Eglises d'Asie

La peur s’installe chez les chrétiens et les autres groupes minoritaires

Publié le 18/03/2010




En quelques mois, les rapports entre la majorité musulmane et les minorités semblent s’être détériorés. Alors qu’ici et là des rencontres avaient permis aux chrétiens et aux musulmans d’entrer en dialogue (13), la peur règne aujourd’hui, à la suite de l’assassinat public d’un enseignant-poète chrétien (14).

Farooq Ahmad, l’étudiant de 20 ans meurtrier de M. Naimat Ahmar, aurait avoué qu’il n’avait pas entendu lui-même les propos insultants à l’égard du prophète, pour lesquels il a tué. Ce qui n’empêche pas certains fanatiques de lui décerner le titre de “héros”. Pendant ce temps, la veuve et les cinq enfants de la victime ont du mal à survivre, et une quête a été faite à leur intention dans les églises de Faisalabad.

Plusieurs personnalités musulmanes ont cependant condamné ce meurtre. Elles craignent qu’il provoque l’accroissement d’une intolérance susceptible de se retourner aussi contre les minorités musulmanes.Les membres des minorités, quelle que soit leur appartenance religieuse, ont peur d’être, un jour ou l’autre, accusés faussement de blasphème: un crime désormais puni de mort par la loi au Pakistan.

Du côté des chrétiens, mise à part une conférence de presse donnée par Mgr John Joseph, évêque de Faisalabad, les autorités de l’Eglise catholique sont restées silencieuses. M. Peter John Sohtra, ministre des Minorités, a demandé qu’une enquête judiciaire de haut niveau soit menée sur le meurtre de M. Ahmar, puis il s’est tu. Un membre de l’Assemblée nationale, M. Julius Salik, a organisé une procession dans les rues de Lahore, afin de demander que soient respectés les droits des minorités.

La Conférence des supérieurs religieux catholiques a cependant écrit au premier ministre une lettre sévère, exprimant les craintes des signataires et réclamant justice pour les minorités (15). L’évêque protestant, Mgr Alexander Malik, a fait devant la presse une déclaration courageuse rappelant qu’à l’époque où le projet de loi sur le blasphème était discuté, les minorités avaient déjà exprimé leur appréhension devant les risques d’abus, et que personne, alors, ne les avait pris au sérieux.

Quant au gouvernement, il maintient un silence embarrassé. Les évêques ont bien demandé audience au président, M. Ishaq Khan; mais celui-ci, jusqu’à maintenant, refuse de les recevoir.