Eglises d'Asie – Corée du Nord
Une situation alimentaire préoccupante en Corée du Nord selon un rapport
Publié le 27/05/2023
Selon un rapport publié le 23 mai par le service coréen de Radio Free Asia (RFA), la crise alimentaire s’est aggravée en Corée du Nord. Les activités agricoles y sont fortement perturbées et plusieurs millions d’habitants y souffrent de famine et de malnutrition, forçant nombre d’entre eux à fuir illégalement le pays communiste.
Selon un résident de la province de Ryanggang, cité par RFA, la situation est pire qu’en 2022 durant la pandémie de Covid-19. « La crise alimentaire actuelle dans les fermes coopératives de Ryanggang et Chagang est tellement grave qu’elle ne peut pas être comparée à 2022 durant la crise sanitaire », estime ce résident anonyme.
La production de pommes de terre, culture majoritaire dans la région du nord du pays, a diminué drastiquement à cause de la sécheresse. « Ils ont besoin de 8 tonnes de pommes de terre par ‘jeongbo’ [une unité de mesure coréenne équivalente à environ 9 900 m², soit presque un hectare] pour pouvoir semer au printemps. Donc dans le pire des cas, ils ne pourront faire pousser que ce qu’il faut pour conserver des semences », souligne la source. Le canton de Taehongdan, un centre agricole important dans la région, n’a récolté qu’entre 8 et 15 tonnes par jeongbo.
Le coût des pommes de terre à Hyesan, dans la province de Ryanggang, a atteint 2 000 wons coréens par kilogramme (0,2 centime d’euro), soit le prix le plus élevé depuis 2015. « Cela montre que la pénurie alimentaire est sérieuse pour les résidents de la région des montagnes du nord. »
Un manque de près de 800 000 tonnes de riz cette année
Selon un rapport récent du Service national de renseignement (NIS) sud-coréen, la Corée du Nord manquera près de 800 000 tonnes de riz cette année pour subvenir à ses besoins. Au cours des dernières années, le pays a subi des pénuries alimentaires régulières. Toutefois, la situation météorologique de l’an dernier a ruiné les cultures de pomme de terre et de maïs, et la situation s’est compliquée encore davantage à cause des interdictions sur les importations depuis la Chine – dues à la fermeture des frontières durant la pandémie de Covid-19.
Beaucoup des fermiers qui travaillaient dans les fermes coopératives nord-coréennes ne peuvent plus le faire à cause de la malnutrition, et l’armée a été envoyée pour combler le manque. Dans le système agricole collectif nord-coréen, les fermiers d’une localité travaillent sous le contrôle des autorités locales ; ils récoltent ensuite la production qui est redistribuée.
Durant les restrictions sur les rassemblements durant la pandémie, le gouvernement a distribué un terrain à cultiver à chaque famille afin d’éviter les contacts et la propagation du virus. Toutefois, la malnutrition a freiné la reprise des activités après la fin de la pandémie, et aujourd’hui, les autorités doivent trouver à la fois suffisamment de main-d’œuvre et de nourriture.
Selon RFA, le Comité central du Parti du travail de Corée (le parti dirigeant en Corée du Nord) a signalé aux cadres moyens du parti et de l’administration locale qu’ils seraient « sévèrement punis » en cas de décès de fermiers. Un autre résident anonyme précise que les exploitants agricoles, qui dépendent du gouvernement, ont collecté de la nourriture auprès des habitants aisés dans leurs régions afin de la distribuer aux fermiers affamés. « Ils empruntent la nourriture, promettent qu’ils rembourseront le double à l’automne, et ils la distribuent aux travailleurs agricoles pour qu’ils puissent s’en sortir », explique-t-il.
42 % de la population du pays souffre de malnutrition
Dans un rapport publié par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, Elizabeth Salmón (Pérou), Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme en Corée du Nord, affirme que près de 42 % de la population du pays souffre de malnutrition à cause des pénuries alimentaires. La situation économique et alimentaire dans le pays a forcé de nombreux habitants à tenter un voyage périlleux afin de rejoindre la Corée du Sud illégalement.
Récemment, deux familles soit une dizaine de personnes, dont des enfants, sont arrivées de l’autre côté de la frontière, selon RFA. « C’est un fait que des Nord-Coréens ont fait défection en Corée du Sud, et une enquête conjointe [avec l’armée] est en cours », souligne un représentant du NIS (Service national de renseignement).
Les deux familles auraient été incitées à fuir leur pays après avoir vu une émission télévisée sud-coréenne intitulée « Now on My Way to Meet You », présentant des transfuges nord-coréens s’adaptant à leur nouvelle vie dans le Sud. En Corée du Nord, une de ces familles aurait été ridiculisée et discriminée car l’admission de leur père au Parti du travail de Corée avait été rejetée – les membres du parti peuvent accéder à des emplois privilégiés, une meilleure éducation et position sociale et de meilleures rations alimentaires.
Selon le ministère sud-coréen de l’Unification, le nombre de transfuges nord-coréens fuyant en Corée du Sud a cependant diminué. Ce chiffre s’élevait à près de 1 000 par an en 2019, mais il s’est fortement réduit pour atteindre seulement 229 personnes en 2020 à cause de la fermeture des frontières et une surveillance renforcée durant la pandémie dans les régions frontalières. On a compté seulement 63 et 67 transfuges respectivement en 2021 et 2022.
(Avec Ucanews)