Eglises d'Asie

Développement et pastorale chrétienne

Publié le 18/03/2010




Au cours de la deuxième semaine de juillet, les prêtres du diocèse de Chantaburi se sont réunis pour une session de réflexion sur les nouvelles conditions de vie créées par le rapide développement industriel de la région. Le gouvernement a, en effet, lancé un vaste programme dans cette région, avec une nouvelle installation portuaire pour navires de gros tonnage et la construction de très nombreuses usines à proximité de ce port. Le diocèse de Chantaburi comprend plusieurs provinces le long du golfe de Thaïlande, jusqu’à la frontière khmère.

La session s’est ouverte sur une description des problèmes pastoraux nouveaux. Mise à part une enclave déjà passablement transformée par le tourisme – la ville et les environs de Pataya -, cette région était essentiellement agricole. Et les mentalité restaient assez traditionnelles. On constate aujourd’hui un éclatement des communautés chrétiennes. Les gens des villages émigrent vers les zones industrielles. Le démarrage des usines amène aussi toute une population nouvelle qui vient spécialement des provinces pauvres du nord-est, dont un certain nombre de chrétiens. Le développement industriel a provoqué également une baisse de la pratique religieuse ainsi que de la moralité : l’argent devient la valeur primordiale, au détriment même de l’unité familiale qui était pourtant une valeur importante de la société thaï. On constate que les jeunes foyers commencent à délaisser les personnes âgées, ce qui ne se voyait guère jusqu’ici.

Des professeurs d’université sont intervenus pour donner leur analyse et souligner les points sur lesquels il leur paraît important de rester vigilant pour l’avenir. Ils ont mis l’accent sur la rapidité des changements intervenus: il a suffi de trois ans pour qu’une très grande partie des champs de riz ou de manioc soit remplacée par des usines. Un autre problème est celui de la très forte spéculation sur les terrains, et le fait aussi que les diverses industries sont entièrement aux mains des capitaux étrangers (japonais, américains, coréens, etc.). Leur installation dans cette région de la Thaïlande n’apporte pas de vrai développement pour le pays: l’argent vient de l’étranger et y retourne. Les compagnies industrielles s’installent là, seulement parce que la main d’oeuvre est encore très bon marché. Les conséquences sociales sont énormes : surpopulation autour des usines, apparition de bidonvilles, exploitation de la main d’oeuvre souvent très mal payée. Les seuls à bénéficier de cette opération sont ceux qui ont pu acheter les terrains à bas prix et qui, maintenant, les revendent à prix d’or. Ceux-ci sont pour la plupart des membres du gouvernement ou du parti au pouvoir. La société change complètement d’aspect et perd ses valeurs traditionnelles. Les familles, elles-mêmes, sont minées par la course à l’argent. Ce développement affecte également les mass media: la télévision n’est là que pour faire vendre des produits et faire de tout citoyen un consommateur. En outre, les universitaires ont souligné l’effet néfaste sur le système d’éducation qui s’oriente dès lors beaucoup moins vers l’épanouissement de la personne que vers la production de techniciens habiles et efficaces.

Cette session a été une occasion, encore trop rare, de prendre conscience des vrais problèmes posés à l’Eglise par ce développement industriel très rapide du pays.