Eglises d'Asie

Bébés génétiquement modifiés : un scientifique chinois vivement critiqué pour ses recherches

Publié le 01/12/2018




Un scientifique chinois de l’université de Shenzhen, He Jiankui, est vivement critiqué pour ses recherches après avoir affirmé, le 25 novembre sur Youtube, avoir modifié le génome de deux bébés, deux filles jumelles, afin de les rendre résistantes au virus du Sida. Les critiques, qui viennent aussi bien du monde scientifique que des personnalités religieuses, dénoncent des recherches « immorales » et « contraires à l’éthique ».

Un scientifique chinois, qui affirme avoir créé les premiers bébés génétiquement modifiés, a été vivement critiqué par les personnalités scientifiques et religieuses pour son action jugée « immorale ». Le 25 novembre, He Jiankui, professeur associé de l’université des sciences et technologies de Shenzhen, a annoncé sur Youtube que deux filles jumelles dont les gènes ont été modifiés sont nées en Chine ce mois-ci. Les gènes de « Lulu » et « Nana » ont été modifiés, a annoncé le scientifique lors d’un sommet hongkongais sur la modification du génome humain qui s’est tenu le 28 novembre, pour les rendre naturellement résistantes au virus du Sida. Son travail n’a pas encore été vérifié. Une telle modification du génome est interdite dans la plupart des pays, y compris en Chine. Son université confie n’être pas au courant du projet de recherche et compte lancer une enquête. Elle assure que le scientifique est en congés son solde depuis février. Le scientifique a déclaré en anglais durant le sommet qu’il était « fier » de ses recherches. Il a expliqué que huit couples séropositifs ont signé volontairement leur accord pour les recherches, mais un couple a finalement renoncé.

Il explique que le Sida est un problème dans beaucoup de pays développés et que les enfants infectés sont discriminés. « Ce que nous pouvons faire pour les aider, c’est l’objet de ce projet », a-t-il déclaré. Le professeur a ajouté qu’il ne révélerait pas l’identité des bébés à cause de la violation des lois chinoises, et que son université n’était pas au courant. Il explique que les rencontres avec les couples participants ont duré environ 70 minutes, pour s’assurer qu’ils comprenaient bien et qu’ils acceptaient l’implantation de deux embryons. Il a ajouté que l’équipe de recherche continuera de suivre la croissance et la santé des jumelles jusqu’à l’âge de 18 ans. « Je m’occuperai d’elles avec tout mon argent et toute mon énergie. Je suis prêt à en assumer la responsabilité pour le restant de ma vie », affirme-t-il. Suite à son intervention, Tsui Lap-chee, président de l’Académie des sciences de Hong-Kong, a confié que les propos du professeur n’ont pas suffi à éclaircir les doutes à propos de son expérience. Tsui Lap-chee, généticien, a déclaré qu’il y a un code à respecter pour les recherches scientifiques. « Chaque étape doit être déclarée et partagée avec les autres, mais il voulait réussir à tout prix. En fin de compte, les bébés n’ont pas bénéficié d’une aide médicale, ils ont juste été l’objet de ses expériences. C’est totalement immoral », a-t-il dénoncé, ajoutant que l’expérience était « complètement injustifiée ».

L’héritage le plus précieux de l’humanité

« C’était une mauvaise décision, parce que des traitements existent déjà contre le sida, et il peut être évité avec une éducation adaptée. Alors pourquoi utiliser une méthode aussi difficile pour régler le problème ? » a-t-il demandé. Il a décrit les deux filles comme « malchanceuses » et que les événements prouvent qu’il est nécessaire de renforcer les contrôles moraux et ethniques des expériences scientifiques, et même de réfléchir à l’encadrement de telles expériences par la loi. Le père Joseph Tham, qui enseigne à la faculté de bioéthique de l’Athénée pontifical Regina Apostolorum, à Rome, estime que le scientifique n’avait pas réfléchi à l’expérience du point de vue des bébés. « A-t-il pensé à leur avenir ? À leur développement psychologique, à leur évolution sur le plan de la santé ? Il semble que personne ne peut le dire, et c’est injuste pour les filles. Même s’il dit qu’il prendra soin d’elles, il n’est pas médecin. » Le prêtre ajoute qu’en matière de consentement éclairé, « les règles sont très strictes ». « A-t-il dit aux parents que l’expérience était sans précédent et les résultats inconnus ? » Le cardinal Elio Sgreccia, président émérite de l’Académie pontificale pour la vie, cité par Vatican News, affirme que « l’héritage le plus précieux de l’humanité est son patrimoine génétique », qui est inviolable « parce que tout changement aura un impact sur toute l’humanité ». Par conséquent, « nous devons respecter les principes de précaution et refuser fermement ». Il ajoute que ce qui est possible sur le plan technique n’est pas souhaitable sur le plan éthique. Le cardinal a demandé au Seigneur la prudence, la justice et la rigueur scientifique, en appelant les législateurs à renforcer la loi dans ce domaine, « parce que ce n’est pas qu’une seule personne mais toute l’humanité qui a été visée ».

(Avec Ucanews, Hong-Kong)

Crédit : Doraemon.tvb (CC BY-SA 3.0)