d’après un rapport de l’agence de presse Philippine Information News Agency.

Les chiffres du ministère de l’Éducation montrent que le pays compte 27,4 millions d’élèves aux niveaux collège et lycée, soit un conseiller pour 6 733 élèves. « Cette situation est absurde. Aucun conseiller n’aimerait travailler à l’école quand il faut accompagner plus de 6 000 élèves. En fait, beaucoup de nos élèves ont terminé leur scolarité sans avoir vu ou même rencontré leur conseiller pédagogique », affirme le sénateur.

De son côté, Mgr Alarcon explique que la commission épiscopale cherche à faire des recommandations afin d’augmenter la rémunération en vue d’obtenir plus de conseillers, en particulier dans les écoles privées catholiques. « Nous avons vraiment besoin d’eux, la pandémie n’a pas empêché le harcèlement par exemple. En fait, plus d’enfants ont besoin d’aide psychologique et mentale parce qu’ils n’ont pas sociabilisé avec leurs camarades dans les écoles durant cette période. Il est urgent de voter une loi pour faire face à ce problème », poursuit l’évêque.

Il estime qu’une façon de résoudre le « problème de ratio » entre le nombre de conseillers et d’élèves serait d’augmenter les salaires des conseillers travaillant dans les écoles. « Nous devons rendre leur travail attractif », explique-t-il.

3 829 conseillers pédagogiques ont quitté les Philippines entre 2019 et 2022

Jonalyn Bigay, conseillère pédagogique à l’école Père Angelico Lipani de Manille, assure que son travail est vital pour le bien-être des élèves. « Nous travaillons pour aider les élèves à révéler tout leur potentiel et à assurer une bonne entente et un bon esprit dans la salle de classe. En tant que professionnels, nous sommes appelés à prendre soin du bien-être holistique de chaque enfant, à être attentifs à leurs réussites et à leurs échecs, aussi bien en cours qu’à l’extérieur », précise-t-elle.

Actuellement, un conseiller pédagogique touche un salaire mensuel d’environ 25 000 pesos (430 euros) selon leur expérience, explique Rita Mangahas, conseillère au sein du Saint Louise de Marillac College de Sorsogon, dans la région de Bicol. Celle-ci précise que dans les écoles privées, les conseillers en début de carrière gagnent environ 19 000 pesos par mois (soit 325 euros). Rita Mangahas, âgée de 38 ans, a commencé à travailler il y a dix ans, et son salaire, qui était alors de 15 000 pesos, a presque doublé depuis.

« À l’époque je devais travailler plus de huit heures par jour pour accompagner les élèves », confie-t-elle. Aujourd’hui, la situation n’a pas changé, mais elle ne se plaint plus du salaire. « Je ne veux pas me plaindre, parce que j’ai deux enfants qui étudient dans la même école, et ils ont des frais de scolarité réduits. »

L’émigration est également vue comme une cause du manque de conseillers pédagogiques dans les écoles. Le ministère du Travail a rapporté que 3 829 conseillers ont quitté le pays entre 2019 et 2022 pour travailler à l’étranger, principalement dans des écoles en Australie et au Canada.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Saint Louise de Marillac College, Sorsogon City (Ucanews)