Eglises d'Asie

Un groupe pro-hindou demande d’écarter les indigènes convertis d’un programme social

Publié le 09/02/2023




Le Forum pour la protection de la foi et de la culture indigène, une organisation pro-hindoue radicale fondée l’an dernier, a demandé au gouvernement indien d’écarter les indigènes convertis au christianisme et à l’islam de la liste officielle des « Tribus répertoriées » (Scheduled Tribes) dans deux États majoritairement chrétiens du nord-est de l’Inde, au Meghalaya et au Nagaland. Une demande qui ne surprend pas les communautés locales à l’approche d’élections régionales qui auront lieu le 27 février prochain.

Des Adivasis (indigènes) à Ranchi en novembre 2020, dans l’État indien du Jharkhand.

Un groupe extrémiste hindou, appelé Janajati Dharma-Sanskriti Suraksha Manch (Forum pro-hindou pour la protection de la foi et de la culture indigène), a demandé au gouvernement de stopper les avantages accordés aux chrétiens indigènes dans le cadre d’un programme d’aide, dans deux États majoritairement chrétiens du nord-est de l’Inde à l’approche d’élections locales.

Les membres du groupe ont demandé aux autorités d’écarter les indigènes qui se sont convertis au christianisme ou à l’islam de la liste officielle des « Tribus répertoriées » (Scheduled Tribes) visée par le programme. Ceux qui sont sur cette liste sont éligibles à des avantages destinés à des groupes sociaux et indigènes désignés comme défavorisés socialement et économiquement.

Les membres du forum ont déclaré aux médias qu’ils prévoient d’organiser une manifestation devant le secrétariat d’État de Guwahati (dans l’État de l’Assam), le 12 février, ainsi qu’une marche dans la ville de Dispur, capitale de l’Assam, afin de demander aux autorités locales et fédérales de voter des amendements constitutionnels pour empêcher les chrétiens indigènes de profiter des aides du gouvernement.

Binud Kumbang, un responsable du groupe, estime que les chrétiens indigènes bénéficient de doubles avantages quand leurs enfants sont admis dans des écoles chrétiennes et qu’ils demandent en plus d’accéder aux bourses d’étude et aux quotas d’emploi prévus dans le cadre du programme social du gouvernement. Les chrétiens Dalits (intouchables) défavorisés sont actuellement privés de ces avantages sociaux sous prétexte que leur religion ne pratique pas le système de caste, mais les chrétiens Adivasis (indigènes) y ont accès à ce jour.

La demande du forum n’a pas surpris les communautés chrétiennes locales à l’approche d’élections importantes, qui auront lieu dans les États du Meghalaya et du Nagaland le 27 février prochain. Plus de 85 % des habitants du Meghalaya (3,28 millions d’habitants) sont chrétiens, dont 849 226 catholiques. Au Nagaland, on compte plus de 90 % de chrétiens sur 2 millions d’habitants, dont de nombreux baptistes. La plupart des habitants des deux États appartiennent à des tribus indigènes.

Des pressions destinées à « diviser le peuple indien au nom des castes et des religions »

« Cette demande d’écarter les chrétiens indigènes de la liste n’est pas nouvelle. Cela s’est répété dans des États comme le Gujarat, le Maharashtra et le Chhattisgarh, où les indigènes sont également nombreux », explique le père Vincent Ekka, qui dirige le Département des études indigènes de l’Institut social indien à New Delhi, interrogé le 7 février.

« C’est un complot politique qui est monté avant les élections régionales et générales dans le pays », assure-t-il. Le père Ekka, qui appartient à une communauté indigène, estime même que ces « comploteurs » utilisent la religion pour semer la division entre les populations indigènes, en vue de les priver de leurs terres, de leurs forêts et de leurs avantages sociaux.

Allen Brooks, porte-parole du Forum chrétien de l’Assam, une organisation multiconfessionnelle, pense lui aussi que ces pressions sont destinées à « diviser le peuple indien au nom des castes et des religions », afin de perpétuer la suprématie de la majorité hindoue à travers le pays. Il ajoute que les aides sociales sont données aux populations indigènes « sur la base de leur appartenance ethnique selon la Constitution indienne » et qu’elles n’ont « rien à voir avec la religion ».

Bagiram Boro, président du forum pro-hindou et à l’origine de la demande du groupe, a déclaré de son côté que son organisation a été fondée l’an dernier dans le but d’empêcher les conversions au christianisme. Il a affirmé que les conversions ont augmenté au cours des dernières décennies, ce qu’il considère comme une menace envers les coutumes et traditions des indigènes. Son forum prévoit également de s’adresser à la présidente indienne Droupadi Murmu, première femme indigène à ce poste, ainsi qu’au Premier ministre Narendra Modi en leur demandant d’intervenir contre cette tendance.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

Ucanews