Eglises d'Asie

Sabah: des Kadazans chrétiens dans le parti malais et musulman de la majorité

Publié le 18/03/2010




L’assemblée générale de l’UMNO (United Malays National Organisation), qui s’est tenue à Kuala Lumpur du 7 au 10 novembre 1991, a été marquée par un événement sans précédent dans l’histoire de la Malaisie indépendante: 40 chrétiens, membres de la délégation de l’Etat de Sabah, étaient en effet présents et leur chef, M. John O.T. Ghani, a fait un discours chaleureusement applaudi par les 2 000 délégués: « Aujourd’hui, moi, un Kadazan chrétien, je me tiens devant vous pour vous assurer que nous combattrons à vos côtés pour la justice et l’harmonie à Sabaha-t-il déclaré.

L’UMNO tient une place centrale sur l’échiquier politique malaisien puisqu’il est le parti du premier ministre fédéral, M. Mahathir. Fondé après la deuxième guerre mondiale, le parti a été le fer de lance du mouvement pour l’indépendance de la Malaisie, puis l’élément essentiel de l’alliance au pouvoir depuis lors. Traditionnellement, l’UMNO représente la majorité malaise musulmane du pays. Récemment, son influence a été battue en brèche par les fondamentalistes islamiques du Parti Islam, obligeant quelquefois les leaders de l’UMNO à se laisser aller à une certaine surenchère dans le domaine religieux. Jusqu’à présent, il n’y avait aucun non-Malais non musulman dans le parti.

L’Etat de Sabah, situé sur la partie malaisienne de l’île de Bornéo, est gouverné par le PBS (Parti Bersatu Sabah), dominé par des Kadazans chrétiens qui forment la majorité de la population. Le pouvoir fédéral de Kuala Lumpur soupçonne les leaders de Sabah de vouloir faire sécession. Ceux-ci, de leur côté, estiment être brimés par le pouvoir fédéral. Ils ont quelque raison à cela puisque, ces dernières années, de nombreuses personnalités locales, dont M. Jeffrey Kitingan, frère du premier ministre, ont été arrêtées par le pouvoir central pour atteinte à la sûreté de l’Etat. Ils sont détenus sans jugement (13).

Dans ce contexte, l’ovation réservée par les 2 000 délégués de l’assemblée générale de l’UMNO à M. John Ghani et ses compagnons n’est sans doute pas exempte d’arrière-pensées politiques, car la division des Kadazans de Sabah, si elle venait à s’accentuer, ne pourrait que servir les intérêts du pouvoir fédéral.

Il n’est pas certain cependant que l’accueil de non-Malais chrétiens au sein de l’UMNO soit accepté sans remous par la base du parti. Reste que, pour la première fois dans l’histoire de la Malaisie indépendante, les frontières ethniques et religieuses ont été délibérément franchies par le parti majoritaire musulman.