Eglises d'Asie

Une famille chrétienne persécutée par des villageois bouddhistes dans la province de Savannakhet

Publié le 29/03/2022




Malgré une loi nationale votée en 2019 afin de garantir la liberté de religion sous certaines conditions, les minorités chrétiennes sont toujours régulièrement ciblées par des villageois bouddhistes dans les zones rurales du Laos. Au cours des dernières années, des organisations ont enregistré une série d’attaques contre les minorités, dans la petite nation communiste qui compte près de 7 millions d’habitants. Depuis décembre dernier, une famille de la province de Savannakhet a subi plusieurs attaques de villageois et des pressions de la part des autorités locales.

Une famille chrétienne laotienne a subi plusieurs attaques ces derniers mois, dans un village majoritairement bouddhiste de la province de Savannakhet, dans le sud du pays.

Les membres d’une famille chrétienne du sud du Laos, attaqués et déplacés de force par des villageois à cause de leur foi, subissent aujourd’hui des pressions à cause de messages publiés sur les réseaux sociaux et décrivant leur sort. Les autorités locales du district de Phalanxay, dans la province de Savannakhet, ont appelé les membres de la famille le 15 mars dernier en leur demandant de supprimer des messages et des vidéos publiés sur les réseaux sociaux, et racontant comment des villageois, menés par leur chef de village, ont lancé deux attaques contre la famille.

Dans une information publiée le 25 mars par Radio Free Asia, un responsable chrétien local, qui préfère rester anonyme, affirme que les autorités locales ont demandé le retrait des publications et des vidéos (montrant des attaques contre le cercueil du chef de famille, le 6 décembre dernier, et l’incendie criminel de leur maison au village de Dong Savanh, le 9 février) en l’échange de leur aide.

Selon lui, les autorités ont également demandé à la famille de modifier les messages publiés afin de retirer toute accusation contre le chef de village. Après l’incendie de leur maison, la police, qui a enquêté sur l’affaire, aurait fait des demandes similaires à la famille en demandant le retrait des messages et des vidéos. Les membres de la famille, toutefois, ont refusé à deux reprises et se sont même engagés à déposer des plaintes auprès des autorités provinciales et nationales.

« Pour l’instant, rien n’a été résolu »

Les douze membres de la famille appartiennent à l’Église évangélique de Savannakhet, où les villageois bouddhistes s’en prennent à ce qu’ils considèrent comme la pratique d’une « religion étrangère ». Seng Aloun, veuve et cheffe de famille, explique que quand son mari est décédé le 4 décembre, ils ont emmené son corps dans un cercueil pour l’enterrer dans le cimetière du village. Des habitants ont alors empêché l’enterrement et la procession funéraire a été attaquée. Les attaquants ont frappé le cercueil avec des bâtons et frappé les porteurs avec des matraques. Les membres de la famille ont donc enterré le corps dans leur rizière le jour suivant, malgré les objections des villageois.

Le 9 février, le chef de village a mené un groupe contre leur maison pour l’incendier, forçant la famille à fuir dans la forêt pour s’y cacher. Aujourd’hui, Seng Aloun, confie qu’elle peine à élever seule ses enfants et que leur situation a empiré depuis que leur maison a brûlé et que leur rizière a été saisie par les bouddhistes. Elle ajoute qu’à plusieurs occasions, les représentants du gouvernement ont promis de les aider et de trouver les coupables, sans jamais respecter leurs engagements à ce jour. « Pour l’instant, nous vivons toujours dans la forêt en dehors du village. Rien n’a été résolu », ajoute-t-elle.

La loi de 2019 n’a que peu d’effets dans les régions rurales

Un autre membre de l’Église évangélique de Savannakhet confie qu’il regrette l’inaction de l’État devant le sort de cette famille, alors que selon lui, la loi laotienne garantit en principe l’assistance du gouvernement et une poursuite judiciaire des coupables en cas de persécution religieuse. Il ajoute qu’il est inquiet parce qu’il semble que les autorités ne respectent pas les engagements du gouvernement central à offrir une protection légale des minorités comme les chrétiens.

Au cours des dernières années, plusieurs organisations ont enregistré une série d’attaques contre les chrétiens au Laos, alors que la nation communiste, qui compte près de 7 millions d’habitants, a pourtant voté une loi nationale en 2019 garantissant la liberté de religion, sous certaines conditions. Toutefois, cette loi n’a eu que peu d’effets dans beaucoup de régions, en particulier dans les zones rurales du Laos, où les chrétiens sont souvent harcelés et menacé d’expulsion à cause de leur foi, beaucoup de villageois bouddhistes considérant le christianisme comme une religion étrangère.

Récemment, après les dernières affaires, l’Alliance pour la démocratie au Laos, un groupe contrôlant la situation des droits de l’homme dans le pays, a appelé le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (OHCHR) à insister auprès du gouvernement laotien afin de le pousser à faire respecter la liberté religieuse et à venir en aide immédiatement à la famille persécutée. Le 17 mars, le groupe a adressé un communiqué au bureau de l’OHCHR pour l’Asie du Sud-Est en condamnant fermement les violences contre la famille, l’inaction du gouvernement et les pressions subies pour faire supprimer les publications sur les réseaux sociaux.

(Avec Ucanews)


CRÉDITS

RFA / Ucanews